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DOISNEAU ROBERT (1912-1994)

« Paris-sur-Banlieue »

En 1945, Doisneau réalise un portrait de Blaise Cendrars pour le lancement de L'Homme foudroyé. Une amitié se noue et, en 1949, Doisneau publie La Banlieue de Parisavec un texte de l'écrivain. Fruit de prises de vues antérieures à leur rencontre et d'une étroite collaboration, ce compagnonnage confère au photographe un nouveau statut. D'artisan, il accède à la condition d'artiste et rejoint le Groupe des Quinze, une « amicale d'artistes photographes ». Il participe aux expositions du groupe et découvre le Paris d'Atget, qui devient une référence pour lui.

Doisneau ne se cantonne pas à l'univers familier de son enfance, celui des petits pavillons, des retraités dans leur jardin et des bals de quartiers. Il sillonne la rive gauche et ses cafés peuplés d'écrivains, de peintres, de chanteurs et d'une faune à la gloire éphémère. Ses reportages en compagnie du journaliste Robert Miquel (Romi) forgent « l'image narrative », dont la multiplication inscrit les réactions des différents protagonistes face à une même situation. Avec le journaliste Robert Giraud, il découvre les bas-fonds de la ville et les milliers de clochards qui hantent les quartiers Maubert, Mouffetard et celui des Halles. Ses images de marginaux s'opposent à l'univers mondain des mannequins de Vogue, avec qui il est en contrat (1949-1953).

Les Parisiens tels qu'ils sont (1954), Instantanés de Paris (1955), Pour que Paris soit (1956), Gosses de Paris (1956), Le Paris de Robert Doisneau et Max Pol Fouchet (1974), Le Vin des rues (1983)... Doisneau, à l'instar des photographes ambulants, arpente le pavé parisien et celui des grandes villes françaises. Il se hasarde à Londres avec Raymond Grosset (1947), et même en U.R.S.S. pour La Vie ouvrière (1967). Mais c'est Le Baiser de l'Hôtel de Ville, publié dans Life en 1950, qui est devenu une icône mondiale. La photographie est un hymne au Paris de la jeunesse et de la liberté.

Les amitiés de Doisneau sont éclectiques. Toutes ont joué leur rôle dans la saga du seigneur de l'objectif : son concierge et figurant d'occasion Paul Barabé, Maurice Baquet, le violoncelliste complice de ses « jeux photographiques », Albert Plécy, le directeur de Point de vue-Images du monde, Jacques Prévert, le défricheur de l'ordinaire avec qui, pendant près de quarante ans, il traque la magie de la ville à l'affût « du spectacle gratuit et permanent », Sabine Azéma, le modèle des dernières années (1984-1994). Les peintres Raymond Savigac, Gaston Chaissac, les écrivains Mac Orlan, Elsa Triolet, François Cavanna ponctuent de leurs rencontres et de leurs correspondances des projets et des livres en commun. Ils sont source d'instants d'émotion grave, de clins d'œil tendre, de pieds de nez à l'ennui, de récréations ravies à la grisaille d'un travail où les commandes imposent leurs exigences et leur quota de soumission, si étranger à Doisneau.

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Écrit par

  • : professeur des Universités en histoire de la photographie à l'École Louis-Lumière

Classification

Pour citer cet article

Françoise DENOYELLE. DOISNEAU ROBERT (1912-1994) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • PHOTOGRAPHIE (art) - Un art multiple

    • Écrit par Hervé LE GOFF, Jean-Claude LEMAGNY
    • 10 750 mots
    • 21 médias
    ...est toujours vivant. Pensons à la tradition parisienne des Brassaï et des Izis (Paris des rêves, 1950). Même face aux idées les plus avancées, un Robert Doisneau garde sa présence, car sa bonté et son humour restent ouverts sur l'ambiguïté de la condition humaine. Au Royaume-Uni, Bert Hardy partage...

Voir aussi