Abonnez-vous à Universalis pour 1 euro

GUEROULT MARTIAL (1891-1976)

Philosophe français, né au Havre, professeur de 1929 à 1950 aux facultés des lettres de Strasbourg et de Paris, puis de 1951 à 1962 au Collège de France, où il occupe la chaire d'histoire et de technologie des systèmes philosophiques, président (1929) des colloques philosophiques internationaux de Royaumont, membre de l'Institut (Académie des sciences morales et politiques), Martial Gueroult est un historien de la philosophie remarquable tant par la fécondité et la richesse de ses études que par l'originalité et la rigueur de sa méthode. Il a exercé une grande influence sur la génération française actuelle (le plus proche étant V. Goldschmidt). Ses premiers ouvrages traitent de Fichte et de Maimon : L'Évolution et la structure de la doctrine fichtéenne de la science, de 1794 à 1804, publié en 1930 et La Philosophie transcendantale de Salomon Maimon (1931). Par la suite, son œuvre est tout entière consacrée aux grands maîtres du xviie siècle et du début du xviiie siècle. On ne peut désormais travailler les Méditations de Descartes sans se référer à son étude classique : Descartes selon l'ordre des raisons (1953). En 1939, c'est Malebranche qui retint l'attention de Gueroult (Étendue et psychologie chez Malebranche) jusqu'au monumental traité de 1959 : Les Cinq Abîmes de la Providence, 2 vol. (1. L'Ordre et l'Occasionnalisme, 2. La Nature et la Grâce). L'histoire de la philosophie est étroitement associée, chez lui, à l'histoire des sciences, comme en témoignent les travaux publiés sous le titre Dynamique et métaphysique leibniziennes, en 1939, repris et complétés en 1967 sous un titre légèrement modifié. Brèves mais pénétrantes sont les Quatre Études sur la perception et sur Dieu consacrées à Berkeley (1956). En 1970 sont publiées aux États-Unis ses Études sur Descartes, Spinoza, Malebranche, Leibniz.

Ce n'est qu'après de longues années de scrupuleuses recherches qu'il a consenti à laisser paraître « Dieu », le premier volume de son étude sur Spinoza, explication du livre Ier de L'Éthique (1968) ; le second volume, « L'Âme », ne sera publié qu'en 1974. La même année paraissent ses Études sur Fichte. Après sa mort sera publiée sa Dianoématique, qui comporte Philosophie de l'histoire de la philosophie (1979) et Histoire de l'histoire de la philosophie (1988).

Martial Gueroult présente lui-même sa méthode dans l'avant-propos de Descartes selon l'ordre des raisons. D'abord, il insiste sur l'importance du texte. Il ne faut pas, comme le dit V. Delbos, « sous prétexte de découvrir la signification profonde d'une philosophie, commencer par en négliger la signification exacte ». Il faut subordonner le « comprendre à l'expliquer » par l'attention portée au texte, à ses « enchaînements rigoureux, à ses précises et ingrates obscurités ». L'historien, écrit Gueroult, dispose pour cela de deux techniques : la critique proprement dite, qui s'intéresse aux sources, aux variations, aux évolutions, et l'analyse des structures, qui est la méthode mettant à nu les « structures démonstratives et architectoniques de l'œuvre ». Cette analyse objective est capitale pour l'étude de toute philosophie, car « c'est par elle que se constitue son monument au titre de philosophie, par opposition à la fable, au poème, à l'élévation spirituelle ou mystique, à la théorie scientifique générale ou aux opinions métaphysiques ». Il y a une « indissolubilité du sens et de l'organisation démonstrative » qui fait la valeur des grandes philosophies. Dans sa leçon inaugurale prononcée au Collège de France le 19 décembre 1963, J. Hyppolite, qui succédait à Gueroult, note le problème spécifique que constituent « les systèmes qui se survivent et conservent leur actualité en dépit du cours du temps et des contradictions [...] qui les opposent les uns aux autres ». Il y voit[...]

La suite de cet article est accessible aux abonnés

  • Des contenus variés, complets et fiables
  • Accessible sur tous les écrans
  • Pas de publicité

Découvrez nos offres

Déjà abonné ? Se connecter

Écrit par

  • : agrégée de l'Université, docteur en philosophie, maître de conférences à l'université de Rennes

Classification

Pour citer cet article

Françoise ARMENGAUD. GUEROULT MARTIAL (1891-1976) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • FICHTE JOHANN GOTTLIEB (1762-1814)

    • Écrit par Universalis, Alexis PHILONENKO
    • 8 864 mots
    • 1 média
    ...donc, dans ces conditions, la Doctrine de la science ne s'achève-t-elle pas après le premier énoncé ? Hegel met en évidence cette aporie. M. Gueroult reconnaît que la difficulté est insurmontable et cautionne du même coup l'interprétation du fichtéisme comme un idéalisme subjectif :...
  • PHILOSOPHIQUES SYSTÈMES

    • Écrit par Jacques MOUTAUX
    • 6 747 mots
    Telle est l'idée de Martial Guéroult, qui, prenant acte de la constitution de l'histoire de la philosophie comme discipline particulière, nomme dianoématique une science à la fois positive et transcendantale des systèmes philosophiques conduisant à une philosophie de l'histoire de la philosophie....
  • STRUCTURALISME

    • Écrit par Jean-Louis CHISS, Michel IZARD, Christian PUECH
    • 24 054 mots
    • 2 médias
    D'autre part, on peut considérer comme symptomatique d'une attitude philosophique de l'époque le travail d'un historien de la philosophie comme Martial Guéroult qui, selon un paradoxe qui n'est qu'apparent, a considéré les œuvres philosophiques du passé (Fichte, Descartes, Spinoza...)...

Voir aussi