VIEIL-ANGLAISE LITTÉRATURE

Les migrants angles, saxons et jutes ont lutté pour s'assurer le pouvoir en Grande-Bretagne dès le v e siècle, mais les textes vieil-anglais ne datent que du vii e siècle : ce sont d'abord des chartes puis le premier poème chrétien en anglais, de Caedmon (vers 660). La période vieil-anglaise se termine à la suite de la conquête de l'Angleterre par Guillaume de Normandie (1066) et de l'avènement des Plantagenêts (1154). Ce demi-millénaire (vii e - xii e siècle) voit s'épanouir la plus riche et la plus ancienne des littératures européennes en langue vernaculaire.

Cette floraison se répartit en deux massifs. Le premier est dû à la politique culturelle du roi Alfred, qui régna de 871 à 899, et le second à un mouvement bénédictin réformateur, deux ou trois générations plus tard. Le latin demeurait la langue internationale et savante, mais, conscients de son inadéquate connaissance chez eux, les Anglo-Saxons décidèrent de l'épauler par des traductions et par des ouvrages originaux, qui ne tardèrent pas à s'imposer comme des textes autonomes.

L'un et l'autre mouvement – du roi Alfred et des bénédictins – naquirent en réaction contre les invasions vikings. Alfred travailla à confirmer l'identité anglaise, chrétienne, face à la menace scandinave, païenne. Les bénédictins luttèrent contre le relâchement de l'Église, effort de redressement d'autant plus nécessaire en Angleterre que les Scandinaves risquaient de revivifier le paganisme.

La variété de cette littérature est remarquable. La Chronique anglo-saxonne, partant de l'ouvrage latin de Bède Historia ecclesiastica gentis Anglorum (731), fut continuée tout au long de quatre siècles. L'Historia de Bède, l'histoire universelle d'Orose furent traduites. Le roi Alfred fonda l'idéologie de son royaume sur la Regula pastoralis du pape Grégoire Ier qui, à la fin du vi e siècle, avait décidé l'évangélisation des Anglo-Saxons. Le roi, aidé de savants recrutés en Grande-Bretagne ou sur le continent, adapta des ouvrages qui traitaient de questions importantes : la Consolation de Boèce sur le débat entre fatalité et providence ; les Soliloques de saint Augustin sur la nature et la destinée de l'âme. Pour couronner son œuvre, le roi traduisit en prose et commenta le premier tiers du Psautier. Waerferth, un de ses évêques, traduisit les Dialogues de Grégoire.

<it>Scènes de moisson</it>

Scènes de moisson

Scènes de moisson

Scènes de moisson. Page enluminée de la paraphrase du Pentateuque et du livre de Josué par le moine…

Le second massif est celui de la prose, vers l'an mil, dominé par l'œuvre abondante du moine Ælfric (vers 955-1014) : traduction partielle de la Bible, ouvrages didactiques sur le latin (grammaire) et sur le calendrier ecclésiastique, deux cycles de sermons, une série de vies de saints. Un bon nombre de ces vies et de ces homélies sont rédigées dans un style allitéré, voisin de la métrique traditionnelle mais moins compact. Certains des sermons ont été repris, réécrits par Wulfstan (mort en 1023), archevêque et conseiller des rois.

<it>L'Annonciation</it>, Godeman

L'Annonciation, Godeman

L'Annonciation, Godeman

L'Annonciation peinte pour saint Aethelwold, évêque de Winchester (963-984), par son chapelain…

Il faut ici ajouter d'autres textes : Blickling Homilies, sermons du Recueil de Verceil et Vie de saint Guthlac. Presque toute cette prose dérive de sources latines, mais elle manifeste de l'originalité dans le vocabulaire, la syntaxe, la mise en perspective. Elle est rédigée en dialecte west-saxon, devenu à la fin du x e siècle une sorte de langue littéraire standard, à l'instigation du cercle d'Æthelwold, évêque de Winchester. Le manuel (Enchiridion) de Byrhtferth, qui mêle science des nombres et art des belles-lettres, emploie, au contraire, un style recherché à des fins didactiques.

Beowulf

Beowulf

Beowulf

Épopée anonyme en langue saxonne, Beowulf (VIII e siècle), qui relate les exploits d'un prince…

Le renouveau bénédictin, dont Ælfric est l'expression, a eu d'importantes répercussions sur la culture des laïques. Ceux-ci ont encouragé la mise par écrit non seulement des textes religieux, mais aussi de textes profanes, comme la traduction de romans « exotiques[...]

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Pour citer cet article

André CRÉPIN, « VIEIL-ANGLAISE LITTÉRATURE », Encyclopædia Universalis [en ligne], consulté le . URL :

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<it>Scènes de moisson</it>

Scènes de moisson

Scènes de moisson

Scènes de moisson. Page enluminée de la paraphrase du Pentateuque et du livre de Josué par le moine…

<it>L'Annonciation</it>, Godeman

L'Annonciation, Godeman

L'Annonciation, Godeman

L'Annonciation peinte pour saint Aethelwold, évêque de Winchester (963-984), par son chapelain…

Beowulf

Beowulf

Beowulf

Épopée anonyme en langue saxonne, Beowulf (VIII e siècle), qui relate les exploits d'un prince…

Autres références

  • BEOWULF (anonyme) - Fiche de lecture

    • Écrit par Florence BRAUNSTEIN
    • 4 107 mots
    • 1 média
    [...]en Suède méridionale. L'œuvre conserve une certaine unité, fondée sur un récit en forme de diptyque relatant la jeunesse et la vieillesse de Beowulf. Ainsi que toute la poésie vieil-anglaise, celle-ci est fondée sur l'allitération, répétition de la même consonne à l'initiale des syllabes fortement accentuées[...]

Voir aussi