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POLEVOÏ NIKOLAÏ ALEXEÏEVITCH (1796-1846)

Journaliste, écrivain, historien russe, Polevoï est l'un des premiers publicistes d'orientation bourgeoise. Fils d'un entrepreneur dynamique mais malchanceux, Polevoï fréquente tôt les milieux éclairés à Koursk, puis à Moscou. Travailleur acharné, il se cultive en autodidacte, se passionne pour la Naturphilosophie allemande, pour le romantisme français et devient en 1825, grâce au patronage du prince Viazemski (l'ami de Pouchkine), l'éditeur du Télégraphe de Moscou (Moskovskij Telegraf), première revue encyclopédique russe à être conçue sur le modèle des reviews anglaises. En dehors d'écrits originaux, elle publie la traduction d'œuvres de Hugo, de Vigny, de Constant, de Nodier, de Mérimée, de Balzac, de Byron, de Scott, de Hoffmann, de Tieck, de Richter, d'articles scientifiques, historiques, littéraires, philosophiques. Absorbé par d'interminables polémiques avec Gretch et Boulgarine, confrères pétersbourgeois redoutables pour leurs relations avec le pouvoir, tenu à l'écart par l'intelligentsia noble de Moscou, Polevoï, ce fils de marchand, ne manque pas de présomption : il propose son alliance à Pouchkine en 1826, compose des nouvelles, des poésies, un roman Abbaddonna (1834) dans un style romantique outré, critique L'Histoire de l'État russe (Istorija Gosudarstva rossijskogo) de Karamzine et rédige sa propre Histoire du peuple russe (Istorija russkogo naroda) en s'inspirant de Niebuhr et des historiens français de la Restauration. Vendu par souscription, rédigé hâtivement, inachevé, l'ouvrage (douze tomes promis) n'améliore pas la réputation de charlatan des lettres de son auteur. Polevoï a néanmoins la satisfaction de voir ses rivaux bien nés échouer là où il continue de réussir : auprès du public. Sa revue ne disparaît qu'en 1834 pour avoir critiqué imprudemment une pièce patriotique de Koukolnik, simple prétexte car, depuis longtemps, les autorités étaient exaspérées par son ton « jacobin », ses louanges de la France, son langage irrespectueux. Privé de son principal outil, Polevoï lance une publication illustrée, donne une traduction enfin fidèle de Hamlet : aussitôt jouée à Moscou, la pièce est un événement théâtral considérable (1837). Appelé à réorganiser « l'empire » de Smirdine qui monopolise les revues pétersbourgeoises, Polevoï quitte Moscou. C'est le début de sa déchéance. Accablé par ses anciens admirateurs (Bielinski l'a longtemps pris pour modèle), toujours suspect aux autorités, Polevoï reste un remarquable précurseur : ses plaidoyers pour le commerce et l'industrie, son assurance de plébéien, sa curiosité universelle en font le représentant brillant d'une bourgeoisie libérale naissante sous le règne de Nicolas Ier.

— Alexandre BOURMEYSTER

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Écrit par

  • : agrégé de l'Université, docteur ès lettres, maître de conférences à l'université de Grenoble-III

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Alexandre BOURMEYSTER. POLEVOÏ NIKOLAÏ ALEXEÏEVITCH (1796-1846) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

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