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ROULETTE

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Les origines de la roulette

Les origines de la roulette ne sont pas faciles à débrouiller, car le jeu paraît issu de multiples croisements. En outre, le mot lui-même a plusieurs sens et recouvre des réalités différentes. On a vu que l'on pouvait ranger la roulette parmi les loteries à résultat immédiat et plus particulièrement parmi les jeux à chances multiples. L'apparition de cette possibilité nouvelle est à la source d'une famille de loteries dont la roulette constitue l'ultime aboutissement.

C’est probablement en Catalogne, autour de 1600, que la formule des chances multiples prend naissance avec le hoca (catalan auca) : il s’agit alors d’une simple feuille de papier divisée en 48 cases avec 48 petits billets qui, roulés et placés dans un sac, vont servir au tirage des numéros. Le jeu est vigoureusement condamné par les autorités locales tout au long du xviie siècle. Passé en France sous la graphie hoca et limité à 30 numéros, le jeu y connut un tel succès dans la seconde moitié du xviie siècle qu'il fallut l'interdire.

Un autre jeu apparaît peu après : le biribisso italien, devenu biribi en français. Le biribi, déjà connu – et même affermé – en Savoie en 1665, a connu sa phase d’expansion maximale au xviiie siècle. Son générateur de hasard est formé de billets roulés placés dans des sortes d'olives en bois percées d'un trou central ; le tout est placé dans un sac que surmonte un dôme d’ivoire s’ouvrant sur le dessus. Ainsi, les manipulations frauduleuses sont moins faciles. Le biribi s’est diversifié en plusieurs variantes, au nombre de cases fluctuant : la version italienne classique du jeu emploie d'abord 42 cases, puis se fixe très vite à 36. Arrivé en France au début du xviiie siècle, le jeu voit son tableau s’agrandir à 70 cases (mais peut en compter 64).

Un jeu de hasard nommé roulette apparaît en France sous une forme encore mal fixée au début du xviiie siècle. Il est interdit en 1716 par un arrêt du Parlement de Bordeaux. En avril 1726, le Mercure de France se fait l'écho du nouveau jeu, qui « est extrêmement en vogue depuis deux ou trois ans ». Mais ce serait une illusion d'y voir la roulette d'aujourd'hui : « C'est un plan incliné fort uni, construit en bois de noyer avec une bordure [...] ; deux rigoles sont pratiquées des deux côtés. » Les joueurs lancent une boule dans les rigoles, celle-ci retombe en suivant le plan incliné et en heurtant divers obstacles, avant de pénétrer dans un portique blanc ou noir. On pariait sur la couleur où s'engouffrait la boule. Il s'agit, on le voit, d'une sorte de « tivoli » (ancêtre du flipper), peut-être dérivé du jeu des portiques, si prisé à Versailles dans les années 1690. Devenue une véritable spécialité des maisons de jeux parisiennes, la roulette poursuivit une carrière discrète que le biribi et le pharaon ont quelque peu occultée. Il faut attendre le 7 mai 1749 pour la voir interdite par une ordonnance de Louis XV. Mais cette mesure, comme toutes celles prises contre les jeux de hasard, reste le plus souvent ignorée ; une ordonnance de police du 24 décembre 1773 dut à nouveau bannir la roulette des cabarets.

C'est à Londres, semble-t-il, que le jeu va prendre définitivement tournure. Introduit dans la capitale britannique peu après Paris, le mot roulette y donna naissance au roly-poly qu'un pamphlet anonyme de 1726 décrit comme un cylindre où l'on jette une boule. L'instrument si caractéristique de la roulette moderne était né. Les alvéoles y sont blanches ou noires. C'est un jeu assez simple, appelé EO – pour even/odd, « pair/impair » –, inventé peu avant 1740, qui popularisera en Angleterre le principe du cylindre pivotant. Sous l'une ou l'autre forme, la roulette en vint à débarquer sur le continent comme en témoigne[...]

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Écrit par

  • : licencié ès lettres, ingénieur du Conservatoire national des arts et métiers, historien du jeu

Classification

Pour citer cet article

Thierry DEPAULIS. ROULETTE [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Article mis en ligne le et modifié le 10/02/2009

Média

La roulette - crédits : Kevin Horan/ The Image Bank/ Getty Images

La roulette

Autres références

  • LOTERIES

    • Écrit par
    • 4 526 mots
    • 1 média
    ...diverses possibilités : colonnes, rangées, diagonales, zones spéciales, etc. En échange de cette répartition des risques, la banque offre un gain moindre. C'est le mécanisme de la roulette. Mais, avant que la roulette moderne n'apparaisse, à Paris dans les dernières années du xviiie siècle,...
  • MACHINES À SOUS

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    Les automates de jeu sont nés dans les débits de boissons. Ils ont pour ancêtres, du moins en France, les petites roulettes de comptoir présentes dans les cafés français dans la seconde moitié du xixe siècle. Ces appareils étaient faits d'une roue en laiton avec décor central peint et vitre protectrice...