PRIX LASKER 2018
Les prix de la fondation Albert-et-Mary-Lasker 2018 (plus souvent appelés « prix Lasker » et tenus pour être les équivalents américains du prix Nobel de médecine, ou du moins pour en être l’antichambre) ont été décernés à New York le 11 septembre de cette même année. Ils distinguent quatre chercheurs : Charles David Allis, Michael Grunstein et Joan Argetsinger Steitz, pour leurs contributions à la compréhension de l’expression des gènes – la dernière étant aussi récompensée pour son soutien actif aux jeunes chercheurs et aux femmes en science –, ainsi que John Baird Glen, pour avoir mis au point un anesthésique largement utilisé, le propofol.
Le prix Albert-Lasker pour la recherche médicale fondamentale
Ce prix Lasker a été attribué en 2018 aux Américains Michael Grunstein de l’université de Californie à Los Angeles (UCLA), et Charles David Allis, de l’université Rockefeller de New York, pour leurs « découvertes permettant de comprendre comment l’expression des gènes est influencée par la modification chimique des histones – ces protéines qui entourent l’ADN dans les chromosomes ». Les histones sont fixées sur l’ADN. Ce n’est que vers la fin des années 1960 que l’on s’est rendu compte qu’elles contribuaient à la structure des chromosomes ainsi qu’à la réponse adaptative des gènes à des changements dans l’environnement d’une cellule, objet d’étude d’une branche de la biologie moléculaire, l’épigénétique, l’autre étant la modification chimique de l’ADN.
Charles David Allis est né le 22 mars 1951 à Cincinnati (Ohio). Il y suit sa scolarité et y entame en 1969 des études de médecine qu'il abandonne deux ans plus tard pour la biologie moléculaire. En 1978, il soutient une thèse sur le développement de la drosophile, à Bloomington (Indiana). Il part ensuite pour l’université de Rochester (New York) où il étudie la chromatine du protozoaire cilié Tetrahymena. Il se souvient de ces années de thèse et de postdoctorat dans les laboratoires de Michael Bharier puis d’Anthony P. Mahowald comme de moments exceptionnels et joyeux. En 1981, il est à Houston, où débute son travail sur la modification chimique des histones par des enzymes antagonistes (acylases et déacylases) et leur rôle dans la modification de la structure topologique de l’ADN et, par suite, dans l’expression des gènes. Professeur à l’université Rockefeller de New York depuis 1990, il y poursuit son travail sur l’épigénome, le génome fonctionnel dérivé de l’ADN génomique modulé par l’environnement.
Michael Grunstein est né en 1946 en Roumanie de parents survivants de l’Holocauste. La famille émigre presque immédiatement au Canada, à Montréal, où il étudie à l’université McGill. Il poursuit sa formation à l’université d’Édimbourg sous la direction de Max Birnstiel. Il y soutient sa thèse et se passionne pour la biologie moléculaire naissante. Il retourne ensuite en Amérique du Nord pour son postdoctorat à l’université Stanford (Californie) dans le laboratoire de David Hogness. Il y découvre la possibilité d’isoler des gènes recombinés par hybridation in situ, une percée dans le domaine permettant le clonage de fragments d’ADN précis. En 1975, il crée son propre laboratoire à l’UCLA pour étudier dans un premier temps les histones d’oursins du Pacifique, mais la difficulté d’obtenir des échantillons du fait du phénomène climatique El Niño le pousse à changer d’organisme modèle et à travailler sur la levure de bière. Il démontre alors non seulement le rôle essentiel des histones dans la vie de la cellule, mais aussi le rôle critique de certains de leurs acides aminés dans leurs fonctions, essentiellement dans l’organisation de la chromatine active le long des chromosomes.
Les travaux de Grunstein et d’Allis se complètent et contribuent ainsi à un événement[...]
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Écrit par
- Gabriel GACHELIN : chercheur en histoire des sciences, université Paris VII-Denis-Diderot, ancien chef de service à l'Institut Pasteur
Classification
Média