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BLAIS MARIE-CLAIRE (1939-2021)

Marie-Claire Blais - crédits : Hannah Assouline/ Opale/ Leemage/ Bridgeman

Marie-Claire Blais

Marie-Claire Blais naît à Québec le 5 octobre 1939 et grandit dans un milieu ouvrier. L’éducation scolaire de la jeune fille se passe chez les religieuses catholiques. Mais elle ne tarde pas à rechercher une échappatoire à une ligne de vie trop traditionnelle. En quête d’émancipation, elle devra beaucoup à la fréquentation des cours de littérature française de l’université Laval. Elle ressent alors l’air du « temps que ça change » et se convainc d’y participer par l’écriture. Un premier roman, La Belle Bête (1959) fait parler d’elle en bien – on loue son sens du récit – et en mal – on blâme son amoralité. Il n’empêche, sa voie littéraire est tracée et ce premier roman se voit attribuer en 1961 le Prix de la langue française. Marie-Claire Blais s’affirme alors non seulement en tant qu’écrivaine mais aussi en tant que femme libre et homosexuelle assumée.

Faire bouger les lignes

Après avoir vécu en Nouvelle-Angleterre durant les années 1960, elle choisit en 1972 la Bretagne comme nouveau port d’attache. Entretemps, son œuvre n’a cessé de se ramifier. Moderne dans son écriture, Marie-Claire Blais mêle les genres littéraires (Les Voyageurs sacrés, 1962) ou passe de l’un à l’autre (le recueil de poèmes Existences, 1964 ; la pièce de théâtre L’Exécution, 1968). Dans cet itinéraire polygraphique, un roman fait date : Une saison dans la vie d’Emmanuel (1965). Ce récit en forme de palimpseste agrège divers types d’écrits, comme le journal intime, la lettre ou le poème, et vaut à l’écrivaine de recevoir le prix Médicis en 1966. Elle prend ici à rebours le roman de terroir en se jouant de ses thèmes traditionnels, comme la famille nombreuse ou les paysages de neige. La Nouvelle-France d’avant la « révolution tranquille », souvent présentée comme une terre d’utopie catholique, subit ici des secousses aussi malignes que violentes, et ses habitants n’ont plus grand-chose à voir avec l’imagerie traditionnelle des Canadiens français. L’auteure place au premier plan un jeune poète tuberculeux, Jean le Maigre, sorte de double d’Émile Nelligan, le Rimbaud québécois, mort en 1941 dans un hôpital psychiatrique, et une vierge sujette à des crises mystiques, Héloïse. Celle-ci n’échappera à la pesanteur familiale et au couvent que pour tomber entre les griffes de madame Enbonpoint, patronne de bordel.

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Écrit par

  • : maître de conférences, habilité à diriger des recherches, formateur agrégé de lettres à l'Institut national supérieur du professorat et de l'éducation, Sorbonne université

Classification

Pour citer cet article

Antony SORON. BLAIS MARIE-CLAIRE (1939-2021) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Média

Marie-Claire Blais - crédits : Hannah Assouline/ Opale/ Leemage/ Bridgeman

Marie-Claire Blais

Autres références

  • CANADA - Arts et culture

    • Écrit par Andrée DESAUTELS, Roger DUHAMEL, Marta DVORAK, Universalis, Juliette GARRIGUES, Constance NAUBERT-RISER, Philip STRATFORD
    • 24 894 mots
    • 3 médias
    Marie-Claire Blais (Tête blanche, La Belle Bête, Une saison dans la vie d'Emmanuel) nous plonge dans un monde noir, sans espoir de rédemption. Les êtres se déplacent dans un univers irréel, plongé dans une atmosphère sulfureuse. Ce fantastique morbide atteint à une poésie sauvage et désolée ;...
  • QUÉBEC - Littérature

    • Écrit par Universalis, Jean-Louis JOUBERT, Antony SORON
    • 11 165 mots
    • 9 médias
    Marie-Claire Blais (1939-2021) et Anne Hébert (1916-2000), deux écrivaines qui ont en commun le goût du fantastique, peignent un Québec sombre sur lequel pèsent la fatalité du sang et l’ombre de puissances surnaturelles. L’univers de la première, grinçant et morbide, prenant le contre-pied du roman...

Voir aussi