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SFAR JOANN (1971- )

Le chat qui pense

Il serait hasardeux de dresser le bilan de la carrière de Joann Sfar (à quarante ans, Jacobs n'avait pas commencé Blake et Mortimer, Pratt inventait Corto Maltese). Il faut néanmoins faire une place à part au Chat du rabbin (Dargaud, huit volumes depuis 2002). Cette série, dont l'action se déroule principalement à Alger, vers 1930, et dont les protagonistes sont un rabbin, sa fille et un chat philosophe doué de la parole et fin commentateur des folies humaines, est, comme l'a écrit dans une Préface Éliette Abécassis, « à la fois une poésie, un conte pour adultes, et une discussion intelligente, pondérée, et drôle, du judaïsme ». Elle démontre aussi qu'un récit de fiction en bande dessinée peut être essentiellement philosophique : le dialogue entre les animaux dans l'épisode Le Paradis terrestre paru en 2005 en est un exemple particulièrement révélateur.

Intéressé par toutes les formes de communication, Joann Sfar, tout en voulant rester fondamentalement un auteur de bande dessinée, a accumulé des expériences dans d'autres domaines. Il illustre et commente Le Banquet de Platon (2002) et Candide de Voltaire (2003) pour les éditions Bréal, avant de diriger avec bonheur chez Gallimard la collection Bayou, qui révèle de jeunes et talentueux auteurs de bande dessinée comme Clément Oubrerie et Marguerite Abouet avec la série Aya de Yopougon (depuis 2005), chronique sur une jeune Ivoirienne. Après avoir été adaptée au théâtre en 2004, l'histoire du Chat du rabbin est devenue en 2011 un dessin animé, réalisé par Sfar et Antoine Delesvaux, cofondateurs en 2007 du studio d'animation Autochenille Production. La carrière de Sfar en tant que réalisateur avait débuté en 2010 par le film Gainsbourg (vie héroïque), avec Éric Elmosnino dans le rôle-titre et Lucy Gordon dans celui de Jane Birkin. Malgré des numéros d'acteurs souvent brillants (comme celui de Laetitia Casta incarnant Brigitte Bardot), les amateurs de Serge Gainsbourg furent plutôt déçus (Sfar avait cependant précisé qu'il ne s'agissait pas d'une œuvre biographique mais d'un « conte »). Également passionné par Georges Brassens, il accepte d'être commissaire d'une exposition sur le chanteur à la Cité de la musique, à La Villette, Paris, en 2011.

Dans un texte figurant sur son site (Le Petit Monde de Joann Sfar, 13 avril 2010), il écrivait : « Je me suis construit dans le rejet rageur de la mort, mes histoires jamais finies en sont le témoignage le plus limpide. » Le doute n'est pas permis, Joann Sfar est un artiste.

— Dominique PETITFAUX

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Pour citer cet article

Dominique PETITFAUX. SFAR JOANN (1971- ) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • BANDE DESSINÉE

    • Écrit par Dominique PETITFAUX
    • 22 913 mots
    • 15 médias
    ...Olives noires (2001), récit de l’itinéraire intellectuel et spirituel d’un jeune garçon juif dans la Palestine occupée par l’armée romaine. Scénariste le plus prolifique de sa génération, Joann Sfar est parfois scénariste et dessinateur, comme dans Les Dossiers du professeur Bell (1998),...

Voir aussi