Abonnez-vous à Universalis pour 1 euro

ZORRILLA JOSÉ (1817-1893)

Dans ses Souvenirs du temps passé (Recuerdos del tiempo viejo, 1880-1883), Zorrilla rapporte plusieurs anecdotes de son existence besogneuse et mouvementée. Un poème qu'il lit sur la tombe de Larra (1837) lui acquiert d'emblée la célébrité. À Madrid, il écrit dans les journaux, publie des recueils poétiques, fait représenter plusieurs drames. Il se rend en France (1850), puis au Mexique (1855) où il bénéficie de la protection de l'empereur Maximilien. Il revient en Espagne, séjourne à Rome et en France de nouveau ; il se consacre activement à la littérature, est élu à l'Académie. En 1889, il reçoit à Grenade une couronne d'or qui consacre sa gloire littéraire. Son œuvre poétique, abondante, musicale, sonore et colorée, a souvent des accents fougueux ; la tradition nationale ou des motifs religieux en fournissent les thèmes. Une improvisation tumultueuse se donne trop souvent libre carrière aux dépens de l'émotion juste ou de l'expression originale. C'est dans les récits légendaires qu'il puise le meilleur de son inspiration ; la sobriété de la narration, l'ornementation lyrique, le talent descriptif, l'ampleur de l'imagination sont leurs meilleures qualités. Les Chants du troubadour (Los Cantos del trovador, 1840-1841) eurent une grande renommée : « A buen juez mejor testigo » (« À bon juge meilleur témoin ») rapporte l'histoire du Christ de la Vega, à Tolède, dont le bras droit se décloue de la croix, miraculeusement, pour confirmer un serment d'amour qu'un amant infidèle veut abjurer ; « Margarita la tornera » (« Marguerite la tourière ») montre comment la Vierge Marie prit la forme et la place d'une nonnette ayant fui le couvent ; l'Espagne mauresque est évoquée dans « La Leyenda de Al Hamar ». Publié à Paris en 1852, Granada est un long poème malheureusement inachevé ; l'auteur y emploie une vaste érudition à évoquer la brillante cité avant la fin de la Reconquête et la civilisation arabe ; on y admire les rythmes compliqués, les couleurs éclatantes, la stylisation du décor, l'information historique. La Légende du Cid (La Leyenda del Cid, 1882) reprend librement des thèmes du Poème du Cid (Cantar de mío Cid), du Cantar de Rodrigo, du Romancero, de la Crónica general, auxquels se mêlent des épisodes inventés par le poète.

L'œuvre dramatique de Zorrilla comprend des comédies de cape et d'épée, sur le modèle classique comme Gagner en perdant (Ganar perdiendo, 1839) ; Chacun ses raisons (Cada cual con su razón, 1839), une tragédie classique (Sofronia) et quatorze drames historiques. Don Juan Tenorio (1844) a éclipsé toutes les autres pièces. Ce drame « religieux et fantastique » eut un succès éclatant en dépit des critiques des censeurs et de l'auteur lui-même ; il est représenté tous les ans en Espagne à la Toussaint. Zorrilla met l'accent sur la séduction d'Inés, religieuse cloîtrée, dont l'intervention obtient le salut de l'âme du séducteur dans une apothéose à la gloire de l'amour et de la miséricorde divine. La légende de l'abuseur de Séville est adaptée avec un grand sens des effets dramatiques où se conjuguent le romanesque et le merveilleux chrétien ; on y apprécie aussi la vérité psychologique des personnages, le lyrisme passionné, le style à la fois populaire et précieux. La Savetier et le roi (El Zapatero y el rey, 1840-1841) évoque la figure du roi don Pedro condamnant un jeune cordonnier, qui a tué l'assassin de son père, à ne pas faire de souliers pendant un an. Traître, non confessé et martyr (Traidor, inconfeso y mártir, 1849) rapporte la légende du pâtissier de Madrigal qui s'était fait passer pour le roi don Sebastián du Portugal, disparu à la bataille d'Alcazarquivir. Parmi ses autres drames, on retiendra enfin [...]

La suite de cet article est accessible aux abonnés

  • Des contenus variés, complets et fiables
  • Accessible sur tous les écrans
  • Pas de publicité

Découvrez nos offres

Déjà abonné ? Se connecter

Écrit par

  • : professeur émérite des Universités, membre correspondant de la Real Academia Española

Classification

Pour citer cet article

Bernard SESÉ. ZORRILLA JOSÉ (1817-1893) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • DON JUAN

    • Écrit par Michel BERVEILLER
    • 5 639 mots
    ...justification. Paradoxalement, les deux ouvrages précédents sont la source la plus directe du très espagnol Don Juan Tenorio (1844), drame en vers de José Zorrilla. En rendant à don Juan son patronyme originel, l'auteur prétendait bien remonter à la source nationale, mais, dans le dénouement optimiste du...
  • DON JUAN TENORIO, José Zorrilla - Fiche de lecture

    • Écrit par Bernard SESÉ
    • 870 mots

    Représenté pour la première fois à Madrid, en 1844, Don Juan Tenorio de José Zorrilla (1817-1893) est vite devenu, dans le monde hispanique, une œuvre extrêmement célèbre. Ce drame « religieux et fantastique » fut longtemps joué chaque année, à l'occasion de la fête des morts. Plus que de ...

  • ESPRONCEDA JOSÉ DE (1808-1842)

    • Écrit par Robert MARRAST
    • 908 mots

    La vie, l'œuvre et l'action d'Espronceda se situent dans une époque où l'Espagne est agitée de forts soubresauts : après la guerre de l'Indépendance et la restauration de 1814, vint l'expérience constitutionnelle de 1820-1823. Espronceda est d'abord l'élève d'Alberto Lista (1775-1848), pédagogue...

Voir aussi