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GELUCK PHILIPPE (1954- )

Personnalité remarquable de l’humour francophone, Philippe Geluck, né à Bruxelles le 7 mai 1954, offre avec ses histoires en trois vignettes dont le « héros » est un chat, la contre-offensive la plus efficace à la « blague belge ». Le personnage est apparu le 22 mars 1983 en réponse à la demande d’un strip quotidien pour le journal belge Le Soir. Leur compilation, depuis 1986, atteste leur célébrité avec plus de vingt albums parus chez Casterman.

Imperturbable et sentencieux…

Philippe Geluck - crédits : Emanuele Scorcelletti/ Photo12

Philippe Geluck

Le Chat, image centrale du strip, propose une figure anthropomorphe, stylisée, au physique ingrat et stéréotypé. Différents comparses l’accompagnent dont au premier chef les souris, lesquelles finissent sans surprise dans l’estomac de leur prédateur. Roger, le bistrotier, n’apparaît que par la bulle de sa voix, donnant au muscadet un rôle non négligeable. Le Chat a aussi une famille, il croise des chiens, des personnages secondaires qui servent des reparties comiques à son profit. L’insoutenable lourdeur du personnage au gros nez – bien servi par une mise en couleurs due à Serge Dehaes – est ponctuée d’une envolée de formules graphiques et verbales où les différents sens tordent la logique et bouleversent toutes les attentes. Rien d’étonnant au pays de René Magritte, du surréalisme belge et des grammairiens d’excellence où les magiciens du langage jonglent avec l’humour.

La vie de Philippe Geluck débute une trentaine d’années avant le succès du Chat. Son père, dessinateur de presse sous le pseudonyme de Diluc, est un militant communiste devenu distributeur de films des pays de l’Est, puis du cinéma d’art et d’essai à partir des années 1960. Ses parents se sont rencontrés dans une troupe de théâtre amateur. À leur contact, le jeune garçon découvre évidemment les bandes dessinées et la ligne claire d’Hergé, mais surtout des humoristes comme Saul Steinberg, Chaval, Tomi Ungerer, Siné, Reiser, Sempé, ainsi que la revue Bizarre ou le magazine Hara-Kiri. Ces années de la seconde moitié du xxe siècle sont marquées par une inventivité où le calembour à la fois verbal et visuel arrache de nouveaux sens au « déjà-là » du langage attendu. Outre l’insolite de cette inspiration, l’insolence se fait aussi sociopolitique. L’amitié avec Siné date de cette époque. Sa participation à Siné Hebdo et Siné Mensuel est caractéristique d’une autre veine souvent salace et sans recours au Chat, des dessins repris dans divers volumes comme Geluck se lâche (2009) ou Geluck pète les plombs (2018).

Le style graphique et le ton de Geluck à ses débuts ne présagent toutefois pas de la suite. Ses premiers motifs marqués par l’étrangeté évoquent le trait de Folon. Un petit recueil rassemble Les Métiers oubliés (1974) où se côtoient un chercheur de petites bêtes, un diseur du soir ou encore un amuseur de gueules. Une inspiration qui se retrouvera dans l’esprit et le graphisme beaucoup plus loufoque du Chat dans les années 1990.

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Pour citer cet article

Nelly FEUERHAHN. GELUCK PHILIPPE (1954- ) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Média

Philippe Geluck - crédits : Emanuele Scorcelletti/ Photo12

Philippe Geluck

Autres références

  • BANDE DESSINÉE

    • Écrit par Dominique PETITFAUX
    • 22 913 mots
    • 15 médias
    ...Christian Binet caricature avec Les Bidochon (1977) la France (très) profonde, et Frank Margerin campe avec Lucien (1979) un loubard au cœur tendre. Le Belge Philippe Geluck distille à partir de 1983 les pensées du Chat. L’humour devient franchement intellectuel – voire métaphysique – dans les albums...

Voir aussi