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QUATRE AOÛT 1789 NUIT DU

Abolition des privilèges, 1789 - crédits : Sammlung Rauch/ interfoto / AKG-images

Abolition des privilèges, 1789

Dans la nuit du 4 août 1789 disparaît l'ancienne France fondée sur le privilège et les vieilles structures de la féodalité. La séance du 4 août 1789 de l'Assemblée nationale est la conséquence de la Grande Peur, qui jette les paysans contre les châteaux. Le soulèvement des campagnes rappelle aux députés le problème paysan. Les révoltes agraires ne touchent pas seulement les intérêts de la noblesse, mais également ceux de la bourgeoisie, qui avait acquis de nombreux biens fonciers. Faut-il défendre la propriété par la force ou faire des concessions ? Nobles libéraux et bourgeois penchent finalement pour la dernière solution. Le 4 août au soir, le vicomte de Noailles, un seigneur ruiné, réclame l'abolition des privilèges fiscaux, la suppression des corvées et de la mainmorte. Il est appuyé par le duc d'Aiguillon. L'Assemblée, d'abord réticente, se laisse entraîner par un véritable délire qui a frappé tous les contemporains. « On pleurait, on s'embrassait. Quelle nation ! Quelle gloire ! Quel honneur d'être français ! », note un témoin. Disparaissent d'un coup, dans l'élan qui emporte l'Assemblée, les corvées, les justices seigneuriales, les dîmes, la vénalité des offices, les privilèges fiscaux des provinces, des villes et des individus. C'est reconnaître l'égalité de tous devant l'impôt et devant l'emploi et achever l'unité de la nation. « Nous avons fait en dix heures, écrit un député, ce qui devait durer des mois. » En réalité les décrets des 5 et 11 août n'abolissent que les servitudes personnelles, les corvées et le droit de chasse, tandis que les droits réels pesant sur la terre ne sont déclarés que rachetables à un taux onéreux. L'abolition de la vénalité des offices s'accompagne d'une indemnisation qui permet aux anciens titulaires de réinvestir l'argent dans l'achat de biens nationaux. Quant aux corporations, l'article 10 du décret du 11 août se borne à leur interdire de nommer des représentants particuliers pour défendre leurs intérêts devant la municipalité. Elles ne disparaîtront qu'avec la loi d'Allarde, le 2 mars 1791. La nuit du 4 août doit être ramenée, en dépit de son retentissement, à de plus modestes proportions, car elle a eu surtout pour but de calmer les jacqueries qui menaçaient les intérêts de la bourgeoisie autant que ceux des nobles. Elle n'en a pas moins consacré l'abolition du régime féodal et des privilèges.

— Jean TULARD

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Écrit par

  • : professeur à l'université de Paris-IV-Sorbonne

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Pour citer cet article

Jean TULARD. QUATRE AOÛT 1789 NUIT DU [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Média

Abolition des privilèges, 1789 - crédits : Sammlung Rauch/ interfoto / AKG-images

Abolition des privilèges, 1789

Autres références

  • ALSACE PRINCES POSSESSIONNÉS D'

    • Écrit par Ghislain de DIESBACH
    • 661 mots

    Lors de la réunion de l'Alsace à la France, sous Louis XIV, il avait été précisé que les fiefs appartenant à des souverains étrangers ne relèveraient pas du droit français, notamment en matière d'impôts et de douanes.

    En voulant appliquer les décrets du 4 août 1789 sur l'abolition...

  • CI-DEVANT

    • Écrit par Jean TULARD
    • 519 mots

    L'expression de ci-devant se dit fréquemment au xviie et au xviiie siècle des personnes et des choses dépossédées de leur état ou de leur qualité. Le terme en vint à désigner pendant la Révolution les anciens nobles.

    Si Chateaubriand a pu dire que « les plus grands coups portés...

  • GRANDE PEUR (1789)

    • Écrit par Jean TULARD
    • 399 mots

    La peur a joué un rôle important dans le déroulement de la Révolution française : peur du complot aristocratique à la veille du 14 juillet 1789, peur des partageux et des anarchistes au moment de Brumaire 1799, mais le terme de Grande Peur a été réservé aux insurrections paysannes de 1789. Dans les...

  • RÉVOLUTION FRANÇAISE

    • Écrit par Jean-Clément MARTIN, Marc THIVOLET
    • 29 554 mots
    • 3 médias
    ...et les droits féodaux, mais en prévoyant une compensation, les seigneurs devant percevoir des indemnités. L'élan qui préside à ces propositions dans la nuit du 4 août ne peut pas faire oublier que ces décisions trop rapides posent plus de problèmes qu'elles n'en résolvent, à commencer par l'obligation...

Voir aussi