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LES PARTISANS (D. Bona) Fiche de lecture

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Le temps des honneurs

En éclairant les succès éditoriaux de ses personnages, Dominique Bona peut faire rêver de jeunes auteurs. Car Kessel obtenait pour ses reportages des frais de mission colossaux. En 1955, les cinquante-cinq articles qu’il livra à France-Soir coûtèrent trois millions de francs au quotidien. Ces récits étaient repris dans des livres pour lesquels ses à-valoir étaient aussi substantiels, ce qui lui permit de rétribuer des collaborateurs. Plusieurs de ses livres furent également adaptés au cinéma. Ce modèle avait fait de Kessel un homme riche. Son neveu suivit ses traces en n’oubliant pas ses conseils : « Bannir les idées générales, mêler l’émotion à l’efficacité, aboutir par des dialogues brefs et incisifs à des récits vivants ».

Après son prix Goncourt obtenu à trente ans pour LesGrandes Familles, Druon forma une équipe pour rédiger LesRois maudits. Le magnat de la presse du cœur Cino Del Duca fut le mécène de « l’atelier littéraire Maurice Druon ». Les six premiers volumes des Rois maudits se vendirent à des millions d’exemplaires, et leur succès fut renforcé en 1972 par leur version télévisée. Cela aida Georges Pompidou à faire de Druon son ministre des Affaires culturelles puisqu’il n’avait pas hésité à dire : « Dans le domaine culturel aussi, c’est au suffrage populaire qu’il appartient de décider. »

Dominique Bona consacre de remarquables passages aux femmes des deux écrivains. Pour Kessel, elle évoque ses trois épouses et les maîtresses qu’il soutient, même s’il s’éloigne d’elles. La mère adorée, Raïssa, occupe bien sûr une place à part. Quant à Druon, marié durant quinze ans à Geneviève Gregh, ce qu’il écrivit sur la vie de château dut beaucoup à sa vie commune avec la marquise de Brissac. Académicien en 1966, quatre ans après son oncle, Maurice Druon fut aussi député et ministre, entre avril 1973 et mars 1974. Il s’assimila alors à Simon Lachaume, son personnage des Grandes Familles devenu ministre, « s’enviant lui-même et n’ayant donc que des raisons d’être heureux ». Il le fut plus encore dans sa charge de secrétaire perpétuel de l’Académie française, de novembre 1985 à octobre 1999. Son conservatisme en fit un opposant farouche à l’entrée des femmes sous la Coupole, mais également le paladin obstiné du rayonnement de la langue française.

Dans le cercle des compagnes de Druon, la figure d’Edmonde Charles-Roux, directrice de Vogue, l’une des ghost writers de deux tomes des Rois Maudits, brille en mondaine libertine assumée. Elle devint une amante blessée quand Madeleine Marignac passa du rôle de secrétaire-documentaliste du maître à épouse dévouée.

Comme l’a écrit Dominique Bona dans son prière d’insérer, c’était « encore le temps des héros, des aventuriers » affrontant la vie avec panache. Elle tient donc pleinement son pari en faisant revivre des romanciers féconds, sans doute trop pétris de bonne conscience masculine, mais légitimement fiers de leurs succès mondiaux.

— Charles-Louis FOULON

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Écrit par

  • : docteur en études politiques et en histoire, ancien délégué-adjoint aux célébrations nationales (ministère de la Culture et de la Communication)

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Pour citer cet article

Charles-Louis FOULON. LES PARTISANS (D. Bona) - Fiche de lecture [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Article mis en ligne le et modifié le 28/09/2023

Média

Joseph Kessel et Maurice Druon - crédits : Keystone-France/ Gamma-Keystone/ Getty Images

Joseph Kessel et Maurice Druon