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GEMAYEL BÉCHIR (1947-1982)

Portrait de Béchir Gemayel - crédits : Thomas Hartwell/ The LIFE Images Collection/ Getty Images

Portrait de Béchir Gemayel

Béchir Gemayel est un produit exemplaire de la petite bourgeoisie maronite au Liban. Né le 10 novembre 1947 à Bickfaya, au cœur de la montagne chrétienne, ce fils de pharmacien a suivi une filière classique : école secondaire chez les Jésuites, puis université Saint-Joseph, d'où il sortit licencié en droit en 1971. Mais ce sportif obstiné à la solide carrure montagnarde était surtout le benjamin de Pierre Gemayel, fondateur (en 1936) des Phalanges (Kataëb Lubnaniyya), dont le nationalisme maronitique ombrageux s'appuyait sur la morale chrétienne et une discipline militaire. Dès 1960, Béchir devint membre des jeunesses du parti et, en 1969, il était à la tête de la centaine de membres de sa section. À la différence de son aîné, Amine, Béchir appartient à la génération des ruptures, à la jeunesse qui a subi les chocs de la défaite de juin 1967 et des révoltes estudiantines de 1968. Face aux changements sociaux et politiques qui secouent le Liban, il choisit de résister, de défendre les droits des chrétiens et la place centrale de sa communauté maronite au cœur du système politique. Après une année de formation juridique à Dallas et à Washington (1972) qu'il a préférée à la formation universitaire française, il abandonne son métier d'avocat à Beyrouth pour se consacrer aux Kataëb.

Laissant à son père la direction politique du parti et à son frère la représentation parlementaire, Béchir se réserve l'action armée. On dit qu'il s'est entraîné dès 1968 en Jordanie ; cette année-là, il a dirigé une expédition contre des étudiants de Beyrouth qui étaient alors en grève pour soutenir la résistance palestinienne. Lorsque cette dernière tient en échec l'armée libanaise (mai 1973) et menace l'équilibre traditionnel, sa conviction est acquise : les Kataëb doivent vaincre militairement les Palestiniens.

Dès le début de la guerre, cheikh Béchir est aux premières lignes : Aïn Remmaneh (avr. 1975), les grands hôtels (oct. 1975), la Quarantaine, Naba'a (janv. 1976), Tell ez-Za'tar (juin-août 1976). Ses faits d'armes lui composent une image glorieuse et cruelle à la fois. Ils lui valent de succéder à William Haoui, le 13 juillet 1976, à la tête du Conseil militaire des Kataëb, et bientôt d'être élu au commandement unifié des Forces de la Résistance (chrétienne) libanaise qui regroupent autour des Kataëb quelques centaines de combattants du Parti national libéral (P.N.L.) de Camille Chamoun, et des dizaines de miliciens du Tanzim, de Marada, partisans de Sleimane Frangié, et de Gardiens du Cèdre. Les Israéliens repèrent en lui un allié potentiel efficace. Il rencontre à plusieurs reprises leurs officiers supérieurs et des dirigeants politiques. Selon le général Gur, il fait part à celui-ci, en 1977, de sa volonté de chasser la résistance palestinienne du Liban avec leur aide ; il reçoit conseils et équipements. Les Forces libanaises deviennent alors une armée de six mille hommes et de trente mille réservistes, dotée d'armement lourd ; en janvier 1981, le service obligatoire est instauré dans la zone du Liban central qu'il contrôle. Ainsi est-il en mesure de résister à ses anciens alliés syriens de la Force arabe de dissuasion dans les batailles d'Achrafieh (juill.-sept. 1978) et de Zahlé (avr.-juin 1981).

La logique d'une hégémonie maronite au Liban pousse à la transformation du chef Kataëb en leader du Front libanais. Elle s'impose brutalement aux forces chrétiennes : attentat contre le fils de Frangié et trente Marada à Ehden, en juin 1978, dont Béchir Gemayel déclare « qu'il fait l'économie de nombreuses vies ». En juillet 1980, massacre de plusieurs centaines de miliciens du P.N.L., après lequel Amine redoute publiquement l'avènement d'un « fascisme rampant » au sein des Forces libanaises. Béchir échappe à plusieurs attentats,[...]

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Écrit par

  • : chercheur à la Fondation nationale des sciences politiques, docteur en science politique

Classification

Pour citer cet article

Elizabeth PICARD. GEMAYEL BÉCHIR (1947-1982) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Média

Portrait de Béchir Gemayel - crédits : Thomas Hartwell/ The LIFE Images Collection/ Getty Images

Portrait de Béchir Gemayel

Autres références

  • LIBAN

    • Écrit par Philippe DROZ-VINCENT, Universalis, Elizabeth PICARD, Éric VERDEIL
    • 26 514 mots
    • 18 médias
    ...par étapes au prix de sanglants affrontements dont les Kataëb sortent vainqueurs, du 16 avril au 4 mai puis du 7 au 9 juillet 1980. Désormais, Béchir Gemayel, fils cadet de Pierre, préside au commandement de la milice de la région, les Forces libanaises qui substituent leur loi à celle de l'armée et...

Voir aussi