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VARSOVIE INSURRECTION DE (1944)

Konstantin Rokossovski, 1944 - crédits : P. Bernshtein/ Slava Katamidze Collection/ Getty Images

Konstantin Rokossovski, 1944

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Éclatant le 1er août 1944 et écrasée le 2 octobre 1944, l'insurrection de Varsovie est certainement l'un des faits d'armes les plus glorieux de la nation polonaise. Cette insurrection qui n'a pas son pareil dans l'histoire de la Seconde Guerre mondiale a pourtant coûté un prix démesuré pour le résultat obtenu : des dizaines de milliers de combattants morts, soit les armes à la main, soit assassinés par les Allemands ; des centaines de milliers de Varsoviens déportés, une ville presque entièrement rasée. La nation polonaise n'avait pas besoin de cette opération suicide pour se réconcilier avec elle-même : sa résistance opiniâtre à l'occupant s'était soldée, pour ce dernier, par d'immenses pertes en hommes et en matériel. Dès le début des années quarante, le martyre de la Pologne avait lavé la honte de la défaite de 1939. Si le peuple polonais est célèbre pour son romantisme, ce n'est pourtant pas là qu'il faut rechercher les causes du soulèvement d'août 1944. L'Armée rouge avançait à marche forcée vers Varsovie, réduisant une à une les poches de résistance allemandes sur un front d'environ cinq cents kilomètres. Une portion importante du territoire polonais était libérée dès la fin juillet. Pourtant, les troupes du maréchal Rokossovski butaient devant les défenses particulièrement puissantes que les Allemands avaient construites sur la Vistule. La libération de Varsovie semblait proche. Beaucoup s'en inquiétaient tant au sein du gouvernement en exil de Londres (dirigé par Mikołajczyk) que de l'Armée de l'intérieur (Armia Krajova), organisation de résistance qui dépendait du gouvernement de Londres, hégémonique dans le pays (deux autres organisations, de moindre importance, rassemblaient chacune quelques milliers d'hommes : N.S.Z., groupe d'extrême droite qui combattait à la fois Allemands et communistes, et l'Armée du peuple, dirigée par les communistes). Pour ces hommes d'un nationalisme entier, la libération de Varsovie par la seule Armée rouge semblait politiquement inacceptable. Très vite, une solution se dégage qui permettrait, selon l'un des dirigeants du soulèvement (le colonel Iranek-Osmiecki), d'accueillir en maître de céans l'Armée rouge lorsqu'elle entrerait dans la ville : une insurrection. Le 25 juillet, le général Bor-Komorovski, commandant en chef de l'A.K., obtient de ses supérieurs de Londres un feu vert.

Ruines de Varsovie - crédits : Keystone/ Getty Images

Ruines de Varsovie

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L'Armée de l'intérieur aligne près de 40 000 hommes, la N.S.Z. et les communistes quelques milliers à eux deux. Le 1er août, à 17 heures, les insurgés passent à l'attaque. Les forces adverses, à peu près égales en nombre, sont infiniment mieux armées. Au bout de quelques jours de combats acharnés, les Polonais occupent une partie importante de la ville. Des milliers de Varsoviens se joignent aux combattants. Chacun renforce ses positions en édifiant des barricades. Tous sont persuadés que la fin est proche : les Soviétiques ne sont-ils pas aux portes de Varsovie ? Certains faits ne passent pourtant pas inaperçus aux insurgés : dès le lendemain du soulèvement, le 2 août, l'aviation soviétique a pratiquement disparu du ciel de la capitale ; le 3 août, la canonnade se fait plus calme. L'aide soviétique, attendue par les combattants, ne vient pas. En fait, leurs chefs n'ont pas daigné faire appel à Rokossovski. Ils attendront le 11 septembre pour le faire, alors que la résistance faiblit devant les coups portés par les Allemands qui, progressivement, reconquièrent la ville. Staline, de son côté, fait la sourde oreille aux demandes des alliés anglo-américains qui envisagent de faire désormais partir leurs avions de ravitaillement d'aéroports soviétiques. Les Soviétiques finiront par accepter, le 10 septembre. Les parachutages effectués par cent dix bombardiers de la VIIIe Air Force, le 18 septembre, n'atteindront que partiellement leur but : seuls 30 p. 100 des containers sont récupérés par les insurgés. Rokossovski n'aurait pu, en ces jours de septembre, qu'apporter une aide sans grande portée, car une contre-offensive allemande avait rejeté ses troupes à soixante kilomètres de Varsovie. Mais l'aurait-il fait ? Staline n'était pas mécontent de voir ses pires ennemis succomber après une action irréfléchie. Depuis des années, ils avaient refusé tout contact avec les Soviétiques, combattu avec acharnement la résistance communiste. L'importance même des nationalistes (l'A.K. rassemblait, en 1944, de deux à trois cent mille combattants dans tout le pays) jouait contre eux. En se lançant dans cette aventure, ils croyaient pouvoir reprendre le contrôle du pays. En fait, ils signaient leur propre condamnation. Après la reddition du général Bor-Komorovski, de son état-major et de plus de 10 000 hommes, le 2 octobre, au général allemand Bach-Zelewski, une page de l'histoire de la Pologne était tournée. Les nationalistes avaient perdu là leurs meilleures forces qui leur manqueront lors de la prise progressive du pouvoir par la gauche.

— Charles URJEWICZ

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Konstantin Rokossovski, 1944 - crédits : P. Bernshtein/ Slava Katamidze Collection/ Getty Images

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Ruines de Varsovie - crédits : Keystone/ Getty Images

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