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JULIETTE RÉCAMIER, MUSE ET MÉCÈNE (exposition)

Fille d'un notaire royal puis receveur des finances à Paris, née à Lyon en 1777, Juliette Bernard prit le nom sous lequel elle est devenue célèbre en épousant, pendant la Terreur, un homme bien plus âgé qu'elle, le banquier Jacques-Rose Récamier, avec qui elle entretint une affection platonique.

Juliette Récamier garda toujours des liens avec sa ville natale, où, exilée par Napoléon, elle revint vivre quelque temps sous l'Empire, et à laquelle elle légua à sa mort, en 1849, des œuvres emblématiques de sa collection. Lyon a toujours cultivé le souvenir de cette femme admirée par ses contemporains comme un modèle de beauté et d'esprit. Édouard Herriot, historien et ancien maire de la ville, lui consacra en 1904 une biographie qui fait toujours référence, et le Musée historique de Lyon organisa une première exposition, elle aussi à caractère biographique, en 1977.

De la vie de Madame Récamier, l'histoire a jusqu'ici surtout retenu le souvenir de son brillant salon de la rue du Mont-Blanc à Paris, de ses liens avec les milieux royalistes et de son opposition sans trêve à Napoléon, de son amitié avec Madame de Staël et Chateaubriand, enfin de sa retraite, sous la Restauration, après des revers de fortune, au couvent de l'Abbaye-aux-Bois, situé rue de Sèvres, à Paris. Ses relations avec les milieux artistiques, ses choix et son influence personnelle dans ce domaine ont été moins souvent mis en avant. Modèle, commanditaire, collectionneuse, initiatrice d'un nouveau goût, tels sont les aspects de sa personnalité que le musée des Beaux-Arts de Lyon s'est attaché à explorer à travers près de deux cents œuvres confrontées aux données biographiques et à d'autres productions contemporaines dans la remarquable exposition Juliette Récamier, muse et mécène (27 mars-29 juin 2009), accompagnée d'un catalogue exemplaire par la qualité de ses contributions.

Immortalisée par deux tableaux de David (1800) et de Gérard (vers 1801-1802), seuls grands absents de ce parcours, Juliette Récamier fut la femme la plus portraiturée de son temps (davantage encore que l'impératrice Joséphine), par des artistes très divers. On saisit vite dans la grâce à peine posée du célèbre buste de Joseph Chinard ou encore dans la sensualité et le naturel de la toile de Firmin Massot (1807) en quoi cette femme a pu apparaître en son temps comme un véritable idéal féminin, jusqu'à s'imposer comme une sorte d'icône. Cette grâce est encore présente, avec une fine allusion à la Juliette de David que l'on voit allongée sur son lit de repos, dans le tableau de François Louis Dejuinne La Chambre de Madame Récamier à l'Abbaye-aux-Bois (1826), et fait encore douter quelque peu de l'identité du modèle empâté du portrait attribué à Antoine Jean Gros (vers 1825).

Son salon, ses brillantes relations, ses visiteurs étrangers, ses voyages en Europe et ses exils ont évidemment contribué à rendre célèbres la beauté et l'esprit de Madame Récamier. Il semble – elle s'en ouvre à plusieurs reprises dans sa correspondance – qu'elle ait été particulièrement attentive à son image et qu'elle suivait de près la reproduction en gravure de ses portraits, largement diffusés en Europe. En atteste sa réaction boudeuse face aux bustes – « coiffée en cheveux » et couverte d'un voile – réalisés en 1813, à Rome, par Canova auquel elle vouait pourtant admiration et amitié : en opposition au naturel d'un Chinard, ces œuvres dont Canova tirera une représentation de Juliette en Béatrice de Dante (1819-1822) s'inscrivent dans la série des « têtes idéales » du grand sculpteur italien.

Dans la recherche d'une définition du goût de Madame Récamier, l'exposition étayait l'hypothèse d'un néo-classicisme de charme, en rupture avec l'austérité[...]

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Robert FOHR. JULIETTE RÉCAMIER, MUSE ET MÉCÈNE (exposition) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

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