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FRÉDÉRIC LÉON (1856-1940)

Le peintre Léon Frédéric est l'un des représentants les plus marquants de l'école symboliste belge. Il n'est pas rare pourtant de le voir classé parmi les épigones du « réalisme » ; mais l'ambiguïté apparente de cette situation n'en est que plus caractéristique. Il suit à l'académie de Bruxelles les cours de Jean Portaels, mais un voyage en Italie fait en compagnie du sculpteur Juliaan Dillens oriente sa carrière de façon décisive (1878) : l'influence des primitifs italiens se combine alors à celle de leurs imitateurs anglais, les préraphaélites, et de Burne-Jones en particulier. Si les thèmes de sa peinture sont parfois, en effet, ceux des réalistes français, si la présence d'un Bastien-Lepage, par exemple, est particulièrement sensible dans ses Marchands de craie (1882, Bruxelles), sa manière en diffère considérablement : des éclairages inhabituels, des couleurs crues et discordantes, un dessin minutieux où le modelé est accentué jusqu'à l'insolite, des compositions chargées contribuent, à l'inverse, à « déréaliser » sa peinture. Dès 1896, il expose au Salon d'art idéaliste, ce qui n'est nullement incompatible avec ses préoccupations sociales : l'œuvre de Frédéric est au contraire tout à fait caractéristique de ce symbolisme utopique dont l'irréalisme n'est qu'une forme de protestation contre l'état de la société contemporaine et un appel pour un avenir meilleur. C'est ainsi qu'il faut interpréter ses grandes allégories, aux titres révélateurs : Le peuple, un jour, verra le soleil (1891), ou les triptyques des Âges de l'ouvrier (autrefois au musée du Luxembourg) et de L'Âge d'or (musée d'Art moderne, Paris). Mais si le drapeau rouge flotte dans le second de ces tableaux, Frédéric préférera souvent se réfugier dans le thème plus rassurant des maternités ou de la nature consolatrice (La Nature ou La Fécondité, 1897 ; triptyque Le Ruisseau, dédié à Beethoven, 1897-1898, Bruxelles). Ce panthéisme extatique marque clairement les limites du symbolisme socialisant : malgré certaines apparences, et bien loin qu'il appartienne au véritable « réalisme », il s'agit d'un art « foncièrement idéaliste » (L. Bénédicte).

— Jean-Paul BOUILLON

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Écrit par

  • : professeur d'histoire de l'art moderne et contemporain à l'université Blaise-Pascal, Clermont-Ferrand

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