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ROMANOS LE MÉLODE (VIe s.)

L'Église orthodoxe grecque a admis au rang de ses saints celui qu'elle considère comme son plus grand hymnographe, tant en raison de la valeur poétique que du contenu religieux de son œuvre. Ce poète du vie siècle était originaire de la ville syrienne d'Émèse (l'actuelle Homs) et vraisemblablement d'ascendance juive. Il séjourna à Beyrouth, où il fut diacre, avant de s'établir à Constantinople où, selon la tradition, la Vierge lui apparut en songe et lui ordonna d'avaler un livre. S'étant réveillé, il improvisa un hymne, ce qui aurait marqué le début de sa carrière poétique.

Romanos n'a pas inventé le genre du kontakion (ou homélie en vers), attesté dès le ve siècle et influencé par des modèles syriaques. Mais il l'introduisit à Constantinople et le porta à un rare degré de perfection. Le kontakion se compose d'un nombre variable de strophes — entre onze et quarante chez Romanos — et obéit à de strictes contraintes formelles. Il devait comprendre un petit prélude, l'acrostiche du nom de l'auteur courant sur l'ensemble des strophes et, dans certains cas, une prière finale. Les Byzantins attribuaient à Romanos mille compositions. Plus de quatre-vingts textes comprenant en acrostiche le nom de Romanos nous sont parvenus. L'éditeur de Romanos, José Grosdidier de Matons, en a retenu comme authentiques une soixantaine.

Cet ensemble se divise en deux catégories : des textes narratifs consacrés aux événements marquants de l'histoire sainte et des poésies hagiographiques. Les uns et les autres sont des pièces destinées à être chantées, même si le texte a plus d'importance que la musique. L'abondance des répétitions et le caractère orné de ces poésies ne doivent pas dissimuler une maîtrise toute hellénique de la composition. Romanos demeurait influencé par la littérature classique, contre laquelle il lança de vigoureuses attaques, car elle était pour lui synonyme de paganisme. Sa source d'inspiration la plus constante est la Bible, où il puise de nombreuses citations. Il faut observer que Romanos interprète toujours l'Ancien Testament à la lumière du Nouveau Testament.

La doctrine religieuse de Romanos est conforme à l'enseignement de l'Église de son temps. Mais l'intérêt de son œuvre est autre. Il réside dans la faculté qu'avait Romanos de prendre un thème sacré et d'écrire une poésie fervente et emplie d'images que lui fournissait une abondante inspiration. Romanos introduit dans ses poèmes un élément dramatique, voire épique. Son intérêt pour les thèmes eschatologiques, en faveur dans son Orient natal, est révélé par son hymne du Jugement dernier. Il fait montre à l'égard du genre humain, qu'il considère comme pécheur, d'une compassion qui éclaire ses plus belles compositions, où l'on retrouve l'influence des sermons de Jean Chrysostome et de son cercle, qui mettent l'accent sur le sentiment d'une souffrance commune. C'est la réunion de ces qualités, auxquelles il faut ajouter la sûreté et la clarté de sa langue, qui a valu à Romanos le surnom de Prince des mélodes et un intérêt rarement démenti pour son œuvre.

— Pascal CULERRIER

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Écrit par

  • : ancien élève de l'École normale supérieure de Saint-Cloud, agrégé d'histoire, docteur en histoire byzantine de l'université de Paris-I, chargé de cours à l'université de Paris-VIII (histoire byzantine)

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Pour citer cet article

Pascal CULERRIER. ROMANOS LE MÉLODE (VIe s.) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

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