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FIELDING HENRY (1707-1754)

Henry Fielding est un produit de la squirearchy, c'est-à-dire d'une Angleterre gouvernée par les châtelains, où l'harmonie entre la ville et les champs n'avait pas encore été rompue par la machine à vapeur. Il en est aussi un produit marginal. Fils d'un cadet de grande famille qui avait embrassé la carrière des armes, il n'héritera ni de terres, ni de titres ; et cette position légèrement excentrique par rapport au système a aiguisé son coup d'œil, attisé sa verve. La nécessité où il fut de gagner sa vie, de frayer avec tous les milieux de l'Angleterre de Walpole lui a donné une expérience étendue de la nature humaine. Elle l'a éclairé sur les vices et les abus d'une société dont il ne conteste pas les fondements, mais qu'il voudrait rendre moins imparfaite. Magistrat, romancier, metteur en scène, journaliste, dramaturge, il était bien placé pour percevoir les grondements souterrains, les craquements de l'édifice économique et social mis en place par les whigs après 1688 ; mais si les réalistes ne tombent pas dans les puits, ils discernent rarement au ciel les signes avant-coureurs de l'avenir.

De l'aventure picaresque au roman bourgeois

Fielding naquit au cœur de ce comté du Somerset où démarre le jeu de l'oie de ses romans de grand chemin. Soumise aux coups de dés de l'amour et du hasard, sa vie commence dans l'aventure picaresque d'un orphelin de fait, élevé dans un château qui ne lui reviendra point, demi-pensionnaire à Eton (il n'eut jamais de part entière du gâteau), puis trop pauvre, malgré un père général, pour s'inscrire à Oxford ou à Cambridge. Elle se termine dans les pantoufles d'un juge de paix qui épousa en secondes noces sa cuisinière et alla mourir de la gravelle à Lisbonne.

À sa période bohème se rattachent sa tentative, déjouée par un tuteur jaloux, d'enlever une jeune héritière ; la petite fortune dissipée à Londres, où il s'enfonça sous le poids des dettes, à l'image de ses héros, du monde au demi-monde et du demi-monde aux bas-fonds ; son stage à l'université de Leyde, moins chère que ses rivales anglaises ; ses premiers contacts avec la faune théâtrale. De sa maturité, on retiendra qu'il fut le premier magistrat résident de Bow Street, tâche qu'il remplit avec conscience, purgeant les rues et les routes des voleurs qui les infestaient, rédigeant des rapports sur la délinquance, les conditions de vie dans les prisons. Il combina ces fonctions avec des activités journalistiques : True Patriot, Jacobite Journal, Covent Garden Journal, où il défendit le gouvernement contre les partisans des Stuarts ; et des activités littéraires, publiant tour à tour Joseph Andrews (1742), Jonathan Wild (1743), Tom Jones (1749), Amelia (1751).

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Pour citer cet article

Alexandre MAUROCORDATO. FIELDING HENRY (1707-1754) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • ANGLAIS (ART ET CULTURE) - Littérature

    • Écrit par Elisabeth ANGEL-PEREZ, Jacques DARRAS, Jean GATTÉGNO, Vanessa GUIGNERY, Christine JORDIS, Ann LECERCLE, Mario PRAZ
    • 28 170 mots
    • 30 médias
    ..., 1747-1748), qui dominera la littérature pendant plus d'un siècle, à partir de Diderot, Sade, Rousseau et Gœthe. Par réaction contre Richardson, Henry Fielding (1707-1754) présenta dans Tom Jones(The History of Tom Jones, a Foundling, 1749), l'histoire d'un enfant trouvé qui, en raison de sa nature...
  • RICHARDSON SAMUEL (1689-1761)

    • Écrit par Jean DULCK
    • 1 259 mots
    • 1 média
    Le premier de ces romans devait déclencher les sarcasmes de Henry Fielding et pousser celui-ci à écrire un anti-Pamela, The History of Joseph Andrews. La carrière des deux grands écrivains est étrangement parallèle. Si Richardson, quelque peu hautain et infatué de lui-même, n'aima jamais son rival,...
  • SMOLLETT TOBIAS GEORGE (1721-1771)

    • Écrit par Alexandre MAUROCORDATO
    • 2 551 mots
    On a prétendu que Smollett, maître de la caricature et mécanicien des humeurs, n'avait pas su donner à ses créatures la même chaleur humaine que Henry Fielding aux siennes. Mais un lieutenant Lismahago, un commodore Trunnion ne le cèdent en rien au pasteur Trulliber ou au squire Western, encore...
  • TOM JONES, Henry Fielding - Fiche de lecture

    • Écrit par Claude-Henry du BORD
    • 1 120 mots

    Après avoir publié de nombreuses pièces de théâtre dont la meilleure est sans doute Tom Thumb (1730), Henry Fielding (1707-1754) écrit un roman satirique dirigé contre l'homme d'État Robert Walpole, La Vie de Jonathan Wild le grand (1743), et collabore à plusieurs journaux dont le...

Voir aussi