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JOUHAUD EDMOND (1905-1995)

Salan et Jouhaud - crédits : Keystone/ Hulton Archive/ Getty Images

Salan et Jouhaud

Nul mieux qu'Edmond Jouhaud n'aura su incarner avec fougue et sincérité la cause de l'«  Algérie française ». Par ses origines, sa bravoure, son tempérament bouillant, son sens de la solidarité, son physique robuste et bien méditerranéen, il est en quelque sorte le « pied-noir » type, dont la carrière, la révolte et les malheurs ne cesseront de nourrir la légende de la communauté à laquelle il appartenait.

Edmond Jouhaud était né le 2 avril 1905 à Bou Sfer, en Oranie, d'un père instituteur. Après des études au lycée d'Oran, puis au lycée Bugeaud d'Alger, il est admis à Saint-Cyr, choisit l'aviation et fait une carrière suffisamment brillante dans l'armée de l'air pour être nommé en 1956 commandant de cette arme pour la Ve région à Alger et adjoint opérationnel du général Salan, alors que la guerre d'Algérie bat son plein.

En mai 1958, lors du soulèvement de la population algéroise contre toute négociation avec le F.L.N., événement qui va porter le général de Gaulle au pouvoir pour la défense de l'« Algérie française », le général Jouhaud, sans se désolidariser le moins du monde du mouvement que conduisent ses collègues Massu et Salan, ne se fait pas remarquer par un activisme particulier ; il est pourtant le seul « pied-noir » parmi les chefs concernés.

Mais il joue un rôle important comme animateur de l'opération Résurrection, qui est censée contribuer, par une série de démonstrations militaires en France, à imposer l'accession de Charles de Gaulle à la tête de l'État. Jusqu'où voulaient aller les promoteurs de cette opération ? De Gaulle était-il tout à fait au courant, et consentant ? Dans ses Mémoires, Jouhaud soutient que oui, et met l'accent sur la coordination entre ses aviateurs d'Alger et certains des collaborateurs du général de Gaulle à Paris.

Le fait est que, installé aux commandes, le nouveau chef de l'État nomme Jouhaud « commandant opérationnel » en Algérie, avant de faire de lui le chef d'état-major de l'armée de l'air, le 19 septembre 1959 : date symbolique, qui est celle de la proclamation de l'« autodétermination » algérienne et de la fin du principe de l'« Algérie française ». Chacun voit bien que cette promotion est pour de Gaulle le moyen d'éloigner l'aviateur de sa terre natale, où son désaccord avec la décision qui vient d'être prise pourrait peser plus lourd qu'à Paris.

Dès lors, Edmond Jouhaud amorce une dérive qui va le conduire à la démission, puis à la présidence du Rassemblement des Français d'Afrique du Nord, lequel mène une violente politique d'opposition à de Gaulle, enfin à la participation au «  putsch des généraux » en avril 1961, en compagnie de Salan, Challe et Zeller. Pendant trois jours, ce « quarteron de généraux en retraite », comme dit le chef de l'État, tient Alger en vue d'y ressusciter l'« Algérie française ». Mais le gros de l'armée ne suit pas, les appelés du contingent se refusant à participer à l'aventure. Les chefs du mouvement sont réduits à passer dans la clandestinité, y fondant bientôt l'Organisation armée secrète ( O.A.S.), dont Jouhaud sera le chef pour l'Oranie sous l'autorité centrale de Salan.

Moins d'un an plus tard, le 25 mars 1962, une semaine après la signature des accords d'Évian, un certain « M. Gerbert, enseignant », est arrêté à Oran : c'est Edmond Jouhaud, qui est aussitôt transféré à Paris pour y être jugé – il ne se fait pas d'illusions sur son sort. Le 13 avril, il comparaît devant le Haut Tribunal militaire, qui le condamne à mort pour rébellion à main armée, non sans que l'accusé eût proclamé que son action tendait à défendre une terre qui était la sienne.

La majorité[...]

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Salan et Jouhaud - crédits : Keystone/ Hulton Archive/ Getty Images

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