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CARACALLA (ÉDIT DE)

On désigne sous ce nom une constitution prise par l'empereur Caracalla (198-217) qui donnait, selon ses propres termes, « à tous les pérégrins (étrangers) qui sont sur terre la citoyenneté romaine ». Seuls les deditices (Barbares soumis par la force) étaient exclus de cette faveur. Cette mesure fut très probablement prise en 212. Son importance théorique et sa valeur symbolique lui ont valu depuis l'Antiquité une grande popularité, et son existence était connue par de nombreuses allusions des auteurs anciens. Le texte même de l'édit a été retrouvé dans un papyrus conservé dans la collection des papyrus de Giessen (no 40) ; si la disposition principale rappelée ci-dessus s'y lit avec certitude, le papyrus laissait malheureusement une lacune sur une réserve que formulait l'empereur. Les dégradations subies par le papyrus pendant la Seconde Guerre mondiale interdisent tout espoir d'une meilleure lecture. De multiples restitutions ont été proposées pour cette lacune. La mesure prise par Caracalla marquait l'aboutissement d'un long mouvement qui, par des concessions plus ou moins généreuses, avait progressivement étendu à des étrangers les droits du citoyen romain. Si cette généralisation a été possible au début du iiie siècle, c'est qu'en fait la civilisation romaine avait, surtout dans les villes, déjà profondément marqué les populations de l'Empire. Les motifs qui ont pu pousser Caracalla à cette mesure restent discutés : lui-même fait valoir dans son édit le désir de « rendre grâce aux dieux » et de faire cesser « chicanes et réclamations » ; Dion Cassius y voit l'avantage fiscal d'augmenter le nombre des assujettis à l'impôt successoral qui grevait les citoyens. L'effet pratique de la généralisation du droit de cité est lui aussi discuté, d'autant plus que c'est à lui que se référait la clause aujourd'hui illisible dans le papyrus de Giessen. L'intérêt majeur fut sans doute de permettre à la quasi-totalité des habitants de l'Empire d'adopter les règles juridiques que le droit romain réservait aux seuls citoyens. Mais il est probable que les nouveaux citoyens gardèrent la faculté de se soumettre à leurs usages traditionnels. Ainsi se serait instauré un régime d'option laissée aux citoyens entre les règles romaines et les coutumes locales.

— Jean GAUDEMET

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Écrit par

  • : professeur à la faculté de droit et des sciences économiques de Paris, directeur d'études à l'École pratique des hautes études

Classification

Pour citer cet article

Jean GAUDEMET. CARACALLA (ÉDIT DE) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • CIVIL DROIT

    • Écrit par Muriel FABRE-MAGNAN
    • 9 077 mots
    ...alors « appelé du nom de chaque cité, par exemple le droit des Athéniens » (Institutes de Justinien, I, 2). Mais progressivement – et spécialement à partir de l'édit de Caracalla de l'an 212 qui fait de la plupart des citoyens de l'Empire des citoyens romains – la distinction a perdu son sens, si...
  • DYNASTIE DES SÉVÈRES : (193-235) - (repères chronologiques)

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    193 Septime Sévère, prétendant au pouvoir, marche sur Rome. Il devient empereur à la mort de Didius Julianus, qui avait lui-même éliminé Pertinax, le successeur de Commode.

    194 Septime sévère bat son rival oriental, Pescennius Niger. Il en fera autant de Clodius Albinus à la bataille de Lyon,...

  • EXTENSION DE LA CITOYENNETÉ ROMAINE - (repères chronologiques)

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    — 451-— 450 Loi des Douze Tables : premier texte écrit de droit romain.

    — 91-— 89 Guerre « sociale » : révolte des Italiens contre les Romains pour obtenir la citoyenneté romaine.

    — 90-— 88 Lois qui accordent progressivement la citoyenneté romaine aux habitants libres...

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    ...l'étranger hors la loi a été très tôt tempérée de multiples manières, notamment par les traités, les institutions du patronage et de l'hospitalité. Mais l'ancien principe, disparu dans l'Empire avec l'octroi général du droit de cité par Caracalla (212), reparut quand des relations s'établirent avec les...

Voir aussi