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NISHIWAKI JUNZABURŌ (1894-1982)

Après 1920, la poésie japonaise se métamorphose soudain. Les grandes villes s'étendent, le rythme s'accélère. Les sensibilités s'exacerbent. L'avant-garde fascine les esprits. Hirato Renkichi lance en 1921 la Première Déclaration du mouvement futuriste japonais et, en 1923, Takahashi Shinkichi compose Les Poèmes du dadaïste Shinkichi (Dadaisuto Shinkichi no shi). Autour de la revue Poésie et poétique(Shi to shiron) se rencontrent ceux qui explorent les voies nouvelles. Avec Takiguchi Shūzō, Nishiwaki Junzaburō sera l'un des premiers à faire connaître le mouvement surréaliste. D'emblée, pourtant, il indique ses réserves. La poésie est un refuge de liberté et le poème ne sert aucune cause, ne saurait exprimer nulle signification cachée. Il se suffit. Mais toute création est délibérée, calculée.

Les premiers recueils de Nishiwaki portent des titres en caractères latins : Ambarvalia en 1933 (titre repris en 1947, transcrit cette fois en caractères phonétiques japonais, pour une seconde édition, fortement remaniée), Poems Barbarous en 1934. Jeux d'érudition d'un intellectuel qui venait d'achever ses études de littérature anglaise à Oxford ? Volonté de dépaysement ? Souvenir d'une lointaine noblesse ? Il n'hésite pas à introduire des mots récents, créés pour traduire des notions étrangères, mais conserve une grande clarté, une ligne mélodique pure. Il craint de tomber dans le piège du sentimentalisme, ou de s'égarer dans les arcanes d'un symbolisme douteux. Les chaînes d'associations se brisent et sans cesse les images sont remplacées par d'autres, inattendues, radieuses ou saugrenues. Un rythme sûr entraîne le lecteur de surprise en surprise. Dans les œuvres ultérieures se manifestent ces mêmes qualités : Voyageur sans retour (Tabibito kaherazu, 1947) ; Temps perdu (Ushinawareta toku, 1960). Nishiwaki poursuit sa création tout en enseignant, pendant plus de trente-cinq ans, à l'université Keiō. Il traduit Joyce et T. S. Eliot, Chaucer et Coleridge, publie des essais sur la littérature occidentale, des volumes de souvenirs, de réflexions et de rêveries : Robe de chardons (Azami no koromo, 1961). L'ensemble de ses premiers textes théoriques, Sur la poésie surréaliste (Chogen jitsushugi ron, 1929), passe encore aujourd'hui pour être, après le livre de Hagiwara Sakutarō, Principes de la poésie (Shi no genri), l'ouvrage le plus important qui ait été consacré à la poétique durant ces dernières décennies. Nombreux ont été après la guerre les poètes qui se sont inspirés ou réclamés de lui.

— Jean-Jacques ORIGAS

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Écrit par

  • : ancien élève de l'École normale supérieure, professeur à l'Institut national des langues et civilisations orientales de l'université de Paris-III-Sorbonne nouvelle

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Pour citer cet article

Jean-Jacques ORIGAS. NISHIWAKI JUNZABURŌ (1894-1982) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

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