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SCHUTZ ROGER dit FRÈRE ROGER (1915-2005)

Roger Schutz-Marsauche, fondateur de la communauté œcuménique de Taizé, de son nom de religion Frère Roger, a vu le jour le 12 mai 1915, en Suisse, près de Neuchâtel. Fils du pasteur Charles Schutz et d'Amélie Marsauche, française d'origine bourguignonne – protestante elle aussi –, le jeune Roger est le petit dernier d'une fratrie de sept frères et sœurs. Éduqué dans un protestantisme rigoureux mais respectueux des « papistes », il dévore, jeune encore, les Pensées de Pascal et fréquente même les églises paroissiales en cachette, aimant s'y recueillir et prier. Cette attirance « œcuménique » se développera auprès de Mme Biolley, une catholique chez qui ses parents lui permettent de loger pour faire ses études en ville. À Lausanne, il préparera sa thèse de théologie sur « L'Idéal de la vie monastique jusqu'à saint Benoît et sa conformité à l'Évangile ». Prière, réflexion, ouverture : les trois options qui, additionnées, constitueront la ligne de vie de Frère Roger et celle de sa communauté de Taizé, sont déjà présentes chez le jeune pasteur protestant qu'il devient.

Le 20 août 1940 commence pour Roger Schutz une aventure qui ne s'achèvera que le 16 août 2005, quand il sera tué à coups de couteau par une malade mentale au cours de la prière du soir. Il a vingt-cinq ans en effet quand il débarque pour la première fois à Taizé, petit village de Saône-et-Loire, proche de la ligne de démarcation. Sa maison devient vite un refuge où il accueille sans distinction juifs, exilés politiques, résistants. Dénoncé à la Gestapo, il doit partir mais revient en 1944 avec ses trois premiers compagnons de route, protestants eux aussi. La communauté monastique de Taizé est née, fondée sur la liturgie, le travail et le silence, avec comme devise « la passion de l'unité de l'Église » et comme choix les vœux de pauvreté, d'obéissance et de chasteté. Elle deviendra vite œcuménique, avec l'arrivée, en 1960, d'un frère anglican et, en 1969, du premier prêtre catholique.

Dès l'origine, Frère Roger inscrit son projet comme un pont entre les confessions chrétiennes. Il y sera puissamment aidé par le futur Jean XXIII, alors représentant du pape à Paris, qui l'autorisera à chanter les offices quotidiens dans l'église paroissiale de Taizé. Les deux hommes se lieront d'une amitié forte, à tel point que le protestant Roger Schutz sera l'un des observateurs attentifs du deuxième concile du Vatican, de 1962 à 1965. Il continuera d'entretenir les meilleures relations avec Paul VI puis Jean Paul II, qu'il accueillera à Taizé le 5 octobre 1986, et qui aura cette formule éloquente : « On passe à Taizé comme on passe près d'une source. »

Roger Schutz et ses frères, en effet, attirent sur la colline bourguignonne de plus en plus de jeunes désireux de dépasser les barrières idéologiques et confessionnelles et de prier autrement. À tel point que, le 30 août 1974, saisi d'une nouvelle intuition, le prieur de Taizé ouvre le concile des Jeunes. Ils sont cinquante mille. À partir de 1978, entre Noël et le Jour de l'an, des rencontres internationales attireront garçons et filles de toutes confessions et de toutes nations à Rome, Cologne, Prague, Paris, Madras, Milan... « L'une des urgences des années à venir est de mettre la réconciliation là où il y a la blessure de la haine », écrira Frère Roger qui ne cessera pour ce faire de miser sur les jeunes, à travers les Lettres qu'il leur adressera et à travers ses ouvrages ; 'l'un des premiers d'entre eux, Dynamique du provisoire (1965), résume sans doute le mieux sa démarche spirituelle.

Si l'aventure personnelle de Roger Schutz est désormais achevée, celle de Taizé continue, manifestant combien l'homme était incontestablement de la[...]

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Écrit par

  • : journaliste-écrivain, président du Centre national de la presse catholique

Classification

Pour citer cet article

Jean-Claude PETIT. SCHUTZ ROGER dit FRÈRE ROGER (1915-2005) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • TAIZÉ COMMUNAUTÉ DE

    • Écrit par André ENCREVÉ
    • 719 mots

    La seule communauté cénobitique d'hommes qui se soit développée au sein des Églises issues de la Réforme et, depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, important centre de rencontres œcuméniques. Le fondateur et prieur de Taizé est le pasteur Roger Schutz. En 1939, alors qu'il poursuivait...