Abonnez-vous à Universalis pour 1 euro

RUELLE, histoire littéraire

Le xvie siècle a connu des salons curieux de littérature, comme celui des dames des Roches. Mais avant le xviiie siècle, le salon comme pièce de réception n'existe que dans les palais. Au xviie, c'est dans la « ruelle » (en fait, dans la chambre à coucher) que reçoit la maîtresse de maison allongée sur son lit, ou sur un lit de repos si elle dispose, comme Mme de Rambouillet, d'une chambre d'apparat, bleue ou non. Les alcovistes peuvent fréquenter aussi, dès les années 1620, des cercles plus pédantesques (Mme d'Auchy, Mme des Loges). Mais c'est à la suite et à l'imitation de l'hôtel de Rambouillet que se développent les principaux salons du siècle, ceux de Mme de Sablé, de la Grande Mademoiselle, de Mmes de La Fayette, du Plessis-Guénégaud, du Plessis-Bellière, Fouquet, de La Suze, chacun gardant son caractère propre en matière de goût et d'occupations intellectuelles (maximes, portraits, poésie plus ou moins précieuse), et parfois ses tendances politiques ou religieuses. D'autres sont plus bourgeois. Presque tous sont touchés par la préciosité : le « calendrier des ruelles », qui indique les jours de réception, forme un répertoire des précieuses. Mais rares sont en définitive ceux qui tombent, à Paris, dans le ridicule, même celui de Mlle de Scudéry, où s'élabore après la Fronde la Carte de Tendre. Certaines ruelles sont de vrais foyers de liberté de mœurs et de pensée, telles, à Paris, celle de Ninon de Lenclos, et, à Londres, celle d'Hortense Mancini, amie de Saint-Évremond. En dépit du cérémonial frivole et des vers doucereux, les ruelles du xviie siècle ont signifié et favorisé l'émancipation de la femme ; elles ont aussi contribué à polir les mœurs, à affiner la langue, à enrichir la production littéraire, et ont préparé un cadre pour l'esprit de discussion critique des grands salons du xviiie siècle.

— Jean MARMIER

La suite de cet article est accessible aux abonnés

  • Des contenus variés, complets et fiables
  • Accessible sur tous les écrans
  • Pas de publicité

Découvrez nos offres

Déjà abonné ? Se connecter

Écrit par

  • : docteur ès lettres, professeur à l'université de Rennes-II-Haute-Bretagne

Classification

Pour citer cet article

Jean MARMIER. RUELLE, histoire littéraire [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • PRÉCIOSITÉ

    • Écrit par Roger LATHUILLÈRE
    • 2 968 mots
    ...la première place ; selon Somaize, il est le héros des précieuses ; on admire ses petits vers dans les salons et il a collaboré au Recueil de Sercy ; les ruelles ne font pas de distinction entre l'idéal qu'il leur propose dans son théâtre et celui que décrit longuement Mlle de Scudéry dans...

Voir aussi