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TATA RATAN (1937- )

Ratan Tata - crédits : Pal Pillai/ AFP

Ratan Tata

En mars 2009, l'industriel Tata lance la commercialisation de la Nano, la voiture la moins chère du monde, vendue symboliquement 100 000 roupies (quelque 1 740 euros). Loin des 4 CV Renault, 2 CV Citroën, Fiat 600 ou Volkswagen Coccinelle, conçues pour motoriser l'Europe de l'après-guerre, la Nano est un nouveau regard sur un « minimum automobile » maintes fois réinventé. D'un très faible gabarit (3,1 m de longueur, 1,5 m de largeur et 1,6 m de hauteur), équipée d'un petit moteur bicylindre en ligne de 623 cm3, elle peut transporter quatre adultes à quelque 80 km/h, dans un confort spartiate qui fait que cette voiture, par les équipements qu'elle ne possède pas, est bon marché. Avec seulement 7 millions de véhicules pour 1,1 milliard d'individus, le marché indien est à construire, au moment où ceux des États-Unis ou de l'Allemagne ont des taux d'équipement d'une voiture pour deux habitants. Le 10 janvier 2008, lors de la présentation officielle du modèle à l'Auto Expo de New Delhi, Ratan Tata révèle une automobile en rupture dans laquelle Tata dépasse l'idée traditionnelle de la voiture populaire en rejetant le remake européen, vestige d'un colonialisme industriel qui a fait de la Padmini – une Fiat 1100 de 1953 – « la » voiture indienne jusqu'en 2000. Mais il s'écarte aussi du modèle low cost incarné par la Dacia Logan (conçue par Renault). Cette dernière n'est pas, selon lui, suffisamment adaptée aux spécificités de l'Inde : la voiture franco-roumaine reflète en effet à la fois la vision minimaliste d'une automobile marquée par des concepts de pays riches, la volonté de satisfaire une classe moyenne encore peu nombreuse en Inde, enfin le désir de répondre à des contraintes sécuritaires et environnementales que la législation n'impose pas dans tous les pays... notamment en Inde.

Ratan Tata est un industriel expérimenté. Né en 1937 à Bombay (Mumbai depuis 1995), titulaire d'une maîtrise d'architecture de l'université Cornell qu'il complète par un master de Business Administration à Harvard, il incarne la quatrième génération d'une dynastie qui a construit pas à pas ce qui est devenu Tata Group. D'origine parsi et installé à Bombay, Jamshedji Nasarwanji Tata (1839-1904) est un filateur qui fait fortune en 1868 en mécanisant ses métiers à tisser. Son fils, Dorabji (1859-1933), et son cousin, Ratanji Dadabhoy Tata (1856-1926), poursuivent l'œuvre familiale qu'ils diversifient dans l'acier : un succès majeur capable de transformer la ville de Jamshedpur en Tatanagar (ou Tataville), une véritable Ruhr indienne. C'est toutefois le fils de Ratanji, Jehangir Ratanji Dadabhai Tata (1904-1993), surnommé JRD, qui décuple la croissance de ce groupe et pousse très loin la diversification en embrassant durant son long règne de président du groupe (1938-1991) les secteurs emblématiques de la modernité, tels que l'aéronautique, l'électronique ou l'informatique. JRD devient le créateur du conglomérat Tata qui, aujourd'hui rassemble près de 100 entreprises réparties dans des activités multiples. On roule, on mange, on s'habille et on consomme Tata. Avec près de 250 000 personnes, Tata Group réalise près de 3 p. 100 du produit intérieur brut de l'Inde.

Succédant à son oncle en 1991, Ratan Tata oscille entre le changement et la continuité. C'est lui qui restructure le conglomérat familial autour de sept divisions, toutes mises en ordre de bataille pour la mondialisation. Mais c'est aussi lui qui tente de préserver les valeurs fondatrices de l'entreprise, notamment un paternalisme social qui depuis 140 ans a fixé la main-d'œuvre (salaires, terres, coopératives, logements) sans compter un incessant dialogue avec les nombreux actionnaires de la holding dont[...]

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Écrit par

  • : professeur des Universités, directeur du département d'histoire à l'université d'Évry

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Pour citer cet article

Jean-Louis LOUBET. TATA RATAN (1937- ) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

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