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KELLIA LES

C'est en mars 1964 que le site des Kellia a été formellement localisé sur le terrain par M. A. Guillaumont dans le désert Libyque, à environ 60 kilomètres au sud-est d'Alexandrie. Ce groupement de cellules — en grec kellia ; en arabe el-Mouna, du grec monh = moine — avait été fondé par les moines de Nitrie, monastère situé près de l'actuel village de Barnougi, pour servir d'annexe. Les Apophthegmata Patrum attribuent la fondation, qui pourrait avoir eu lieu vers 335, à Abba Amoun. Des auteurs anciens relatent que, pour se rendre de Nitrie à Scété, séparés d'une soixantaine de kilomètres, les moines devaient passer aux Kellia.

Ce sont précisément ces témoignages de textes qui ont permis de reconnaître les Kellia dans une multitude de kôms (anciens bâtiments recouverts par le sable) dont la hauteur varie entre 20 centimètres et 5 mètres. Le site est actuellement divisé d'ouest en est en quatre qouçoûr (localités) qui s'étendent sur une longueur de plus de 20 kilomètres et une largeur de 8 kilomètres : les qouçoûr er-Roubâ'îyât, les qouçoûr el-'Izeila, les qouçoûr el-Abîd et les qouçoûr 'Îsâ au sud-est des précédents. Malheureusement, l'extension des zones cultivées de la partie occidentale du Delta a amené la destruction définitive d'environ la moitié des kôms, dont le nombre s'élevait à l'origine à plus de mille six cents. Les fouilles de sauvegarde, entreprises par des équipes française et suisse depuis 1965, ont mis au jour des vestiges architecturaux souvent très tassés. D'après l'histoire de la fondation, on sait que le surpeuplement de Nitrie avait amené certains moines à rechercher une plus grande solitude en s'enfonçant dans le désert vers le sud, en des endroits où la présence d'une nappe phréatique permettait le creusement de puits. Cette eau servait non seulement à la consommation humaine, mais encore à la fabrication de briques crues. Les premiers occupants habitaient des cellules si éloignées les unes des autres qu'ils ne pouvaient ni s'entendre ni se voir. Il est certain que l'agglomération actuelle de certains bâtiments est le résultat d'une lente accumulation. Les constructions en brique crue (sable et marne) étaient recouvertes d'un mortier blanc parfois décoré de peintures. Seuls quelques éléments portants (linteaux, jambages) ou fragiles (seuils) étaient en pierre, matériau rare dans cette région. Les sols étaient constitués d'une chape parfois peinte, mais le plus souvent en terre battue. Les toitures devaient être fréquemment voûtées. Ces différentes techniques expliquent la fragilité des édifices, souvent détruits et reconstruits. Il faut donc dater ces bâtiments avec beaucoup de précautions.

Cependant, les Kellia ont certainement connu l'évolution alors habituelle à de nombreux monastères. D'après Rufin, nous apprenons que les moines avaient l'habitude de se rassembler à l'église le samedi et le dimanche. Au ive siècle il y avait donc une seule église, et ce n'est qu'après le concile de Chalcédoine, en 451, qu'une deuxième église fut construite pour abriter les coptes orthodoxes. Au cours de la seconde moitié du ve siècle, on trouve l'existence de « laures » : les cellules, comprenant un oratoire avec jardin et puits, sont groupées en multiples couvents enceints de murs pour se protéger des incursions des nomades du désert. Ces ensembles de cellules dispersées demeurent la caractéristique originale des Kellia, les sites monastiques traditionnels étant formés d'un seul groupe de cellules resserrées autour d'une église à l'intérieur d'une enceinte.

La période la plus florissante semble devoir se placer aux vie-viie siècles, moment où le peuplement aurait atteint vingt mille à vingt-cinq mille personnes.[...]

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Marie-Hélène RUTSCHOWSCAYA. KELLIA LES [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

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