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FONTYN JACQUELINE (1930- )

À Anvers, où elle naît le 27 décembre 1930, la compositrice belge Jacqueline Fontyn étudie le piano avec Ignace Bolotine ; puis elle suit les cours de composition et d'écriture de Marcel Quinet. Partie pour Paris afin d'étudier auprès de Nadia Boulanger, elle fréquente en 1954 les classes de Max Deutsch avant de suivre à l'académie de musique de Vienne l'enseignement de Hans Swarowsky (direction d'orchestre). Elle enseigne au Conservatoire royal flamand d'Anvers de 1963 à 1970, avant d'être, de 1970 à 1990, professeur de composition au Conservatoire de Bruxelles. Elle fut l'épouse du compositeur belge Camille Schmit (1908-1976).

Ses premières œuvres – comme Capriccio, pour piano (1954) – sont encore placées sous l'influence de Schönberg (par l'intermédiaire de l'enseignement de Max Deutsch, qui avait été son élève) et sont caractérisées par un langage sériel et dodécaphonique dont elle usera jusqu'en 1978, avec souplesse et liberté à la fois : Psalmus Tertius, pour baryton, chœur et orchestre (1959), Spirales, pour deux pianos (1971), Per Archi, pour onze instruments à cordes (1973), Halo, pour harpe et seize instruments ou orchestre de chambre (1978).

À partir d'Éphémères, pour mezzo-soprano et onze instruments, sur des poèmes de Robert Guiette (1979), Jacqueline Fontyn se détourne d'un matériau fondé sur les séries, lui préférant un langage modal, atonal et dodécaphonique, plus riche en potentialités expressives et capable de dépasser l'effet pervers de l'emploi des techniques sérielles, à savoir l'impossibilité de discerner, à l'audition, la fonction d'un son (un même son pouvant revenir dans une œuvre avec, à chaque fois, une fonction sérielle différente, soit harmonique, soit mélodique). Sous l'influence de Witold Lutosławski, elle intègre en outre à ses techniques d'écriture une dimension « d'aléatoire contrôlé », afin de conférer à sa musique des irisations de couleurs de timbres ainsi que des climats harmoniques aussi raffinés qu'impressionnistes : In The Green Shade, pour orchestre (1988) ; Rose des sables, pour mezzo-soprano, récitant, chœur de femmes et orchestre (1990) ; Colinda, concerto pour violoncelle et orchestre (1991) ; Sul Cuordella Terra, pour flûte, violon, alto, violoncelle et harpe (1993) ; Vent d'Est, pour accordéon et cordes (1995) ; L'Anneau de jade, pour orchestre (1996) ; IchkanntemeineSeelenicht, pour six voix de femmes (1997) ; Aube, pour flûte(s), guitare et piano (1998) ; Capricorne, concerto pour percussion et orchestre de chambre (2003) ; Éole, pour trio de flûtes (2005) ; FerneSpuren, pour violon, violoncelle et piano (2009) ; Fille du vent, pour récitant(e), flûte, alto et piano (2013).

Si Jacqueline Fontyn ne renie point l'héritage du passé (non pour le restaurer mais, au contraire, afin de le dépasser, de le subvertir et de le transcender), elle ne dédaigne pas les idiomes et les techniques conquises par le langage et les techniques du jeu instrumental. Mais jamais elle ne se sert des avancées de notre présent comme d'un « catalogue » d'effets. Ce qui l'intéresse, c'est la richesse et la diversité des expressions qui lui sont ainsi permises et qu'elle met au service d'une rythmique souple, qui fait imploser la barre de mesure, d'un matériau mélodique et harmonique toujours à la recherche du sensible (son emploi des clusters au sein d'une harmonie dodécaphonique et atonale dynamique est à cet égard caractéristique) et de structures formelles organiques se désirant tout autant poésie qu'architectonie. Dans ce désir de ne point se restreindre au seul domaine objectif de l'écriture réside tout l'art de cette compositrice, qui a su retenir et adapter à son style propre la leçon de Cézanne, « Je travaille sur[...]

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Écrit par

  • : compositeur, critique, musicologue, producteur de radio

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