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15-30 mars 1998

France. Progression de la gauche aux élections régionales et cantonales et division à droite au sujet du Front national

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Le 15, à l'issue des élections régionales, seuls deux conseils régionaux disposent d'une majorité absolue : celui du Limousin, à gauche, et celui des Pays-de-la-Loire, à droite. La gauche obtient la majorité relative dans neuf régions et la droite dans six. Dans quatre régions, gauche et droite sont à égalité. Les socialistes ne contrôlaient qu'un conseil régional sortant (Limousin), tout comme les Verts (Nord-Pas-de-Calais). Avec 36,5 p. 100 des suffrages, la gauche recule de quelque cinq points par rapport à son score des législatives de mai 1997. La droite, avec 35,8 p. 100 des voix, et l'extrême droite, avec 15,3 p. 100, restent stables, mais le Front national (F.N.) progresse en nombre de sièges. L'extrême gauche recueille 4,4 p. 100 des suffrages et obtient des élus pour la première fois. Le taux de participation s'élève à 58 p. 100.

Le 15 également se tient le premier tour des élections cantonales destinées à renouveler la moitié des conseils généraux. La gauche recueille 43,9 p. 100 des suffrages contre 40,2 p. 100 pour la droite, 13,9 p. 100 pour l'extrême droite et 0,4 p. 100 pour l'extrême gauche. Le taux de participation est de 60,4 p. 100.

Le 16, Jean-Marie Le Pen, président du F.N., propose aux candidats de la droite de les soutenir lors de l'élection des présidents de conseils régionaux en échange de l'approbation d'un « programme minimum ». À la demande de Bruno Mégret, délégué général du F.N., la condition de la « préférence nationale » en est exclue. Les directions de l'U.D.F. et du R.P.R. rejettent toute alliance avec le F.N., mais localement, certains élus de droite négocient avec ce dernier.

Le 18, Philippe Séguin, président du R.P.R., prononce l'exclusion de Jean-François Mancel, ancien secrétaire général du mouvement, qui avait déclaré que le F.N. devrait « faire partie de la droite de demain ». Toutefois, sous la pression de leur base, les états-majors de l'opposition acceptent que les têtes de liste régionales maintiennent leur candidature à la présidence de la région – quitte à placer le F.N. en position d'arbitre – afin d'empêcher des élus de second rang de passer un accord avec l'extrême droite pour obtenir des présidences.

Le 19, Lionel Jospin dénonce solennellement, en tant que Premier ministre, « les tentatives d'alliance entre des responsables régionaux de la droite et l'extrême droite ». Le même jour, le président Chirac déclare « qu'il ne faut pas transiger » avec les « convictions républicaines ».

Le 20, cinq élus U.D.F. – Jean-Pierre Soisson (apparenté U.D.F.) en Bourgogne, Bernard Harang (Démocratie libérale, D.L.) dans le Centre, Jacques Blanc (D.L.) en Languedoc-Roussillon, Charles Baur (Force démocrate, F.D.) en Picardie et Charles Millon (D.L.) en Rhône-Alpes – sont élus présidents de région avec les voix du F.N. François Léotard, président de l'U.D.F., décide leur suspension de la confédération libérale. Tandis que François Bayrou, président de Force démocrate, approuve les sanctions, Alain Madelin, président de Démocratie libérale, soutient implicitement les élus incriminés. Élu en Franche-Comté avec les voix du F.N., Jean-François Humbert (U.D.F.-P.P.D.F. [Parti populaire pour la démocratie française]) présente aussitôt sa démission. Par ailleurs, à droite, Adrien Zeller (U.D.F.-F.D.) est élu en Alsace, Valéry Giscard d'Estaing (U.D.F.) en Auvergne, Josselin de Rohan (R.P.R.) en Bretagne, Jean-Claude Étienne (R.P.R.) en Champagne-Ardenne, Gérard Longuet (U.D.F.-D.L.) en Lorraine, René Garrec (U.D.F.-D.L.) en Basse-Normandie, François Fillon (R.P.R.) dans les Pays-de-la-Loire, Jean-Pierre Raffarin (U.D.F.-D.L.) en Poitou-Charentes et Lucette Michaux-Chevry (R.P.R.) en Guadeloupe. À gauche, Alain Rousset (P.S.) est élu en Aquitaine, Robert Savy (P.S.) en Limousin, Michel Delebarre (P.S.) dans le Nord-Pas-de-Calais et Antoine Karam du Parti socialiste guyanais en Guyane. Alfred Marie-Jeanne, du Mouvement indépendantiste martiniquais, est élu président du conseil régional de Martinique.

Le 22, le second tour des cantonales confirme les progrès de la gauche et principalement du Parti socialiste qui compte 647 élus contre 312 sortants. Il possède désormais 1 140 sièges de conseillers généraux sur 3 857 en métropole. Le Parti communiste en gagne 36. L'U.D.F. en perd 213, le R.P.R., 181, et les divers droite, 17.

Le 23, les socialistes Jean-Paul Huchon et Michel Vauzelle sont élus respectivement président des conseils régionaux d'Île-de-France et de Provence-Alpes-Côte d'Azur, la droite ayant rejeté les voix du F.N. Élus à l'aide de celles-ci, Jean-Paul Gauzès (R.P.R.), en Haute-Normandie, et Marc Censi (U.D.F.-D.L.), en Midi-Pyrénées, présentent leur démission.

Le 23 également, lors d'une allocution télévisée, le président Chirac sort de « la réserve qu'exige [sa] fonction » pour dénoncer la « nature raciste et xénophobe » du F.N. Il annonce sa volonté de « conduire une grande réflexion » avec les « formations politiques républicaines » en vue de « moderniser [la] vie politique ».

Le 24, Alain Madelin refuse de s'associer au communiqué soutenu par les autres composantes de l'U.D.F., qui exige la démission des cinq présidents de conseils régionaux élus avec les voix du F.N. sous peine d'exclusion. Démocratie libérale se ravisera le lendemain.

Le 24 également, Jean-Pierre Soisson annonce sa démission de la présidence du conseil régional de Bourgogne.

Le 25, François Bayrou annonce la création prochaine d'un nouveau parti politique « du centre et du centre droit ». proposition dénoncée par François Léotard et Alain Madelin.

Le 26, José Rossi (U.D.F.-D.L.) est élu président de l'assemblée de Corse. Jean Baggioni (R.P.R.) reste président du conseil exécutif.

Les 27 et 30, l'élection des présidents de conseils généraux confirme le basculement à gauche de treize départements, dont dix reviennent au Parti socialiste, un au Parti communiste et deux au Parti radical de gauche. La gauche contrôlait jusqu'alors vingt départements. La droite ne conquiert que la présidence du conseil général de la Réunion.

Le 27 également, Bernard Harang démissionne de la présidence du conseil régional du Centre.

Le 28, à l'appel du Comité national de vigilance contre l'extrême droite, plusieurs dizaines de milliers de personnes manifestent à travers la France contre le F.N. et les présidents de conseils régionaux élus grâce aux voix de ce dernier.

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