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SCUDÉRY MADELEINE DE (1607-1701)

Née au Havre, orpheline, Madeleine de Scudéry reçoit une éducation d'une solidité rare pour son sexe, qui contrebalance son goût précoce des romans, et elle se fixe à Paris. Sa laideur lui ôte l'espoir de s'y marier, mais son esprit et l'agrément de sa conversation lui ouvrent l'hôtel de Rambouillet. Elle se lie avec Mlle Paulet et avec Montausier, Chapelain, Conrart, Ménage, Godeau. Bientôt « Sapho » — c'est le nom qu'elle se donne à elle-même dans Le Grand Cyrus — reçoit chez elle, le samedi. Parmi ses hôtes, Mmes de La Fayette, de Sévigné, MM. de La Rochefoucauld, Sarasin, Isarn ; des bourgeoises précieuses comme Mme Aragonnais, Mlle Robineau. Conrart introduit Pellisson, qui, aussi laid qu'elle, devient pour cinquante ans ami tendre, en tout bien tout honneur.

On parle romans et vers nouveaux, on échange des madrigaux, on en consacre à la fauvette de Sapho, on disserte du cœur, on rédige une Gazette du Tendre. Mlle de Scudéry se passionne pour la Fronde ; plus tard elle reçoit une pension de Fouquet. Mais elle n'a à souffrir ni de l'échec de l'une ni de la chute de l'autre. Ses romans, que son frère signe pour la bienséance sans que l'on soit même absolument sûr qu'il en écrive les récits de batailles, font les délices du public français et étranger. Après Ibrahim (1641), où revivent les paysages de Provence traversés naguère par l'auteur, les dix volumes d'Artamène ou le Grand Cyrus (1649-1653) tracent les portraits des héros de la Fronde, les dix volumes de Clélie (1654-1660) animent autour de la Carte de Tendre la société des samedis. Ces romans pseudohistoriques ennuient aujourd'hui par la monotonie et l'abstraction des analyses, des conversations et même des descriptions, sans parler de l'invraisemblance. Ils ont suscité les railleries justifiées de Boileau. Mlle de Scudéry sut abandonner à temps le genre ; à son heure, il a aidé à affiner la psychologie classique et la délicatesse des mœurs.

— Jean MARMIER

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Écrit par

  • : docteur ès lettres, professeur à l'université de Rennes-II-Haute-Bretagne

Classification

Pour citer cet article

Jean MARMIER. SCUDÉRY MADELEINE DE (1607-1701) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • PELLISSON PAUL (1624-1693)

    • Écrit par Bernard CROQUETTE
    • 512 mots

    L'un des poètes les plus représentatifs du mouvement précieux. Paul Pellisson n'a pourtant consacré à la littérature qu'une part restreinte de sa vie. Ce protestant originaire de Béziers, homme d'esprit et de talent, se fixe à Paris en 1650 et achète une charge de secrétaire...

  • PORTRAIT, genre littéraire

    • Écrit par Bernard CROQUETTE
    • 1 000 mots
    • 1 média

    Montaigne demandait pourquoi il n'était pas loisible « à un chacun de se peindre de la plume » comme tel personnage dont il cite l'exemple « se peignait d'un crayon ». Le développement du portrait littéraire (dont les Essais sont justement l'une des premières manifestations...

  • PRÉCIOSITÉ

    • Écrit par Roger LATHUILLÈRE
    • 2 968 mots
    ...condamné à mort pour avoir épousé une certaine Marie Poque, sont admis dans la Chambre bleue avec des roturiers comme Voiture, Chapelain, Conrart, Ménage, Pellisson ; celui-ci, fraîchement arrivé de sa province, est présenté par Conrart dans les cercles parisiens et reçu aux samedis de Mlle deScudéry.
  • SCUDÉRY GEORGES DE (1601-1667)

    • Écrit par Bernard CROQUETTE
    • 637 mots

    Il n'est pas seulement le frère (et le collaborateur) de Madeleine, ou le matamore des lettres qu'on s'est plu à ridiculiser : c'est aussi un poète et un dramaturge apprécié de ses contemporains. Il quitte en 1630 une carrière militaire illustrée par cette retraite au pas de Suse qu'il vantera...

Voir aussi