Abonnez-vous à Universalis pour 1 euro

CRITIQUE ARCHITECTURALE

Compte-rendu de l'actualité, analyse historique ou esthétique de l'architecture destinée aux spécialistes, analyse des usages sociaux de l'édifice : toutes ces pratiques revendiquent le titre de critique architecturale. Loin de s'exclure mutuellement, elles sont parfois superposées dans le commentaire critique. Dans la presse tant spécialisée que grand public, la critique mêle des textes de célébration de l'œuvre et de son auteur à la description technique et à l'analyse formelle du bâtiment ou du projet, aux textes théoriques, aux prises de position doctrinales, ou encore aux chroniques de l'actualité professionnelle. Au flou de la définition de la critique d'art, à ses relations souvent controversées avec l'histoire et la théorie de l'art, s'ajoute en effet pour la critique architecturale une difficulté liée aux multiples cadres (esthétique, technique, économique) dans lesquels s'inscrit l'architecture. Cette critique s'exerce sur un objet qui est à la fois production artistique et production sociale, et dont la réalisation engage de multiples acteurs et la mise en œuvre de techniques complexes. Depuis le début du xxe siècle, soit les critiques et les architectes déplorent l'absence d'une critique qui envisage et théorise les dimensions esthétiques de l'architecture, susceptible de lui conférer le statut de production artistique ; soit ils réfutent le modèle de la critique d'art fondé sur l'histoire de l'art et l'esthétique, qu'ils jugent inapte à décrire l'objet architectural, à évaluer ses usages, son inscription dans l'espace urbain, et enfin, à constituer un instrument influent sur la pratique.

La critique architecturale : notion et historiographie

Retracer l'ensemble des positions épousées par la critique architecturale, ou décrire l'ensemble des concepts dont elle a usé, reviendrait à faire un inventaire des théories et doctrines de l'architecture depuis la Renaissance, tant la critique est imbriquée avec d'autres formes d'écrits sur l'architecture, théoriques et historiques. L'historiographie situe en effet les origines de la critique architecturale tantôt à la Renaissance, avec les traités, tantôt lors de la naissance de la première revue d'architecture (1789 en Allemagne : Allgemeines Magazin für die Bürgerliche Baukunst, 1800 en France : Journal des bâtimens et des arts). Ce sont deux conceptions distinctes qui se dessinent ainsi : l'une rattache la critique aux investigations théoriques sur l'architecture, l'autre à une pratique, celle du chroniqueur de revue – journaliste ou architecte – qui au xixe siècle contribue à ériger, par le jeu de la publication, des édifices en modèles. Envisageant la critique comme jugement, cette seconde conception laisse supposer que le terme « critique » ait été appliqué aux écrits sur l'architecture par analogie avec la critique d'art, constituée en pratique au xviiie siècle, puis consolidée au xixe siècle. Or, a priori bien plus codifiée (notamment par sa fonction sociale au sein du marché de l'art) que la critique architecturale, la critique d'art elle-même recouvre deux acceptions.

La première est celle de la critique conçue comme genre littéraire autonome, issu de la pratique des Salons. Au xixe siècle, les relations entre critique architecturale et critique d'art comprise en ce sens apparaissent néanmoins ténues. Si cette dernière est née de l'intérêt des écrivains pour la description des œuvres, puis s'est lentement professionnalisée, la critique architecturale n'a pas cette origine littéraire. De notables exceptions peuvent être mentionnées, si l'on considère comme une forme de critique les prises de position – bien que ne s'appliquant pas à l'architecture de leur temps – d'écrivains[...]

La suite de cet article est accessible aux abonnés

  • Des contenus variés, complets et fiables
  • Accessible sur tous les écrans
  • Pas de publicité

Découvrez nos offres

Déjà abonné ? Se connecter

Écrit par

  • : docteur en sciences de l'information, université de Paris 2
  • : docteur en histoire de l'art, enseignante à l'École nationale supérieure d'architecture de Paris-Val-de-Seine

Classification

Pour citer cet article

Valérie DEVILLARD et Hélène JANNIÈRE. CRITIQUE ARCHITECTURALE [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • ARCHITECTURE REVUES D'

    • Écrit par Hélène JANNIÈRE, Marc SABOYA
    • 8 987 mots
    • 1 média
    ...l'architecture et de l'environnement bâti, nombre de revues européennes rejettent l'architecture moderne et l'urbanisme planificateur de l'après-guerre. Elles s'ouvrent parallèlement à de nouveaux programmes critiques, inspirés des sciences sociales, des lectures structuralistes et des analyses marxistes...
  • ARCHITECTURE CONTEMPORAINE - Une architecture plurielle

    • Écrit par Joseph ABRAM, Kenneth FRAMPTON, Jacques SAUTEREAU
    • 11 661 mots
    • 17 médias
    ...consommation, pour l'empêcher d'être complètement minée, en tant que discours, par les forces techniques et économiques envahissantes de la mégalopolis. Ce rappel à la raison eut pour point de départ la publication de deux textes d'une singulière portée, L'Architettura della città d' ...
  • BANHAM REYNER (1922-1988)

    • Écrit par François CHASLIN
    • 793 mots

    Peter Reyner Banham est l'historien de l'architecture le plus intimement lié aux interrogations de cette discipline dans l'après-guerre. Né à Norfolk en 1922, il travaille quelque temps dans l'industrie aéronautique tout en collaborant à la rubrique artistique de divers journaux de l'est de l'Angleterre....

  • BLONDEL JACQUES-FRANÇOIS (1705-1774)

    • Écrit par Michel GALLET
    • 3 057 mots
    Autour de Blondel, dans l'Europe des Lumières, une réflexion critique s'instaurait sur l'essence de l'architecture, la validité des structures traditionnelles, l'emploi raisonné des matériaux. L'esprit philosophique essayait d'abstraire les lois de la composition, dans l'espoir de fonder la beauté sur...
  • Afficher les 17 références

Voir aussi