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COLUCHE MICHEL COLUCCI, dit (1944-1986)

Le 19 juin 1986, Coluche a trouvé la mort dans un accident de la route ; alors qu'il conduisait une moto (sa passion), il a heurté un camion. Il est entré aussitôt dans la légende. Pourtant, rien ne pouvait laisser prévoir que cet artiste, spécialisé dans le comique le plus immédiat, serait un jour reconnu, encensé, sacralisé. Il n'avait rien d'un demi-dieu. C'était au contraire un « petit rigolo » dont les détracteurs – beaucoup moins nombreux sur le tard que ses admirateurs – dénonçaient la vulgarité de gugusse mal embouché. Mais, vulgaire, il ne l'était point. « Rigolo », si. C'était son image et sa gloire, son charisme et sa raison d'être. Né le 28 octobre 1944, d'origine italienne, Michel Colucci a commencé sa carrière dans les cafés-théâtres. On le retrouve notamment au Café de la gare, animé par le précurseur Romain Bouteille, aux côtés d'une génération de futures vedettes : Patrick Dewaere, Miou-Miou, Gérard Depardieu, Gérard Lanvin. Là, il écrivait, improvisait, interprétait des sketches d'une qualité et d'une efficacité comique foudroyantes. Il utilisait un parler familier, populaire, volontiers grossier, tout en inventant des formules et des raccourcis qui ne devaient rien à la littérature humoristique sophistiquée, et presque tout au don de la répartie spontanée. Les médias ont fini par découvrir et propager ce phénomène insolite. Peu à peu, Coluche a imposé sa silhouette de petit homme frisotté, binoclard, grassouillet, vêtu d'une salopette à rayures, et son langage où style trivial et fautes de français étaient utilisés à des fins parodiques et comiques. Il aurait pu s'en tenir là. Les philologues, sociologues et exégètes auraient déjà eu de quoi travailler. Car si sa vis comica incontestable faisait sa force principale, elle s'appuyait, dès les origines, sur des bases satiriques. Coluche châtiait les mœurs selon une technique qui a quelquefois prêté à confusion. Ainsi, il ne cherchait pas à ridiculiser les travailleurs immigrés en prenant leur accent et en traitant par le comique leur situation dramatique, mais stigmatisait au contraire le racisme ordinaire de ceux qui en riaient. Si l'analyse que l'on fait aujourd'hui de son attitude paraît subtile, l'effet immédiat en était simple. Coluche ne voulait manifestement pas délivrer un message social : il cherchait plus simplement, plus innocemment, à provoquer le rire. En outre, son inspiration, sa formation, son passé le portaient naturellement à assumer un rôle de « témoin involontaire ». Insistons sur ce point : le premier titre de gloire de Coluche fut d'appartenir à la tradition comique française la plus haute. Il possédait cette grâce particulière, ce don précieux de mettre en joie un auditoire par l'effet de sa seule présence, de sa façon de parler et d'être là. Et puis le comique est devenu comédien de cinéma. On l'a vu dans des films de qualité inégale, et le plus souvent moyenne. Il a participé à quelques navets notoires, à des succès commerciaux honorables. Il a même réalisé un film (Vous n'aurez pas l'Alsace et la Lorraine) qu'il jugeait très sévèrement : « Je ne l'ai pas vu en entier. Il était tellement chiant que je suis parti avant la fin. » C'était là une carrière logique, fondée sur deux formules maîtresses : star system et box office. Coluche abandonna donc les planches pour honorer les contrats cinématographique qui pleuvaient, surtout depuis Tchao Pantin, film dans lequel il interpréta un rôle dramatique qui lui valut la réputation de « grand comédien pathétique », réputation consacrée par les honneurs officiels d'un césar. Cette reconnaissance alla de pair avec la poursuite d'une carrière personnelle qui semblait la nier. Tandis qu'on voulait le faire entrer dans le moule[...]

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Écrit par

  • : journaliste, éditeur, organisateur d'expositions sur le cinéma

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Pour citer cet article

Gilbert SALACHAS. COLUCHE MICHEL COLUCCI, dit (1944-1986) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

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