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DOMINATION

En latin, dominare, c'est exercer la souveraineté, celle du maître, du dominus. Le droit romain connaît le dominium, propriété des choses, et la potestas dominica, pouvoir du maître sur l'esclave. Celui qui domine exerce une contrainte sur la conduite d'autres personnes. La domination résulte du recours à la puissance pour obtenir l'exécution de décisions par une personne ou un groupe. Elle exprime un rapport de dissymétrie sociale entre dominants et dominés, même sans coercition effective, l'obéissance des dominés étant généralement consentie dans la mesure où le pouvoir est considéré comme légitime.

Regards croisés sur la domination

Les phénomènes de domination hantent toutes les sciences humaines et sociales, car ils s'exercent entre individus, entre hommes et femmes, entre groupes majoritaires et minoritaires, entre cultures, entre pays, entre deux entités économiques inégales, dans une organisation religieuse comme dans une institution carcérale, entre couches sociales au sein d'une société stratifiée. Une classe peut se manifester comme dominante par la spécificité de son langage, de ses valeurs, de son style de vie incluant une étiquette. La domination s'entretient généralement par une théâtralisation et une ritualisation des relations, le dominant montrant sa force pour éviter de s'en servir ; le dominé avouant sa faiblesse pour se maintenir en grâce ou en vie.

Du point de vue fonctionnel, la domination, qu'elle soit exercée ou subie, a pour effet d'assurer l'ordre politique et social par une coexistence pacifique des groupes, de contraindre les gens à produire de la richesse, d'intégrer les individus par l'apprentissage de rôles complémentaires, d'assurer la paix entre les nations selon le poids militaire, politique, économique de chacune d'entre elles.

Sous l'angle des enjeux de lutte à propos de l'exercice du pouvoir et de l'influence, la domination développe les inégalités sociales, par exemple entre producteurs et gestionnaires, entre élites étatiques et citoyens. Que la domination s'accompagne d'injustices, d'aliénations et de violences, que la pratique du pouvoir contribue à la réification des structures ne signifie pas que toute domination soit massive, hégémonique et sans degrés, ni que les structures ne puissent se modifier.

Parmi les moyens de domination, on pense à la violence ou à l'hégémonie idéologique, mais il est à noter que, par effet de coopération et de consensus, les dominants n'ont pas besoin de recourir constamment à la force parce qu'ils sont considérés comme s'occupant du bien commun. Les dominés ne remettent pas constamment en question cette suprématie. Ils peuvent supporter les contraintes en en calculant les avantages ou en conservant un lien affectif ou traditionnel avec le dominant jugé honnête ou légitime.

Chaque situation porte sa spécificité. Ainsi, par exemple, Georges Balandier a typifié la situation coloniale : sujétion politique, exploitation économique, clivages sociaux et raciaux, idéologie justificatrice de la domination, inégalités de développement technique et économique.

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Écrit par

  • : professeur émérite à l'université de Paris-V-Sorbonne

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Pour citer cet article

Claude RIVIÈRE. DOMINATION [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

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