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ÉPHREM LE SYRIEN saint (306 env.-373)

Né à Nisibe (Mésopotamie) de parents chrétiens, Éphrem subit profondément l'ascendant du rude et tendre évêque de sa ville natale, Jacques (303-338). De cette époque date probablement sa vocation de « moine à domicile », comme on en trouve beaucoup d'exemples dans son milieu. Sous Vologèse (346-361), le successeur de Jacques, il est un maître en renom. En sa qualité de diacre (il se refusera toujours à dépasser ce degré), il prononce des homélies devant l'assemblée des fidèles et dirige l'exécution de ses propres compositions poétiques par des chœurs d'enfants et de vierges dans la cathédrale de Nisibe. En 363, la ville tombe au pouvoir des Perses, au terme d'un siège mémorable. Avec beaucoup de ses coreligionnaires, il se réfugie en territoire romain, à Édesse, où il jette les bases de la célèbre « école des Perses ». C'est là qu'il meurt.

Éphrem a légué une œuvre syriaque immense, dans laquelle l'apocryphe le dispute à l'authentique. Traduite en grec de son vivant, on la lira plus tard en arménien, en latin, en arabe, etc. Ce qui, dans ces écrits, appartient effectivement à Éphrem est assez considérable pour fonder un jugement. La poésie y tient une place originale, qui autorise la Syrie à continuer de regarder à juste titre l'auteur comme son plus grand poète de langue syriaque. Elle peut revêtir la forme soit de memre (discours métrique), soit de madrasche (hymnes à chanter), quels qu'en soient les thèmes. Il s'agit, dans le premier cas, de séries plus ou moins limitées de vers isosyllabiques ; dans le second, de strophes inégales coupées par un refrain. Éphrem n'est pas l'inventeur de la technique (il a eu un devancier illustre dans le gnostique Bardesane), mais il lui a donné une ampleur jamais atteinte, et son influence en ce point s'est fait sentir jusqu'à Byzance, notamment sur les hymnes didactiques de Romanos le Mélode. On cite volontiers de lui les poèmes dirigés contre les docteurs syriens du gnosticisme ou contre Julien l'Apostat ; en réalité, le genre s'adapte à tous les thèmes, exégétiques, moraux ou liturgiques. Le recueil qui a gardé le plus de résonance est certainement celui des Hymnes de Nisibe, réunis par l'auteur lui-même, qui y chante les malheurs de sa patrie et les maîtres qu'il a admirés.

Éphrem, mieux protégé de la culture hellénique et des controverses que ses émules grecs, Basile ou les deux Grégoire, a une foi moins spéculative, plus proche de la source biblique et de la religion liturgique. Son ascèse exigeante est équilibrée par un sens aigu de la mansuétude divine, une anthropologie optimiste, une dévotion affectueuse au mystère eucharistique et à Marie.

— Jean GOUILLARD

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Écrit par

  • : docteur ès lettres, directeur d'études à l'École pratique des hautes études (Ve section)

Classification

Pour citer cet article

Jean GOUILLARD. ÉPHREM LE SYRIEN saint (306 env.-373) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • RELIGIEUSE CHRÉTIENNE MUSIQUE

    • Écrit par Jacques PORTE, Edith WEBER
    • 6 022 mots
    • 3 médias
    ...devient, après Jérusalem, le centre du christianisme oriental. Après l'hérétique Bardesane (iie siècle) et son fils Harmonios, au nom prometteur, saint Éphrem (mort en 378) écrit, dans le désert, près de quatre cents poèmes dont il compose la musique. Ces hymnes très populaires sont de courtes pièces dont...

Voir aussi