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PANCHAIA

Nom d'une île d'Orient que, selon Diodore de Sicile, aurait visitée Évhémère. Celui-ci, né en Grande-Grèce vers le milieu du ~ ive siècle et mort en ~ 260 environ, fut l'ami du roi de Macédoine, Cassandre (règne de ~ 316 à ~ 297), qui lui confia différentes missions lointaines et lui donna ainsi l'occasion de visiter l'Inde. L'Histoire sacrée, qu'il rédigea vers la fin de sa vie et dont le texte est perdu, est connue par Diodore de Sicile (Bibliothèque historique, liv. V). Elle rapporte l'utopie de Panchaia, qui fait partie d'un archipel, voisin d'une île très grande et très longue (peut-être Ceylan), d'où l'on aperçoit le rivage indien : « On dirait un nuage à cause de l'immense distance qui les sépare. » De la description assez désordonnée transmise par Diodore, il ressort que l'île de Panchaia est le cadre d'une monarchie théocratique. L'ensemble du territoire est partagé entre les habitants, « pourtant la meilleure part est attribuée au roi qui reçoit en outre la dîme des productions ». Une cité, Panara, échappe à cette autorité, qui semble toute nominale. Les habitants, appelés « suppliants de Zeus » (le terme grec est la transposition coutumière aux auteurs anciens des vocables « barbares »), sont les seuls qui « vivent sous leurs propres lois, sans aucun roi » ; ils élisent chaque année trois magistrats, ayant pouvoir de décision sur les affaires courantes : leur sont soustraites les peines capitales et les questions les plus graves, qui sont déférées aux collèges sacerdotaux. Une troisième partie de l'île, vaste plaine consacrée aux dieux et dont « les revenus vont au trésor des dieux », est célèbre par son sanctuaire de Zeus et par ses bois sacrés. Comme dans presque toutes les utopies antiques, Panchaia est une terre d'abondance, qui est largement irriguée par une eau aux vertus thérapeutiques, et sur laquelle poussent à profusion toutes les denrées nécessaires à la vie ; arbres immenses, essences inconnues dans le bassin méditerranéen, où chantent des oiseaux aux brillantes couleurs, font de ce bois sacré un lieu de délices.

L'organisation sociale repose sur trois classes. « La première est celle des prêtres auxquels s'ajoutent les artisans ; la deuxième est celle des agriculteurs ; la troisième celle des soldats auxquels s'ajoutent les bergers. » La société est fonctionnalisée à partir d'une répartition géographique centrée sur le temple. Les ministres semblent bien remplir les fonctions qui, normalement, reviendraient au roi : « Les prêtres sont les chefs et les arbitres de tout. Ils rendent, en effet, des sentences de justice et ont pouvoir sur toutes les autres affaires publiques. » Le régime est communautaire, au moins en ce qui concerne la production et la répartition des produits du sol et de l'élevage : « La loi interdit à quiconque de posséder quelque chose en propre, exception faite d'une maison et d'un champ. » Les productions mises en commun sont réparties ensuite par les prêtres, qui attribuent à chacun une part proportionnée au degré d'honneur mérité par la qualité du produit apporté. Cette émulation n'exclut pas l'arbitraire, puisque tout se fait selon le jugement des prêtres, qui reçoivent eux-mêmes une double part. Évhémère parle de la souplesse des vêtements, des bracelets d'or, des chaussures aux couleurs vives et, surtout, du temple, qui, très ancien et d'une extraordinaire richesse ornementale, contient « d'innombrables présents d'or et d'argent » et est « d'une grandeur étonnante ».

La Panchaia a été largement utilisée par les auteurs chrétiens des premiers siècles, non pour le récit utopique lui-même, mais pour les thèses qu'y expose Évhémère sur l'origine des dieux. Pour celui-ci,[...]

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Marie-Rose MAYEUX. PANCHAIA [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

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