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AZNAVOUR CHARLES (1924-2018)

Charles Aznavour - crédits : Henri Bureau/ Corbis/ VCG/ Getty Images

Charles Aznavour

Maurice Chevalier a dit de lui : « Il a osé chanter l'amour comme on le ressent, comme on le fait, comme on le souffre. » Pourtant le chemin fut long et difficile et, avant de connaître une gloire internationale, Charles Aznavour a bien failli subir l'échec définitif magnifiquement décrit dans « Je m'voyais déjà » (1961), bouleversant portrait hyperréaliste d'un artiste aux illusions déçues. De 1946 à 1959, rien ne pouvait laisser présager du destin de celui que les critiques surnommaient « l'enroué vers l'or ».

L'histoire de la famille de Charles Aznavour se confond avec celle du peuple d'Arménie. Sa mère, Knar (« lyre », en arménien) Baghdassarian, née en 1902 à Izmit, en Turquie, devient comédienne et chanteuse. Tout en poursuivant ses études, elle tient la rubrique spectacle d'un journal et c'est en l'interviewant qu'elle rencontre Misha Aznavourian, baryton d'opérette, qu'elle épouse à Constantinople en 1923. Les massacres turcs contre les Arméniens ayant repris – huit ans après 1915 –, le couple fuit vers la Grèce. Lors d'une escale à Salonique, où naît Aïda, la sœur aînée de Charles, ils décident de s'installer en France et de rejoindre Missak, le grand-père paternel de Charles, qui a ouvert à Paris un restaurant, Le Caucase, rue Champollion, fréquenté par la diaspora arménienne.

C'est le 22 mai 1924, rue d'Assas à Paris, que naît Shahnourh Aznavourian. La sage-femme n'arrivant pas à épeler son prénom, le francise d'autorité en Charles. L'enfant grandit entouré de chanteurs, de danseurs, d'acteurs, de musiciens, écoute tous les jours de nouveaux disques et va plusieurs fois par semaine au cinéma. À neuf ans, il tient son premier rôle dans Un bon petit diable, au Théâtre du Petit Monde. Véritable enfant de la balle, il joue un petit Noir dans Émile et les détectives au studio des Champs-Élysées, avant d'interprèter Henri IV enfant dans La Reine Margot d'Édouard Bourdet, aux côtés de Pierre Fresnay et d'Yvonne Printemps, sur la scène du Théâtre Marigny. On le verra également dans Beaucoup de bruit pour rien à la Madeleine et dans L'Enfant, de Victor Margueritte, à l'Odéon. Après une participation remarquée dans une troupe marseillaise, Piotr et ses Cigalounettes, il est engagé à l'Alcazar de Paris dans Vive Marseille, une revue menée par Berval. Il court les radio-crochets et fait, à quatorze ans, une brève apparition dans Les disparus de Saint-Agil de Christian-Jaque, où il rencontre le jeune Mouloudji.

Lorsque la guerre est déclarée, Misha et Knar essayent tant bien que mal de subvenir aux besoins de la famille. Ils acceptent tous les emplois qui se présentent tandis que leurs enfants les aident du mieux qu'ils peuvent. Charles s'improvise marchand de journaux sur les grands boulevards. « Ma voix, je me la suis forgée en vendant des journaux à la criée », dira-t-il plus tard. Il réussit à se faire admettre comme auditeur libre au Conservatoire dans la classe de Georges Leroy, sociétaire de la Comédie-Française et auteur d'une Grammaire de la diction. Il y côtoie des élèves qui connaîtront un parcours prestigieux : Gérard Philipe, Maria Casarès, Robert Dhéry, Colette Brosset, Jacques Charron, Alice Sapritch... Il tient le rôle principal dans Arlequin magicien, mis en scène par Jean Dasté. Il a dix-sept ans et écrit chaque matin une chanson. Il rencontre Pierre Roche, pianiste et compositeur, avec qui il monte un duo. Ils mettent au point un répertoire à base de jeux de mots, d'onomatopées, très inspiré par le swing et le jazz. En 1946, lors d'une émission de radio, Francis Blanche présente Roche et Aznavour à Édith Piaf. Séduite, celle-ci les engage pour une tournée franco-suisse avec les Compagnons de la chanson. Elle est intéressée[...]

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Pour citer cet article

Alain POULANGES. AZNAVOUR CHARLES (1924-2018) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Média

Charles Aznavour - crédits : Henri Bureau/ Corbis/ VCG/ Getty Images

Charles Aznavour

Autres références

  • ARRANGEURS DE LA CHANSON FRANÇAISE

    • Écrit par Serge ELHAÏK
    • 7 929 mots
    • 3 médias
    Jean Leccia (1938-2023), pianiste prodige, devient dès ses dix-huit ans le partenaire musical de Charles Aznavour pour qui il arrange Ce sacré piano, Pour faire une jam, J’aime Paris au mois de mai. En 1961-1962, cet amateur de sections de cuivres succède à Robert Chauvigny et devient le maître d’œuvre...

Voir aussi