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BETTELHEIM BRUNO (1903-1990)

Psychanalyste américain d'origine autrichienne, Bruno Bettelheim fit des études de psychologie et de psychiatrie à l'université de Vienne, sa ville natale. Il acquit ensuite une solide formation psychanalytique. D'origine juive, il est déporté, en 1938, à Dachau puis à Buchenwald, expérience qui allait inspirer son étude ultérieure intitulée Individual and Mass Behavior in Extreme Situations (1943 ; Comportement individuel et comportement de masse dans les situations extrêmes), étude que rendit célèbre le général Dwight Eisenhower en la donnant à lire à tous ses officiers. On y trouve déjà les thèses qui seront développées dans The Informed Heart (1960 ; Le Cœur conscient, Paris, 1977) et dans Survival (1979), et qui analysent la dégradation de l'homme et les moyens de survie dans les camps de concentration nazis.

Émigré aux États-Unis en 1939, Bettelheim devient en 1944 professeur de psychologie de l'éducation (puis, en 1963, professeur de psychiatrie) à l'université de Chicago. C'est en 1944 aussi qu'il prend la direction de l'institut Sonia-Shankman, qu'il réforme, en 1947, en s'inspirant de la psychanalyse freudienne et qui, sous le nom de Chicago Orthogenic School (École orthogénique de Chicago), le rendra célèbre. En 1973, sa collaboratrice la plus proche, Jaqui Sanders, le remplace à la tête de cette institution psychiatrique. Bettelheim, qui en a totalement repensé le fonctionnement, a voulu en faire un lieu où le malade mental réapprend à vivre et dont il peut sortir sans difficulté de réadaptation. Ce centre « orthogénique », décrit dans A Home for the Heart (1974 ; Un lieu où renaître, Paris, 1975), accueille des enfants autistes dont Bettelheim a montré qu'il était possible de les guérir. Celui-ci, dans son ouvrage The Empty Fortress (1967 ; La Forteresse vide, Paris, 1969), a remis en question les idées qui prévalaient au sujet de l'autisme infantile et exposé ses propres théories sur la constitution et la naissance du « soi ».

L'École orthogénique offre aux enfants autistes un « milieu thérapeutique total », dont l'environnement, le cadre de vie et la solidarité qui unit soignants et patients constituent l'esprit et le « ciment ». Elle s'est donné une triple fonction : le traitement des enfants psychotiques ; la formation du personnel soignant et enseignant ; la recherche. Elle assume la première de ces tâches en s'occupant de l'enfant à la fois sur le plan affectif et sur le plan intellectuel. On ne peut, en effet, redonner à l'enfant une vie affective normale sans lui fournir les outils nécessaires à son bien-être socio-économique. Le traitement lui-même repose sur un principe essentiel, qui consiste à procurer à l'enfant un environnement à tout instant favorable, aucun détail même matériel n'étant laissé au hasard. Les pensionnaires y sont répartis en six groupes de huit (trois de garçons, trois de filles), en fonction de l'âge, de la nature des symptômes et des affinités. La vie quotidienne de l'institution se rapproche le plus possible de celle que l'enfant aurait dans une famille idéale et n'est soumise à aucune règle disciplinaire, le personnel devant respecter tout ce que fait l'enfant. Les seules interventions visent à protéger celui-ci, à le rassurer, et les seules interdictions posées sont celles dont on pense qu'elles auront un effet thérapeutique. Bettelheim a banni de son institution tout pouvoir hiérarchisé, car, dit-il, « le pouvoir corrompt ». Il estime que l'École fonctionne parce que le thérapeute est aussi engagé que le patient dans cette aventure communautaire : son grand principe est qu'à travers la guérison du patient quelque chose en chacun se transforme.

Dans son ouvrage intitulé Truants from Life (1955 ; Évadés[...]

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Écrit par

  • : Ph.D. de Columbia University, New York, docteur ès lettres, maître de conférences à l'université de Lille-III

Classification

Pour citer cet article

Pamela TYTELL. BETTELHEIM BRUNO (1903-1990) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • CIRCONCISION & EXCISION

    • Écrit par Catherine CLÉMENT
    • 1 081 mots
    • 1 média

    Depuis que la loi mosaïque a institué la circoncision comme signe de l'alliance entre l'homme juif et son Dieu, depuis que le fait d'être circoncis a pu devenir, pendant le génocide de la Seconde Guerre mondiale, le signe de la mort, on sait comment une marque sur le corps peut inscrire le...

  • CONTE

    • Écrit par Bernadette BRICOUT
    • 5 807 mots
    • 2 médias
    Pour Bruno Bettelheim, le conte a surtout le mérite d'exprimer des réalités que l'enfant pressent mais dont il ne veut pas – ou ne peut pas – parler. Ainsi les plus célèbres de nos contes merveilleux évoquent à mots couverts le tabou de l'inceste (Peau d'Âne fuit son père qui voudrait l'épouser), la...
  • FAMILLE - Évolution contemporaine

    • Écrit par Abel JEANNIÈRE, François de SINGLY
    • 9 828 mots
    ...cherchent à bâtir un environnement au sein duquel la nature de leur fille ou de leur fils puisse se développer. Ils essaient de ne plus imposer leur autorité. Dans Pour être des parents acceptables, Bruno Bettelheim a défini en 1988 le nouvel objectif pédagogique : « Les parents ne doivent pas s'acharner à...
  • FOLKLORE

    • Écrit par Nicole BELMONT
    • 12 229 mots
    • 1 média
    ...donnent à chaque type de conte son organisation, sa structure. Ce problème renvoie à un autre qui lui est connexe : celui de la fonction du conte populaire. Bruno Bettelheim, qui est un des rares à se l'être posé, affirme que les contes aident les enfants à régler les problèmes psychologiques de la croissance...
  • Afficher les 7 références

Voir aussi