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ESQUIMAUX ou ESKIMO

Les temps modernes

Après une longue période de contacts sporadiques avec les populations eskimo, les Occidentaux s'installèrent dans les régions arctiques, en nombre croissant, poursuivant des objectifs divers : évangélisation et alphabétisation, administration, commerce, prospection ou exploitation des ressources enfin, à partir des années 1950, défense stratégique (implantation de bases militaires dans toute la zone, par exemple à Thulé au Groenland). L'existence des Eskimo en fut profondément transformée : abandonnant le nomadisme, ils devinrent sédentaires, regroupés dans des agglomérations où ils bénéficièrent de l'assistance médicale, de l'instruction publique, de possibilités d'emplois salariés et de certaines facilités de la vie moderne occidentale (logements avec eau courante et électricité, proximité de magasins, etc.). Mais ils firent aussi l'expérience de la contrepartie de l'urbanisation : chômage, prolétarisation et assistance sociale. L'histoire des Ammassalimiut, l'ethnie la plus orientale du territoire eskimo (Groenland de l'Est), découverte en 1884 par le Danois G. Holm, illustre de façon particulièrement frappante les étapes franchies par les Eskimo, passant de façon accélérée de la préhistoire à l'ère de l'aviation, de la radio, du téléphone et de la télévision.

Pour tout l'Arctique, les années 1950-1960 constituèrent un grand tournant dans la vie des communautés autochtones. Succédant aux bases militaires américaines établies pendant la Seconde Guerre mondiale le long des côtes, de l'Alaska au Groenland, fut installée une chaîne de radars – système d'alerte pour les États-Unis –, la Dew Line, construite en 1955-1957. Le développement de l'aviation civile a, en outre, facilité les liaisons avec des régions autrefois presque inaccessibles. Enfin, les richesses économiques du Grand Nord – pétrole et gaz d'Alaska et du nord-ouest canadien, nombreux minerais (or, zinc, plomb, uranium, molybdène...), énergie hydro-électrique de la baie James de l'est canadien, sans compter les considérables ressources maritimes (poissons et crustacés) – n'ont cessé d'attirer vers ces contrées une importante population occidentale.

Chasseur Inuit, Groenland - crédits : Martin Zwick/ Reda&Co/ Universal Images Group/ Getty Images

Chasseur Inuit, Groenland

Encore pratiquement seuls sur leurs territoires au début du xxe siècle, les Eskimo sont devenus minoritaires dans certaines régions ; cependant, ils ont pris conscience de leurs richesses et des menaces qui pèsent sur leur environnement comme sur eux-mêmes. Des mouvements politiques autochtones, mis en place dans les années 1970, se sont développés et, face aux gouvernements dont ils relèvent, ou aux projets de développement industriel touchant leurs régions, ont revendiqué la reconnaissance de leurs droits territoriaux ainsi que la participation à la gestion des affaires locales. Les Eskimo d'Alaska se sont organisés en corporations régionales en 1971. Les Groenlandais ont acquis en 1979 une autonomie interne qui a été élargie en 2009 (seules la défense et les affaires étrangères restent du ressort de Copenhague) ; ils ont obtenu leur retrait de la C.E.E. en 1984. Enfin, les Inuit du Canada ont obtenu, par un accord conclu le 23 mai 1993 avec le gouvernement fédéral, les pouvoirs souverains sur le Nunavut, nouvel État constitué le 1er avril 1999 sur deux tiers des Territoires du Nord-Ouest, avec pour capitale Iqaluit.

Au début du xxie siècle, les Eskimo (Inuit et Yuit) sont près de 135 000 au total, dont 50 000 au Groenland (88 p. 100 de la population totale), 41 000 au Canada, 43 000 en Alaska et à peine 1 600 en Sibérie. Depuis 1977, une organisation non gouvernementale – I.C.C., ou Inuit Circumpolar Conference – reconnue par les Nations unies en 1983, relie entre eux les Eskimo d'Alaska, du Canada et du Groenland, qui, finalement rejoints par les Eskimo sibériens en 1992, s'efforcent[...]

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Écrit par

  • : directeur de l'U.P.R. 2147 du C.N.R.S. (dynamique de l'évolution humaine : individus, populations, espèces)

Classification

Pour citer cet article

Joëlle ROBERT-LAMBLIN. ESQUIMAUX ou ESKIMO [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Médias

Répartition des Eskimo dans l'Arctique - crédits : Encyclopædia Universalis France

Répartition des Eskimo dans l'Arctique

Inuits - crédits : White Fox/ AGF/ Universal Images Group/ Getty Images

Inuits

-4000 à -2000. Naissance de l'écriture - crédits : Encyclopædia Universalis France

-4000 à -2000. Naissance de l'écriture

Autres références

  • ALASKA

    • Écrit par Claire ALIX, Yvon CSONKA
    • 6 048 mots
    • 10 médias
    ...; les hommes y chassaient le mammouth, le bison, le rhinocéros laineux, le cheval, le renne et autres gros gibiers dont on a retrouvé les squelettes. Les ancêtres des Eskimos et des Aléoutes sont arrivés, eux, vers le milieu de l'Holocène, et leurs cultures particulières, fondées sur la chasse aux mammifères...
  • ARCTIQUE (géopolitique)

    • Écrit par François CARRÉ
    • 6 852 mots
    • 2 médias
    ...territoriales, politiques et économiques. Ils rassemblent moins de 500 000 individus, répartis entre plusieurs dizaines de peuples, parmi lesquels les Inuits, appelés autrefois Esquimaux ou Eskimos, en Amérique du Nord et au Groenland, sont les plus nombreux (150 000). Mais il y a aussi les Sâmes (dénommés...
  • FLAHERTY ROBERT (1884-1951)

    • Écrit par Guy GAUTHIER
    • 1 433 mots
    • 1 média
    ...cette première tentative, qui privilégiait le pittoresque, rencontre un représentant de la maison Révillon Frères, qui souhaitait concurrencer la Hudson's Bay Company dans le commerce des fourrures. Un film sur les esquimaux pouvait devenir un moyen de publicité : ainsi naquit Nanook of the North.
  • GESSAIN ROBERT (1907-1986)

    • Écrit par Joëlle ROBERT-LAMBLIN
    • 1 006 mots

    Professeur au Muséum national d'histoire naturelle, ancien directeur du musée de l'Homme, Robert Gessain était à la fois médecin, ethnologue, psychanalyste et explorateur. Ces multiples appartenances ont contribué à la richesse et à l'originalité toute particulière de sa vie et de son œuvre....

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Voir aussi