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LEWIS JOHN LLEWELLYN (1880-1969)

Fils d'un mineur gallois fixé dans l'Iowa, John Lewis suit, professionnellement et syndicalement, la tradition paternelle. Il impose rapidement ses talents de lutteur, d'organisateur et son ambition. À vingt-six ans, il devient le chef d'un syndicat local de mineurs de l'Illinois ; cinq ans plus tard, il entre dans les services centraux de l'United Mine Workers (U.M.W. ; Syndicat uni des mineurs). À trente-neuf ans, il est élu président de l'U.M.W., forte alors de 400 000 adhérents, et la lance dans une grève qui, malgré la violente opposition du gouvernement fédéral, sera victorieuse. En 1921, il est candidat à la présidence de l'American Federation of Labour (A.F.L.), mais est battu par Samuel Gompers.

Dans les années 1925-1932, le syndicat des mineurs décline. Mais l'arrivée de F. D. Roosevelt au pouvoir permet de redresser la situation : John Lewis risque l'avenir de l'U.M.W. dans une grande campagne de recrutement. C'est un succès triomphal : l'U.M.W. passe de 150 000 adhérents à 515 000. Cette victoire fait de Lewis le plus connu des chefs syndicalistes américains : elle lui assure surtout un attachement indéfectible et le soutien inconditionnel des mineurs.

À l'intérieur de l'A.F.L., John Lewis s'affirme à partir de 1935 comme le dirigeant de l'opposition à la vieille direction : il préconise en 1936 le soutien à la seconde candidature de Roosevelt et surtout, il demande la structuration par industries d'une A.F.L. sclérosée et qui, fragmentée par métiers, ne peut faire face aux grands trusts, de l'automobile notamment. En octobre 1935, il crée avec sept autres chefs de fédération le Committee for Industrial Organization (Comité pour l'organisation industrielle) qui se sépare en novembre 1938 de l'A.F.L. et devient au congrès de Pittsburgh le Congress of Industrial Organizations (C.I.O.). John Lewis est élu président du C.I.O. : il est alors au sommet de sa puissance.

En 1940, il retire avec brutalité son soutien à Roosevelt, pour des raisons obscures (on a prétendu qu'il avait espéré être choisi comme candidat à la vice-présidence par Roosevelt). Les autres dirigeants du C.I.O. ne le suivent pas et critiquent en outre son indulgence quant à la présence des communistes dans le C.I.O. Aussi, en 1941, il quitte la présidence de cette fédération syndicale. Il se replie alors sur l'United Mine Workers, qui se sépare du C.I.O. en 1942. L'année suivante, il déclenche — en pleine guerre — une grève nationale des mineurs, à l'issue de laquelle ceux-ci gagnent une considérable hausse des salaires. Sa popularité auprès de ses troupes est — et restera — immense : mais il est aussi l'homme le plus insulté des États-Unis.

En 1946, il rejoint, avec l'United Mine Workers, l'A.F.L. Mais l'attitude très modérée prise par celle-ci face à la loi Taft-Hartley votée par le Congrès américain, qui pose certaines limites et conditions à l'exercice du droit de grève et interdit aux communistes de participer à des négociations, l'amène à rompre avec elle en octobre 1954. L'United Mine Workers retrouve une indépendance complète. John Lewis s'y consacre dès lors — il en abandonnera la présidence en janvier 1960 —, continuant de secouer la scène de la vie publique par son opposition au gouvernement fédéral et les critiques qu'il lance contre les grandes centrales syndicales.

John Lewis est une figure unique dans le syndicalisme américain : il doit cette singularité non pas à des positions doctrinales radicales — s'il se montra peu enclin à les persécuter, il ne manifesta aucune sympathie envers les communistes —, mais à une grande liberté de ton et de critique et surtout à l'emploi de tous les moyens dans la recherche d'un rapport de forces favorable aux travailleurs.[...]

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Pour citer cet article

François BROUSSE. LEWIS JOHN LLEWELLYN (1880-1969) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • AFL-CIO (American Federation of Labor-Congress of Industrial Organizations)

    • Écrit par Claude JULIEN, Marie-France TOINET
    • 6 913 mots
    • 2 médias
    ...de métiers », elle défendait les intérêts particuliers de la main-d'œuvre qualifiée en évitant de se solidariser avec la masse des autres travailleurs. Président du syndicat des mineurs qui comptait alors 500 000 membres, John Lewis reprit une des idées des I.W.W. Alors que l'A.F.L. divisait les ouvriers...

Voir aussi