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EXPERT ROGER-HENRI (1882-1955)

Issu d'une dynastie de vignerons aisés du Bordelais, Roger-Henri Expert fit ses études secondaires au collège Saint-Elme fondé par les Dominicains à Arcachon, s'inscrivit ensuite à l'école des Beaux-Arts de Bordeaux avant de rejoindre celle de Paris : il obtint le second grand prix de Rome en 1912. Dès cette époque, il travaille avec André Granet pour la construction d'immeubles cossus, square et rue Desaix, dans le XVe arrondissement. Engagé volontaire en 1914, il aurait participé à la conception du casque adopté par l'armée française l'année suivante.

Diplômé en 1920, R.-H. Expert sera professeur à l'École des beaux-arts de Paris à partir de 1922. Il commence à édifier les cinq villas d'Arcachon qui le classeront d'emblée parmi les nouveaux bâtisseurs respectueux de la tradition classique et du système des ordres qui est alors condamné par tous les représentants de l'architecture internationale œuvrant dans la mouvance d'un Van Doesburg, d'un Gropius ou d'un Le Corbusier. Il est toutefois impossible d'enfermer Expert dans la réputation académique qui a été longtemps la sienne parmi les militants du mouvement moderne. De 1931 à 1934, dans un quartier populaire encore, abcès de fixation de la misère parisienne — le XIIIe arrondissement —, il construit l'école de la rue Kuss, vibrante manifestation d'hygiénisme avec ses formes dépouillées et ses raffinements d'éclairage. Quatre niveaux superposés s'étagent en terrasses au-dessus du rez-de-chaussée. Un tel bâtiment relève d'une esthétique du paquebot — figure emblématique pour Le Corbusier —, et Expert concevra bientôt le pont-promenade du Normandie.

Lors de l'Exposition coloniale de 1931, en collaboration avec son ami Granet, il est le responsable des féeries lumineuses du bois de Vincennes, une grande première dans l'utilisation de toutes les possibilités de l'électricité. Pour cet effort inédit nécessité par la mise au point de l'éclairage indirect dans l'illumination des palais, trois mille projecteurs furent dissimulés sous les arbres tandis que deux mille lampadaires éclairaient les allées. Sur le lac Daumesnil, le Grand Signal, une fontaine lumineuse de 45 mètres de haut, projetait des flammes de toutes les couleurs. Le succès remporté à cette occasion par l'équipe Expert-Granet leur valut un peu plus tard la commande des bassins qu'ils installèrent au bas du palais de Chaillot édifié sur l'emplacement de l'ancien Trocadéro de Davioud pour l'Exposition de 1937. Entre-temps, Expert avait été le maître d'œuvre de la légation de France à Belgrade (1928) et surtout l'auteur des ateliers extérieurs de l'École des beaux-arts, rue Jacques-Callot, un fragment d'architecture industrielle, clair et net, avec des locaux aérés en total contraste avec le capharnaüm qui était la règle rue Bonaparte. À la veille de la Seconde Guerre mondiale, Expert commence l'église Sainte-Thérèse-de-l'Enfant-Jésus, à Metz, bâtiment en béton — avec des vitraux de Nicolas Untersteller — qui ne sera achevé qu'en 1955.

Chef d'atelier — la plus haute qualification à l'École des beaux-arts de Paris — depuis 1937, Expert le restera jusqu'à son décès, survenu avant sa réception à l'Institut où il venait d'être élu. Longtemps dédaigné et occulté par les tenants du mouvement moderne — sa réhabilitation date seulement de l'exposition que l'Institut français d'architecture lui consacra en 1983 —, Expert a retrouvé sa juste place parmi les néo-classiques de l'entre-deux-guerres marqués par l'influence viennoise, en particulier celle de J. Hoffmann, et travaillant pour une clientèle aisée soucieuse d'une élégance discrète sans rapport avec les « machines à habiter » d'un Le Corbusier. Il appartient à la dernière génération des « chers[...]

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Roger-Henri GUERRAND. EXPERT ROGER-HENRI (1882-1955) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

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