MAINTENON FRANÇOISE D'AUBIGNÉ marquise de (1635-1719)
Petite-fille du grand poète protestant dont elle porte le nom, Françoise d'Aubigné naquit à la prison de Niort où son père, un débauché, purgeait une peine pour faux monnayage. Baptisée selon le culte catholique, elle reçoit l'éducation huguenote de sa tante madame de Villette qu'elle retrouve en 1647, après un séjour de six ans à la Martinique où son infortuné père avait entraîné toute la famille. Sa marraine la fit enlever, pour lui redonner une éducation catholique, et l'enferma dans divers couvents. Ensuite, elle habita avec sa mère dans le Marais et vécut pauvrement du travail de ses mains. Elle fit connaissance de l'illustre Scarron qui l'épousa alors qu'elle avait seize ans, après la mort de sa mère. Le poète, infirme et de vingt-cinq ans son aîné, la mit en relation avec les milieux intellectuels de la capitale ; il mourut en 1660. Veuve irréprochable, elle se fait remarquer par Mme de Montespan et devint gouvernante de ses bâtards de 1669 à 1673. La favorite en titre ne tarde pas à jalouser cette gouvernante pleine d'esprit, belle de surcroît ; celle-ci, devenue marquise de Maintenon, se plaît à faire la morale au roi et à essayer de le rapprocher de son épouse. Après la mort de la reine, Louis XIV l'épousa secrètement, sans doute en 1684 selon H. Hauser ; mais, demeurant discrète et désintéressée, elle ne se comportera jamais en reine ; l'importance de son rôle dans la direction de l'État reste toujours un problème. Eut-elle une influence sur les décisions royales ? Elle employa, semble-t-il, son crédit surtout pour rendre le roi dévot, mais elle se plaignait fort de son indifférence à cet égard. Avait-elle, un an après son mariage, un poids suffisant pour imposer la révocation de l'édit de Nantes, décision liée surtout à la politique étrangère du roi, à ses différends avec la papauté et à ses ambitions impériales ? Mme de Maintenon approuva résolument la décision royale, ce qui ne veut pas dire qu'elle en eut l'idée et l'initiative. Il est probable qu'elle partageait le point de vue des dévots qui voulaient appliquer, comme par le passé, l'édit de Nantes de façon très restrictive, en utilisant la « caisse des conversions » de Paul Pellisson et en mettant tout en œuvre pour diminuer l'influence du protestantisme et l'asphyxier. Plus qu'une femme d'État, et bien que le roi s'entretînt avec ses ministres devant elle, elle fut la tutrice de l'Église, penchant successivement vers le quiétisme, le jansénisme, puis les abandonnant. Sa grande œuvre fut la Maison royale de Saint-Louis, qu'elle fonda à Saint-Cyr, destinée à l'éducation des jeunes filles nobles et sans fortune. Elle soutint toujours le duc du Maine et le comte de Toulouse, fils de Mme de Montespan, qu'elle avait élevés et qu'elle considérait comme ses enfants. Il est donc possible qu'elle ait usé de son influence pour les faire légitimer. Le Régent ne lui en voulut pas, puisque la pension de Mme de Maintenon fut maintenue après la mort de Louis XIV, lorsqu'elle se retira à Saint-Cyr.
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Écrit par
- Jean-Marie CONSTANT : maître assistant à l'université de Paris-IV
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