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MILI GJON (1904-1984)

Le photographe Gjon Mili est né à Korçë, dans le sud de l'Albanie, le 28 novembre 1904. Jusqu'en 1920, il poursuit ses études à Bucarest. En 1923, il émigre aux États-Unis et prend la nationalité américaine. Des études d'ingénieur en électricité à Cambridge, au Massachusetts Institute of Technology (jusqu'en 1927) l'amènent à rencontrer Harold Edgerton, inventeur du flash électronique et photographe devenu célèbre par ses décompositions du mouvement dans les hautes vitesses. Autodidacte en photographie, Mili travaille pour la firme Westinghouse jusqu'en 1938 et poursuit des recherches technologiques. Il met entre autres au point une nouvelle lampe au tungstène pour la photographie en couleurs qui deviendra plus tard l'une de ses grandes interrogations. À partir de 1939, la photographie prend de plus en plus d'importance dans sa vie et, tout en se passionnant pour la technique et en restant fidèlement attaché à un statut de photographe indépendant, il travaille régulièrement pour Life et pour d'autres magazines prestigieux. En 1944, il commence à utiliser le cinéma et poursuit des recherches sur le mouvement, s'attachant, en photographecomme en cinéaste, au monde de la danse et de l'opéra qui lui fournit un matériau dans lequel couleur, jeu d'espaces et de temps lui permettent de mener à bien une expression originale. Les récompenses les plus prestigieuses le consacrent et, à la fin de sa vie, tout en publiant et en exposant ses œuvres, Mili devient enseignant.

Le trait le plus frappant de son œuvre reste la cohérence de ses centres d'intérêt, tous marqués d'une passion sans borne pour les mystères du temps et de son déroulement : le jazz lui fournit l'occasion de morceaux de bravoure allant du portrait, de la décomposition des mouvements de danse jusqu'à un film émouvant ; il fait jouer devant son objectif des artistes comme Picasso, Dufy ou Dali ; sa passion pour le classicisme grec se matérialise en un grand essai publié par Life. Dans toutes ces œuvres, il s'attache à montrer, avec une tendresse humaniste, ses découvertes, transfigurées par une étonnante maîtrise technique. Un chat ou un jouet, Hitchcock faisant le pitre en mouvement décomposé, une salle de répétition habitée d'ombre deviennent de brefs moments de poésie. Et son chef-d'œuvre, miniature drôle et impressionnante en même temps que document unique, continue à nous bouleverser : en trois minutes de film à l'efficacité rare, il nous montre son ami Cartier-Bresson au travail et réalise la plus belle analyse du maître de « l'instant décisif » en ludion voleur d'images.

— Christian CAUJOLLE

Bibliographie

Photographs of Picasso, G. Mili et R. Capa, New York, 1950 / The Magic of the Opera, New York, 1960 / Picasso et la troisième dimension, Paris-New York, 1970 / Gjon Mili, Photographs and Recollections, Boston, 1980.

Catalogues

Gjon Mili, avec une Introduction de J.-P. Sartre, Paris, 1946 ; Djon Mili : photographies, Paris, 1971. On trouvera quelques images dans de nombreux ouvrages et catalogues collectifs concernant aussi bien les portraits d'artistes que l'utilisation du flash, la danse, le jazz, ainsi que dans plusieurs volumes mémoriaux publiés par Life.

Filmographie

Jamming the Blues, 1944 ; Raoul Dufy Paints, New York, 1950 ; Casals, Prades Festival, 1950 ; Jean Babilee, Dancer, 1951 ; Salvador Dalí, 1951 ; Stomping for Mili, Bribeck Jazz Quartet, 1955 ; Eisentaedt Photographs « The Tall Man », 1955 ; « Tempest » : Filmaking on Location, 1958 ; Henri Cartier-Bresson, Photographer, 1958 ; Homage to Picasso, 1967.

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Écrit par

Classification

Pour citer cet article

Christian CAUJOLLE. MILI GJON (1904-1984) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • PHOTOGRAPHIE (art) - Le statut esthétique

    • Écrit par Gérard LEGRAND
    • 5 146 mots
    • 8 médias
    ...Charles Cros et Louis Ducos de Hauron, n'ont été mis au point avec des chances d'infaillibilité que dans la période 1940-1950. L'exemple de Gjon Mili (1904-1984) montre que le passage d'une « technique » à l'autre ne modifie pas ipso facto une conception esthétique. Lorsqu'il...

Voir aussi