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TSCHOMBÉ ou TSHOMBE MOÏSE (1919-1969)

Fixée dans le Katanga occidental, la famille de Moïse Tschombé, d'ethnie lunda, possède une entreprise commerciale prospère. Après avoir fait des études de droit par correspondance, Tschombé pratique le négoce à Elizabethville puis à Sandoa. Sa carrière politique commence en 1951 lorsqu'il devient conseiller provincial du Katanga à la place de son père ; en 1957, il affirme son succès politique en fondant la Confédération des associations du Katanga (Conakat) qui groupe essentiellement des lundas et qui devient un des partis politiques les mieux organisés du Congo. L'objectif principal de Tschombé est de repousser dans leurs territoires les Baluka du Kassaï embauchés en grand nombre par l'Union minière ; il est soutenu par les Blancs du Katanga qui, eux, souhaitent un Congo confédéré dans la crainte d'un pouvoir centralisateur exercé par les radicaux du Congo septentrional. Par ailleurs, Tschombé a su se faire apprécier des cercles européens et notamment des dirigeants de l'Union minière par son attitude amicale à leur égard. Mais à la conférence de la table ronde tenue à Bruxelles au début de 1960, c'est le point de vue centralisateur qui l'emporte. Les élections provinciales de mai permettent au Conakat de l'emporter sur le Parti baluba, mais au niveau fédéral les promesses ne sont pas tenues : les portefeuilles de l'Intérieur et de la Défense nationale se trouvent attribués au Mouvement national congolais (M.N.C.), le parti de Lumumba. La force publique (armée) s'étant mutinée, le 5 juillet la violence s'installe à Léopoldville et elle atteint le Katanga le 9 ; les parachutistes belges aident à restaurer l'ordre et Tschombé en profite pour proclamer l'indépendance du Katanga, le 11 juillet. Mais son autorité n'est pas reconnue par l'O.N.U., dont les troupes envoyées au Katanga ne l'aident en rien à lutter contre les Baluba dissidents.

Moïse Tschombé, 1960 - crédits : Central Press/ Hulton Archive/ Getty Images

Moïse Tschombé, 1960

Arrestation de Patrice Lumumba, 1960 - crédits : Bettmann/ Getty Images

Arrestation de Patrice Lumumba, 1960

Après l'assassinat de Lumumba qui lui est imputé, il suscite la réunion de quatorze leaders congolais en mars 1961 à Tananarive, pour former un front commun contre l'intervention de l'O.N.U. et réaliser une confédération souple. Mais à la conférence de Coquilhatville en avril, la conception de Tschombé est battue en brèche. Le gouvernement Adoula-Gizenga et les forces de l'O.N.U. décident de mettre fin à la sécession katangaise. Après diverses péripéties, Tschombé doit finalement s'incliner et, en janvier 1963, il proclame la fin de l'État katangais. Il part en semi-exil en France puis en Espagne. Mais face à la détérioration rapide de la situation, sur le plan politique et économique, le Premier ministre Adoula et Mobutu lui demandent de revenir au milieu de 1964 et de tenter une réconciliation nationale. Tschombé lève alors une armée de mercenaires encadrée par des Européens en vue de reprendre, autour de Stanleyville, les zones tenues par les troupes mulélistes. Cette démarche est controversée sur le plan africain et si la conférence de l'O.U.A. l'accueille à Addis-Abeba en septembre 1964, Nasser lui interdit d'apparaître à celle des non-alignés en octobre. En Occident, il cherche appui auprès du pape, de De Gaulle, et obtient des concessions économiques et financières de la part de Bruxelles.

Aux élections d'avril 1965, le nouveau parti de Tschombé, la Convention nationale congolaise, remporte la victoire, mais le président Kasavubu, prenant ombrage de son pouvoir, le démet de ses fonctions le 13 octobre ; l'avènement de Mobutu, le 25 novembre, ferme définitivement à Tschombé toute perspective de retour. À nouveau en exil à Madrid, il apprend, en mars 1967, sa condamnation à mort par Mobutu sous l'accusation de complot. Enlevé en juin par un détournement d'avion, il est détenu en Algérie où il meurt d'une crise cardiaque sans avoir été extradé comme le souhaitait Mobutu.[...]

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Écrit par

  • : chef du Centre d'études et de documentation sur l'U.R.S.S., la Chine et l'Europe de l'Est

Classification

Pour citer cet article

Françoise BARRY. TSCHOMBÉ ou TSHOMBE MOÏSE (1919-1969) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Médias

Moïse Tschombé, 1960 - crédits : Central Press/ Hulton Archive/ Getty Images

Moïse Tschombé, 1960

Arrestation de Patrice Lumumba, 1960 - crédits : Bettmann/ Getty Images

Arrestation de Patrice Lumumba, 1960

Autres références

  • CONGO RÉPUBLIQUE DÉMOCRATIQUE DU

    • Écrit par Universalis, Jules GÉRARD-LIBOIS, Henri NICOLAÏ, Patrick QUANTIN, Benoît VERHAEGEN, Crawford YOUNG
    • 24 917 mots
    • 13 médias
    ...au Kasaï, à Matadi, puis à Léopoldville – déclencha une catastrophique escalade des événements : proclamation d'un État sécessionniste au Katanga par Moïse Tshombe, qui mit l'occasion à profit pour rompre avec Léopoldville ; rupture des relations entre la Belgique et les autorités centrales congolaises...
  • DENARD BOB (1929-2007)

    • Écrit par Olivier HUBAC
    • 926 mots

    Robert Denard, dit colonel Bob Denard ou encore Saïd Mustapha Mahdjoub, fut, avec le Belge Jean Schramme, l'un des « affreux » les plus connus de l'histoire de l'Afrique postcoloniale. Tour à tour militaire, mercenaire et entrepreneur, Bob Denard fait figure de légende auprès du grand public comme des...

  • LUMUMBA PATRICE (1925-1961)

    • Écrit par Françoise BARRY
    • 653 mots
    • 3 médias

    Issu d'une famille catholique pratiquante appartenant à une ethnie minoritaire, les Batetela, Lumumba entreprend des études d'infirmier puis s'engage comme commissaire aux écritures avant de reprendre ses études à l'école des P.T.T. de Léopoldville. Devenu comptable aux chèques postaux à Stanleyville,...

  • MOBUTU JOSEPH DÉSIRÉ puis SESE SEKO (1930-1997)

    • Écrit par Patrick QUANTIN
    • 1 056 mots
    • 1 média

    Joseph Désiré Mobutu est né le 14 octobre 1930 au Congo belge à Lisala, un village sur la courbe du fleuve Congo. En 1972, alors qu'il mène une campagne d'« africanisation », il abandonne ses prénoms pour se faire appeler Mobutu Sese Seko Kuku Ngbendu Wa Za Banga. L'évanouissement de son pouvoir n'a...

Voir aussi