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PHALÉAS DE CHALCÉDOINE (IVe-IIIe s. av. J.-C.)

Contemporain de Platon, connu par le livre XI de la Politique d'Aristote, où le Stagirite étudie et compare les différentes constitutions en vigueur ou proposées. De Phaléas on sait seulement qu'il fut le premier à insister sur une plus juste répartition des richesses. On ne peut isoler son projet de réforme du contexte historique. La Grèce du ive siècle se relève avec difficulté des guerres médiques, qui l'ont épuisée. Une grave crise économique, dans laquelle le problème des approvisionnements joue un rôle important (les terres sont demeurées en friche du fait des guerres incessantes), s'alourdit d'une tension politico-sociale. Les petits propriétaires fonciers endettés ont dû mettre en gage leurs fonds et réclament une redistribution des terres : réduits à une quasi-mendicité, ils sont venus grossir, dans les cités, la foule des artisans et des petits commerçants, dont la situation s'est dégradée, ainsi que des mercenaires, qui, temporairement démobilisés, hantent, sans ressources, les places où s'agitent les démagogues et qui constituent une masse disponible pour quiconque voudrait tenter un coup de force. Or, à Athènes, les révolutions se sont succédé et le peuple, le demos, se désintéresse de l'agora au point qu'il faudra le payer pour qu'il assiste aux assemblées. Les riches s'enrichissent, tandis que les pauvres chaque jour s'appauvrissent encore. Phaléas se préoccupe des moyens d'enrayer ce processus. Des critiques formulées contre lui dans le texte d'Aristote se dégagent deux propositions. En premier lieu, Phaléas, ayant établi que les séditions naissent d'une injuste répartition des biens, postule une redistribution des biens fonciers en lots égaux. Aristote souligne alors les difficultés que rencontrerait une telle réforme, plus facile à établir, dit-il, au moment de la fondation d'une colonie que dans une cité, où elle risque d'être fort mal accueillie. Phaléas préconise pourtant une égalisation graduelle : les riches donneraient des dots (en biens fonciers) à leurs filles, sans qu'eux-mêmes en reçoivent ; les pauvres, au contraire, en recevraient sans en donner. Mais, ajoute Aristote, fixer le montant des fortunes sans fixer aussi le nombre des enfants, donc des héritiers, est illusoire, car ainsi on aboutira progressivement à une situation identique.

Mais Phaléas, semble-t-il, donne à sa réforme une seconde base : celle de l'éducation. Il souhaite que, grâce à une solide formation morale, on apprenne aux enfants à restreindre par eux-mêmes le désir de posséder des richesses, à réfréner leur propre insatiabilité. Mais il est possible d'objecter au réformateur qu'il existe, outre un amour des richesses, une soif des honneurs et des plaisirs, qui peut conduire aux pires actions.

C'est à travers telles critiques que l'on est renseigné sur la réforme préconisée par Phaléas. Mais Aristote en a-t-il eu une connaissance directe et personnelle ? Il faisait, en effet, travailler un grand nombre de disciples, ces derniers rassemblant des notes et menant des enquêtes, que le maître utilisait ensuite pour ses cours ou ses ouvrages. Si mal connu qu'il soit, le projet de Phaléas révèle néanmoins l'urgence du problème social à cette époque et le trouble d'un esprit choqué par d'évidentes injustices.

— Marie-Rose MAYEUX

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Marie-Rose MAYEUX. PHALÉAS DE CHALCÉDOINE (IVe-IIIe s. av. J.-C.) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

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