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LE RICOLAIS ROBERT (1894-1977)

Inventeur de formes, de structures, de calculs statiques nouveaux, Robert Le Ricolais n'était ni architecte, ni ingénieur, ni mathématicien. Ce grand chercheur et enseignant de l'architecture n'avait aucun titre académique. L'académicien Laprade l'appelle cependant, pour avoir introduit dans cette discipline la méthode expérimentale, le « Claude Bernard de l'architecture ».

Le Ricolais est né à La Roche-sur-Yon. Il prépare une licence de sciences, mais la guerre interrompt tôt ses études et il ne les reprendra plus. Gravement blessé, il reviendra de la guerre avec une pension d'invalide, seule retraite qu'il se soit assurée, n'ayant été durant sa longue vie, laborieuse jusqu'à ses derniers jours, titulaire d'aucun poste.

De 1918 à 1931, il vit à Paris, fréquente l'académie de la Grande-Chaumière et Montparnasse. Peintre constructiviste de la lignée d'un Tatlin, il est de plus en plus attiré vers la construction. Ses connaissances scientifiques, particulièrement en chimie, en cristallographie et en zoologie, lui inspirent par analogie des solutions originales dans ce domaine. Les coquillages, les radiolaires, les cristaux sont autant d'exemples de voiles, de réseaux et d'ossatures qu'il essaye de traduire dans des projets qu'il entreprend en collaboration avec de jeunes architectes novateurs.

La crise économique termine cette période qu'il appelait « baroque », et en 1931 il quitte Paris pour Nantes, trouvant une occupation alimentaire à l'Air liquide, besogne qui lui permet pendant treize ans de se consacrer à sa nouvelle passion : les structures. S'ouvre alors une période féconde pendant laquelle il élabore des systèmes, prend des brevets, publie des articles. On citera : « Les Tôles composées et leurs applications aux structures métalliques légères » (Bulletin de la Société des ingénieurs civils de France, no 5-6, 1935) où il tente d'introduire dans le bâtiment des techniques légères applicables aussi à la fabrication des fuselages d'avions, et « Systèmes réticulés à trois dimensions » (Annales des Ponts et Chaussées, 7 août 1940 et 9 août 1941), annonçant l'utilisation des structures spatiales dans l'architecture. Pour ces recherches, il obtient la médaille de la Société des ingénieurs de France.

La guerre interrompt encore une fois ses espoirs. La paix venue, il démissionne et, en pleine fièvre de la reconstruction, il se lance de nouveau dans la réalisation de ses idées d'architecture légère, modulaire, industrialisable, avec laquelle il propose de résoudre facilement la pénurie provoquée par les récentes destructions. Mais les responsables étaient alors subjugués par les prophètes du béton armé puis de la préfabrication lourde, techniques alors nouvelles et considérées comme révolutionnaires. La reconstruction se réalisera contre les théories de Le Ricolais, aboutissant au résultat qu'on connaît.

Il persévère, pendant sept ans encore, pour faire valoir ses idées. Une seule réalisation résulte de tous ses efforts : le marché couvert de Yaoundé (Cameroun), un hangar de 7 000 mètres carrés, bâti en 1947, qui est la première charpente en bois conçue comme une structure tridimensionnelle composée d'éléments de fabrication industrielle. Cette grande première sera en même temps la dernière structure réalisée grandeur nature par Le Ricolais. Il sera désormais un de ces grands architectes précurseurs de l'histoire, qui, selon leurs détracteurs, n'ont jamais rien construit. De cette période enthousiaste et décevante à la fois, il conservait une amertume profonde, transformée en une ironie teintée d'humour dont il gratifiait spécialistes et autres professionnels du bâtiment, et à laquelle était jointe un mépris inaltérable pour tout ce qui touche à l'argent et au milieu des affaires.[...]

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Écrit par

  • : architecte D.P.L.G., ingénieur D.I.T.H., professeur à l'École nationale supérieure des beaux-arts de Paris

Classification

Pour citer cet article

David Georges EMMERICH. LE RICOLAIS ROBERT (1894-1977) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • ARCHITECTURE CONTEMPORAINE - Construire aujourd'hui

    • Écrit par Antoine PICON
    • 6 531 mots
    • 3 médias
    ...Khan et Horst Berger, il est en effet capable d'accueillir jusqu'à 750 000 pèlerins se rendant à La Mecque. Au travers de tels projets, le programme de travail du théoricien des structures Robert Le Ricolais (1894-1977), qui se proposait d'atteindre une portée infinie pour un poids négligeable,...

Voir aussi