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FRANCE L'année politique 1997

Lionel Jospin - crédits : Pierre Boussel/ AFP

Lionel Jospin

L'année politique 1997 s'est achevée comme peu l'auraient imaginé en son début. La dissolution aventureuse de l'Assemblée nationale aura débouché sur une formule nouvelle de cohabitation entre un président de droite et un Premier ministre de gauche, caractérisée par un affaiblissement inédit, et peut-être durable, de l'Élysée. En ce qui concerne les forces politiques, les élections législatives traduisent et renforcent une crise d'identité des partis de droite et donnent aux partis de gauche, singulièrement au Parti socialiste, une nouvelle jouvence qui efface la catastrophe électorale de 1993. Sur le fond, elles ont rendu possible une nouvelle expérience « socialiste », post-mitterrandienne désormais, neuve par son contexte et par les ambitions affichées.

L'affaiblissement élyséen

Au soir du second tour des élections législatives, le 1er juin 1997, la droite se voit privée, vraisemblablement pour cinq ans, du pouvoir qu'elle exerçait sans partage depuis quatre années. Elle a perdu son chef en même temps que sa majorité. Certes, le président de la République doit exercer son mandat jusqu'en 2002. Mais il apparaît comme le principal instigateur de la déroute de son camp et ses prérogatives tant politiques qu'institutionnelles sont diminuées.

Si les dirigeants de la nouvelle opposition conservent à son égard une déférence formelle due à sa fonction, des critiques acerbes sont formulées à son endroit. Surtout, il ne pèse plus sur la vie du parti qu'il a fondé et présidé pendant dix-huit ans, puisqu'il ne peut éviter la prise du pouvoir rapide au R.P.R. par Philippe Séguin, élu le 6 juillet lors d'assises extraordinaires avec l'appui des partisans d'Édouard Balladur. L'élection de Jean-Louis Debré à la tête du groupe R.P.R. de l'Assemblée nationale n'est qu'un maigre lot de consolation. Le R.P.R. n'est plus le parti du président et les « chiraquiens » en deviennent une composante parmi d'autres, qui plus est minoritaire.

Plus fondamentalement, le rôle du président s'est trouvé modifié en raison de la sanction politique directe que lui ont infligée les électeurs. D'un côté, il conserve certaines compétences propres en matière de défense et de politique étrangère, mais ces domaines paraissent plus « partagés » que « réservés ». Il garde ses prérogatives en matière de nomination des hauts fonctionnaires et dirigeants d'entreprises publiques nommés par décret en Conseil des ministres, mais la situation se prête mal à ce qu'il impose ses choix ou contrarie trop longtemps ceux du gouvernement. D'un autre côté, il se trouve dépourvu du pouvoir d'impulsion qu'il détenait dans les autres secteurs de l'action publique, notamment les questions économiques, sociales et judiciaires, et ne dispose plus de l'arme de la dissolution. S'il peut porter publiquement une appréciation négative sur les projets du gouvernement (trente-cinq heures, emplois-jeunes), cette intervention s'apparente à celle d'un ministère de la parole. Il peut exister des oppositions claires entre l'Élysée et Matignon, mais tout durcissement de la cohabitation ne pourrait, semble-t-il, qu'affaiblir le président.

Il n'est dès lors pas fortuit que le débat sur les institutions ait connu un nouvel élan. Même si, constitutionnellement, il est impossible de réduire la durée des fonctions de l'actuel titulaire du poste, à l'avenir le quinquennat, pense-t-on, pourrait constituer une solution pour éviter une trop longue cohabitation. Certains vont même plus loin et appellent de leurs vœux un régime présidentiel qui mette un terme à la « dyarchie au sommet » tout en revalorisant le rôle du Parlement. L'interrogation sur la fonction exacte du président semble en tout cas le signe[...]

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Écrit par

  • : président du Centre d'étude et de réflexion pour l'action politique, enseignant à Sciences Po, Paris

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Pour citer cet article

Nicolas TENZER. FRANCE - L'année politique 1997 [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

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