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ELLROY JAMES (1948- )

Depuis 1987, année où parurent en France ses premiers romans, l'écrivain américain James Ellroy a séduit un lectorat français beaucoup plus vaste que celui des amateurs de romans noirs. Après plusieurs ouvrages qu'il considère comme des œuvres de jeunesse, l'écrivain publie en 1987 Le Dahlia noir, premier volet de la tétralogie qu'il consacre à sa ville natale, le Los Angeles des années 1950. Suivent Le Grand Nulle Part (1988), L.A. Confidential (1990) et White Jazz (1992) qui conclut cette radiographie du mal où la perversion des personnages a pour fonction primordiale de renvoyer au lecteur l'image d'une société américaine corrompue. « L'Amérique n'a jamais été innocente » proclame volontiers James Ellroy en enchaînant sur un nouveau projet, la trilogie « Underworld USA » (1995-2010) qui raconte l'Amérique du crime durant la seconde moitié du xxe siècle. Car Ellroy n'improvise jamais son travail littéraire. Son œuvre est une succession de projets mûrement pensés qui le font progresser tant dans la nature des histoires mises en scène que dans son écriture épurée, forgée au fil de quinze romans.

On cite pour la première fois en France le nom de James Ellroy en 1987, lorsque paraît Lune sanglante, dans la collection Rivages/Noir. Son directeur, François Guérif, a eu un coup de cœur pour le livre, refusé par plusieurs éditeurs. Dès sa parution, Jean-Patrick Manchette ne s'y trompe pas, qui écrit : « Lune sanglante est passé pour l'instant complètement inaperçu. Il faut donc signaler aux amateurs, pour leur plaisir, qu'il s'agit d'un des plus remarquables romans noirs de la décennie, par sa préoccupation intellectuelle élevée, son écriture savante, son épouvantable puissance d'arrêt. » (Libération, 7 juillet 1987).

Manchette poursuit en soulignant la violence du récit, qui frise l'insupportable, mais indique « que l'invention stylistique brise chaque fois notre envie de vomir en prenant au dépourvu, chaque fois qu'il le faut, notre esprit et notre estomac. » Une analyse qui, avec quelques nuances, peut s'appliquer à toute l'œuvre du romancier américain.

Les mystères de Los Angeles

Si James Ellroy figure aujourd'hui parmi les meilleurs auteurs de romans noirs du monde – sinon le meilleur – il le doit d'abord à son travail. Car, durant son enfance, le destin qui tient une si grande place dans son œuvre ne l'a guère épargné. Il naît le 4 mars 1948 à Los Angeles, d'un père comptable pour les studios d'Hollywood et d'une mère infirmière. À l'âge de six ans, ses parents divorcent. Le petit James va vivre seul avec une mère alcoolique et aux liaisons multiples. Quatre ans plus tard, c'est le drame qui le marquera à jamais : le 22 juin 1958, au retour d'une visite chez son père, la police lui apprend que sa mère a été découverte étranglée dans des buissons, près d'un terrain de sport. Son meurtrier ne sera jamais retrouvé. Confié à un père dont le seul conseil prodigué fut : « Séduis toutes les serveuses que tu peux rencontrer », Ellroy côtoie bientôt la délinquance, la drogue et l'alcool. Il dort dans les parcs de la ville ou en prison, lorsqu'il se fait prendre à cambrioler de riches villas. Cette dérive dure pendant plus de dix ans. Jusqu'en 1977 où, hospitalisé pour une double pneumonie, il s'entend dire par un médecin : « Vous avez le choix : où vous arrêtez vos bêtises ou vous mourrez ».

Dès lors, ayant choisi de vivre, James Ellroy stoppe l'alcool et, devenu sobre à vingt-neuf ans, décide de trouver son salut dans l'écriture. Grand connaisseur de films et de romans de ces privés « durs-à-cuire » qu'il a dévoré par centaines durant ses années d'errance, admirateur de l'œuvre de Dashiell Hammett[...]

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Pour citer cet article

Claude MESPLÈDE. ELLROY JAMES (1948- ) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Média

James Ellroy - crédits : Ulf Andersen/ Getty Images/ PxP Gallery

James Ellroy

Autres références

  • LE DAHLIA NOIR (B. de Palma)

    • Écrit par Christian VIVIANI
    • 1 017 mots

    Il y a entre le cinéma et le célèbre fait-divers non élucidé du « Dahlia noir », romanesque et sanglant, un flirt inabouti dont le beau film de Brian De Palma préserve la singularité.

    En 1947, la police de Los Angeles découvre le cadavre mutilé, vidé de ses organes, d'une starlette, Elizabeth...

  • POLICIER ROMAN

    • Écrit par Claude MESPLÈDE, Jean TULARD
    • 16 394 mots
    • 14 médias
    ..., 1995) s'illustrent notamment sur le thème du tueur en série, qui devient un personnage récurrent de la fiction policière. Mais la révélation reste James Ellroy qui, après quelques ouvrages atypiques, laisse éclater son originalité stylistique et compose des reconstitutions historiques au souffle puissant,...

Voir aussi