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HOWL, Allen Ginsberg Fiche de lecture

Howl, ce long poème d'Allen Ginsberg (1926-1997), composé sous l'influence de Jack Kerouac et de William Burroughs, fut lu en public en octobre 1955, lors d'une séance organisée par Kenneth Rexroth dans la Galerie Six à San Francisco, avant d'être publié en 1956. Il devint du jour au lendemain l'étendard de la révolte de la « beat generation ». C'est une lamentation jazzée, comparable dans son dessein à La Terre vaine (1992) de T. S. Eliot. Ce cri de défi frénétique lancé à l'Amérique matérialiste se termine lui aussi par une promesse de rédemption. Mais les termes de la plainte, pleins de colère et d'obscénité, en sont très différents. En 1957, Lawrence Ferlinghetti fut poursuivi pour avoir publié et vendu ce texte (dédié à Carl Solomon et préfacé par William Carlos Williams) dans sa librairie de City Lights Press, mais fut acquitté lors du procès pour obscénité que lui avait intenté la ville de San Francisco.

De la chute à la rédemption

L'élégie funèbre commence avec la descente aux enfers d'une nation qui a trahi ses idéaux démocratiques et humanitaires. « J'ai vu les plus grands esprits de ma génération détruits par la folie, affamés hystériques nus,/ se traînant à l'aube dans les rues nègres à la recherche d'une furieuse piqûre... » : Ginsberg module son constat rhapsodique comme un gémissement continu qui se tiendrait au bord de la folie. Le poème a la beauté de la poésie abstraite, elle se veut faite de « combinaisons maladroites comme les pas de Charles Chaplin », de « longs refrains au saxophone qu'aurait pu entendre Jack Kerouac » dont la prose a inspiré Ginsberg.

Le deuxième chant dénonce la déshumanisation de l'univers industriel. Sous l'effet du peyotl, le poète a des visions : de son regard vide, le crâne de robot de Moloch le fixe par la fenêtre de sa chambre d'hôtel, « Moloch dont les yeux sont mille fenêtres aveugles ! Moloch dont les gratte-ciel se dressent dans les longues rues comme des Jéhovah infinis ! Moloch dont les usines rêvent et croassent dans la brume ! ». Le troisième chant est celui de l'Agnus Dei qui va racheter ce monde damné – l'ami Carl Solomon, le saint fou, émule d'Antonin Artaud, crucifié à l'asile de Rockland où il a lui-même demandé à être interné. Cette incantation revêt un souffle whitmanien pour proclamer que tout est sacré dans l'homme : la chair, le sexe et les viscères comme l'esprit. L'illumination et l'extase, plutôt qu'une conception philosophique structurée, sont à la source de cette inspiration visionnaire.

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Pour citer cet article

Michel FABRE. HOWL, Allen Ginsberg - Fiche de lecture [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • GINSBERG ALLEN (1926-1997)

    • Écrit par Kenneth WHITE
    • 508 mots
    • 1 média

    « Ce qu'il faut à ce pays », disait Henry Miller, parlant des États-Unis, « c'est un fou inspiré. » Quand le volume Howl and Other Poems parut chez Lawrence Ferlinghetti, qui a édité presque tous les livres de Ginsberg, à San Francisco (City Lights Press), en 1956, Miller devait...

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