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SAINT-ANTOINE FAUBOURG

Édifié à partir du xvie siècle autour de l'abbaye du même nom, entre la Bastille et la place du Trône, le faubourg Saint-Antoine a été, à plusieurs reprises, un lieu d'affrontements et un foyer d'agitation dans la capitale, et cela dès le xviie siècle.

S'il ne prit pas part à la Fronde civile ou parlementaire, il fut, au moment de la Fronde des princes, le théâtre de la bataille des 1er et 2 juillet 1652 qui mit un terme à la prépondérance de la noblesse et assura le triomphe de l'absolutisme royal. L'armée royale, commandée par Turenne, avait réussi à repousser sous les murs de Paris l'armée des princes, commandée par Condé, et s'apprêtait à l'écraser. L'armée des insurgés fut sauvée par la Grande Mademoiselle, qui fit tirer les canons de la Bastille sur l'armée royale.

Certains privilèges concédés par la royauté favorisèrent dans le faubourg Saint-Antoine le développement de l'industrie du meuble, qui y brillait du plus vif éclat à la fin du xviiie siècle. D'autres industries s'y étaient installées, celles de la porcelaine, des papiers peints, des tentures. Ces activités avaient eu pour conséquence la réunion d'une population ouvrière, fort agitée, prête à passer à l'action directe, sensibilisée à l'extrême au prix des denrées alimentaires, et qui sera le fer de lance de la Révolution. Cette population de bras-nus et de sans-culottes apparaît sur la scène parisienne chaque fois que la Révolution semble sur le point d'arrêter son cours, et force la décision par les « journées révolutionnaires ».

Le 27 avril 1789, c'est l'affaire Réveillon, lever de rideau de la Révolution. La maison du fabricant de papiers peints fut pillée par la foule, à la suite de paroles malheureuses qu'on lui prêtait, semble-t-il à tort, sur le sort des ouvriers. On s'est demandé s'il ne s'agissait pas d'une provocation, car Réveillon affichait des sentiments « patriotes » et était un électeur influent. La répression fut extrêmement violente et surexcita le Faubourg. L'occasion de la revanche ne tarde pas : le Faubourg fut au premier plan de la scène lors de la prise de la Bastille.

Par la suite, c'est toujours du Faubourg que partit l'insurrection, le 20 juin et le 10 août 1792. L'agitation était orchestrée par Santerre, brasseur fort riche et populaire pour ses largesses, un des vainqueurs de la Bastille, nommé commandant de la garde nationale parisienne le 10 août 1792. En 1793, Santerre fut disgracié, après avoir conduit une campagne malheureuse en Vendée. Le faubourg Saint-Antoine perdit la première place dans un Paris soumis à la dictature sectionnaire, c'est-à-dire, suivant le vœu de Robespierre, aux plus purs des sans-culottes. La participation du Faubourg ne fut déterminante ni les 31 mai et 2 juin 1793, ni le 9 thermidor.

En revanche, l'agitation populaire renaît sous la Convention thermidorienne, de nouveau pour des questions de ravitaillement. À plusieurs reprises, à la fin de l'hiver 1794-1795, les sections du faubourg Antoine (qui a perdu son « saint » dans la déchristianisation) avaient été à l'origine de motions déposées à la barre de l'Assemblée, pour réclamer du pain et le maintien des conquêtes de la liberté. Les journées des 1er et 2 prairial an III furent la conclusion de cette agitation. Encore une fois, le Faubourg vint investir l'Assemblée pour lui dicter sa conduite. Mais l'Assemblée tint bon, et joua les manifestants avec une fausse fraternisation. Le 3 prairial, le Faubourg fut investi par la troupe ; le 4, il fut désarmé. Réduit à l'impuissance, découragé de la Révolution, le faubourg Saint-Antoine ne devait plus bouger avant les journées de 1830.

Au matin du 28 juillet 1830, la foule des ouvriers des ateliers[...]

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Écrit par

  • : archiviste-paléographe, bibliothécaire à la bibliothèque historique de la Ville de Paris

Classification

Pour citer cet article

Jean DÉRENS. SAINT-ANTOINE FAUBOURG [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • PRAIRIAL AN III JOURNÉE DU 1er (1795)

    • Écrit par Jean TULARD
    • 333 mots

    Le 12 germinal an III (1er avril 1795), la Convention est bloquée par une insurrection des faubourgs Saint-Marcel et Saint-Antoine aux cris de « Du pain et la constitution ! ». L'abolition du maximum a entraîné une hausse vertigineuse des prix : celui de la livre de pain ne cesse de monter. Les...

Voir aussi