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STIGMERGIE

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L'œuvre, stimulus significatif

Au total, les parties de l'édifice successivement construites exercent directement sur l'individu une stimulation spécifique grâce à laquelle le nid non seulement s'édifie, mais affecte une forme à peu près constante et caractéristique de chaque espèce. À cette stimulation par l'œuvre accomplie et concrète on a donné le nom de stigmergie (du grec stigma, piqûre, et ergon, travail ; P.-P. Grassé, 1959).

La réalisation de l'œuvre collective tient non pas à une coordination active des tâches individuelles, mais aux réponses adéquates à des stimuli significatifs qui sont les parties de l'édifice construites d'une manière totalement indépendante les unes des autres par les individus animés de la « pulsion constructive » (tous ne le sont pas).

La notion de stigmergie s'applique aux constructions des Abeilles, des Guêpes et autres Insectes sociaux. Elle montre que l'automatisme ne s'oppose pas à la régulation et à l'adaptation du comportement aux circonstances.

En vérité, le comportement animal ne répond pas à un schéma unique. La théorie objectiviste explique assez bien les conduites qui précèdent l'acte sexuel (encore que le choix des stimuli efficients retenus par l'observateur soit bien souvent arbitraire), mais il ne faut pas lui demander davantage.

La stigmergie explique bien les comportements constructeurs des Insectes sociaux et, semble-t-il, sous bénéfice d'un contrôle expérimental, les comportements nidificateurs d'animaux solitaires, en particulier les Guêpes prédatrices qui paralysent des proies, enfermées dans un terrier, et sur lesquelles elles déposent un œuf. La stigmergie, jusqu'ici, ne paraît convenir qu'aux comportements créateurs d'objets concrets. Elle délivre la psychologie animale des notions de discernement, de plan, etc.

Le système régulateur qu'elle a révélé tient beaucoup moins à des causes actuelles qu'à l'acquisition génétique de réactions exactement adaptées à des stimuli hautement significatifs. Le problème de la genèse d'un tel système, de ses tenants et aboutissants relève du mécanisme même de l'évolution, mécanisme à l'égard duquel règne une très grande incertitude.

— Pierre-Paul GRASSÉ

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Écrit par

  • : membre de l'Institut, professeur de zoo-logie à la faculté des sciences de Paris.

Classification

Pour citer cet article

Pierre-Paul GRASSÉ. STIGMERGIE [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Article mis en ligne le et modifié le 14/03/2009

Autres références

  • CONSTRUCTIONS ANIMALES

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    • 7 164 mots
    • 7 médias
    ...Grassé est arrivé à des conclusions très voisines des nôtres concernant les fourmis. C'est à propos des termites qu'il a émis sa célèbre théorie de la stigmergie (de deux mots grecs qui signifient que l'œuvre excite l'ouvrier). Grassé remarqua en effet que, lorsque les termites sont déposés dans un vase...
  • SOCIÉTÉS ANIMALES

    • Écrit par
    • 5 423 mots
    • 3 médias
    ...entraîne le dépôt, au même endroit, d'autres boulettes par d'autres individus, un mécanisme que Pierre-Paul Grassé avait identifié dès 1959 sous le terme « stigmergie ». Après une période de dépôts au hasard, des zones d'accumulation apparaissent, des piliers s'élèvent et se rejoignent pour former des arches...