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GELUCK PHILIPPE (1954- )

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… le Chat aime les coq-à-l’âne

L’intérêt de Geluck pour l’expression vivante s’affirme très tôt avec ses débuts au théâtre. Dès 1973, il suit à Bruxelles les cours de l’Institut national supérieur des arts du spectacle et enchaîne divers spectacles dont Un certain Plume d’Henri Michaux, en 1985. De cet écrivain, il retient certainement la volonté de réduire le langage à l’absurde, ce qu’il réalise et popularise avec le Chat. Il participe activement à nombre de jeux télévisés en Belgique, où sa réputation d’animateur est reconnue, et publie quelques années plus tard ses inventions farfelues imaginées pour Le Jeu du dictionnaire à la RTBF de 1988 à 1998. Par la suite, il est invité par des médias français et collabore à de nombreuses émissions de radio et de télévision, dont celles de Michel Drucker et Laurent Ruquier.

Une autre étape s’engage avec des expositions du Chat en Belgique et en France, en particulier au musée des Beaux-arts de Paris avec Le Chat s’expose (2003), puis L’Art et le Chat au Musée en herbe (2016-2017), tandis qu’un projet – différé en raison de la crise sanitaire liée à la Covid-19 – envisage de présenter des statues monumentales du félin sur les Champs-Élysées à la manière de Botero. Plasticien autant que dessinateur et peintre, Geluck est fasciné par le surdimensionnement des objets et la déformation ironique, voire triviale de l’art consacré, à travers des pastiches ou des collages d’images anciennes détournées. « Avec le Chat, j’ai souvent l’impression de faire de l’autodérision par procuration », explique Geluck. Par la fausse innocence de son antihéros, crétin gonflé de certitudes, Geluck dénonce la suffisance, l’inanité des idées reçues, pour en extraire une vérité paradoxale renversante. Loin d’adopter une attitude de victime, le Chat incarne un narcissisme exacerbé : « Avec mon sourire mystérieux/ on m’a souvent comparé à Mona Lisa/ Je suis en quelque sorte le Jocond. » Chaque stripdu Chat illustre l’extrême virtuosité des jeux de mots formant le vaste répertoire de Geluck, qui s’étend jusqu’à l’humour noir : « Si je devais me suicider un jour…/ je me pendrais à un noyer/ Ce serait mon dernier jeu de mots. »

Le Chat oscille entre ruse et déconfiture, ce qui réjouit et surprend toujours ses plus fidèles lecteurs. Avec les années, toutefois, le registre scatologique s’est étoffé, ce qui change la nature du personnage au détriment d’une saveur critique appréciée des amateurs des tout débuts. Entré dans l’édition 2011 du Petit Larousse, Geluck cesse en 2013 ses collaborations avec les hebdomadaires et quotidiens qui l’accueillaient depuis trente ans : Le Soir (Belgique), VSD (France), L’Illustré (Suisse). Mais, en 2020, en un véritable retour aux sources, le père du Chat décide de reprendre le crayon pour Le Soir, le support de ses débuts. L’humour du Chat n’a pas fini de nous ébouriffer.

— Nelly FEUERHAHN

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Pour citer cet article

Nelly FEUERHAHN. GELUCK PHILIPPE (1954- ) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Article mis en ligne le et modifié le 24/07/2020

Média

Philippe Geluck - crédits : Emanuele Scorcelletti/ Photo12

Philippe Geluck

Autres références

  • BANDE DESSINÉE

    • Écrit par
    • 22 913 mots
    • 15 médias
    ...Christian Binet caricature avec Les Bidochon (1977) la France (très) profonde, et Frank Margerin campe avec Lucien (1979) un loubard au cœur tendre. Le Belge Philippe Geluck distille à partir de 1983 les pensées du Chat. L’humour devient franchement intellectuel – voire métaphysique – dans les albums...