Abonnez-vous à Universalis pour 1 euro

POLDER

Caractères originaux des régions poldériennes

Une œuvre collective

La poldérisation exige une entente entre les propriétaires d'un même polder et, comme les eaux d'un polder ne peuvent être indépendantes de celles du polder voisin, il faut aussi une entente entre polders, d'où la nécessité de l'intervention des autorités administratives et de l'État dès l'élaboration d'un projet. Actuellement, les polders offrent de bons exemples de planification. Il y a généralement une corrélation étroite entre poldérisation et haut niveau de civilisation.

En Hollande, le polder était dirigé par un waterschap, association de polders dont les membres étaient élus et qui avait à sa tête un dijkgraaf (intendant des digues) ; les waterschappen se fédéraient souvent ; il fallut l'occupation française pour vaincre les particularismes néerlandais et pour créer le Waterstaat (service des Eaux de l'État) qui est devenu un puissant organisme d'État, surtout après l'échec de la mise en valeur privée du Haarlemmeer. Dans les polders de l'IJselmeer (lac d'IJsel), l'État reste propriétaire des terres, il les exploite pendant les premières années, il sélectionne avec rigueur les candidats, les encadre techniquement et décide de tous les aménagements.

En France, ce sont les abbayes qui poldérisent dans le Nord : Philippe d'Alsace crée, en 1184, les Wateringues, ou groupement de propriétaires ; supprimées au moment de la Révolution française, elles sont rétablies dès 1801 ; la Plaine maritime est actuellement divisée en dix sections de Wateringues, plus la Grande et la Petite Moëre. En Italie, c'est le gouvernement et les lois de bonification qui vinrent à bout des Marais pontins.

Le paysage et les structures agraires

Le paysage est coupé par les digues mais surtout par les lignes géométriques des canaux : les haies sont inutiles. Les parcelles sont d'autant plus vastes et régulières que le polder est plus récent.

Les polders se composent de grandes exploitations (plus de 34 ha en moyenne dans le Flevoland oriental) qui sont parfois la propriété de l'État lui-même. Le paysage est net, rehaussé par la richesse des cultures et remarquable par la régularité de l'habitat : dans la plupart des cas, les fermes sont dispersées mais en ligne, tandis que les autres maisons sont groupées en bourgs ; phénomène courant dans l'Europe du Nord-Ouest mais surprenant dans les Marais pontins.

L'agriculture des polders est souvent plus riche et plus savante que celle des régions bordières. Les cultures sont souvent préférées à l'élevage : blé et betteraves à sucre en Plaine maritime comme dans les Marais pontins ; dans le Flevoland, un dixième seulement des fermes ont des bêtes, et il n'y aura pas d'élevage dans le Flevoland méridional.

Les villes sont généralement bordières. Certaines, anciens ports au destin aussi divers que Brouage ou Bruges, sont situées à l'intérieur, sur le rivage primitif. D'autres, de construction plus récente, à caractère portuaire ou touristique, sont édifiées sur le rivage actuel, en bord de mer. Parfois la planification a voulu créer une ville nouvelle au centre du polder, par exemple Emmeloord, Lelystad dans les IJselmeerpolders, Latina dans les Marais pontins.

Le premier but poursuivi par la poldérisation fut le gain de nouvelles terres cultivables ; le second, celui de la défense contre la mer, fut de plus en plus aussi important que le premier. Actuellement, le gain de terres agricoles n'est plus rentable. Enfin, la surface d'eau douce devenant plus intéressante que la terre, la poldérisation, du moins dans les pays riches, va vraisemblablement connaître une certaine stagnation.

— André GAMBLIN

La suite de cet article est accessible aux abonnés

  • Des contenus variés, complets et fiables
  • Accessible sur tous les écrans
  • Pas de publicité

Découvrez nos offres

Déjà abonné ? Se connecter

Écrit par

  • : professeur émérite à l'université des sciences et technologies de Lille

Classification

Pour citer cet article

André GAMBLIN. POLDER [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • ALLEMAGNE (Géographie) - Aspects naturels et héritages

    • Écrit par François REITEL
    • 8 281 mots
    • 6 médias
    ...atteint une épaisseur de 14 mètres. La colonisation des tourbières est une page importante de l'histoire du peuplement de l'Allemagne du Nord. Les Marschen (polders), appelés Kooge en frison, occupent près de 8 000 kilomètres carrés (8/10 des polders hollandais). On distingue les Flussmarschen (polders...
  • BELGIQUE - Géographie

    • Écrit par Christian VANDERMOTTEN
    • 6 705 mots
    • 6 médias
    Près de la côte, ainsi que sur les rives du cours inférieur de l'Escaut,des polders ont été reconquis sur la mer et les vasières à partir du bas Moyen Âge. Les polders fluviaux sont protégés du fleuve par des digues, les polders maritimes sont séparés de la mer par un mince cordon dunaire rectiligne,...
  • BONIFICATION DES SOLS

    • Écrit par Roger BÉTEILLE
    • 591 mots

    Bonifier une terre, c'est la rendre productive. Cependant, le terme italien bonifica et la politique qui s'y attache ne concernent pas seulement la production agricole. L'œuvre de bonification intéresse des domaines naturels improductifs ou déshérités : marécages, montagnes ruinées par l'érosion,...

  • CORÉE DU SUD

    • Écrit par Universalis, Valérie GELÉZEAU, Jin-Mieung LI, Stéphane THÉVENET
    • 11 386 mots
    • 9 médias
    ...reliant Inch'ŏn à Mokp'o, assure depuis 2001 la desserte de grands projets de développement : aménagement de la baie d'Ansan au sud de Séoul, gigantesque polder industrialo-urbain du Saeman’gŭm dans la baie de Kunsan (dont la digue principale de plus de 30 km a été achevée en avril 2006) destiné à accueillir...
  • Afficher les 13 références

Voir aussi